Première partie :
Observations
Chapitre premier :
L'animal dans
l'existence humaine
Il est intéressant de relever, en guise
d'ouverture à ce travail, que l'animal a existé presque de tous temps aux côtés
de l'homme. En effet, les recherches scientifiques ont démontré que la première
approche entre le loup (ancêtre du chien) et l'homme remontait à plus de 100'000
ans. Ce dernier, alors appelé Homo sapiens sapiens, se nourrissait déjà de
viande grillée. Lui et le loup ont alors passé l'alliance informelle suivante :
le loup bénéficie d'une source stable de nourriture constituée par les restes de
viande grillée dont se nourrissait l'homme; quant à ce dernier, il bénéficie des
compétences du loup pour la chasse et d'un service d'hygiène satisfaisant (en
mangeant les restes de viande grillée, il évite leur décomposition et le
développement de maladies). Ainsi est née le début de la domestication du loup
qui, au cours du développement, a engendré les multiples races de chiens
domestiques que nous connaissons aujourd'hui.
L'attrait et l'intérêt ancestraux de l'homme
pour l'animal se constatent encore aujourd'hui en visitant les grottes de
Chauvet, dans l'Ardèche, où des fresques laissées par ces hommes préhistoriques
représentent des fusions entre lui et l'animal.
La revue Nature,
276, 1978, p.608, révèle que les archéologues ont mis à jour, sur un site
israélien vieux de 12'000 ans, une sépulture dans laquelle était enterré un
enfant entourant de ses bras un chiot.
On peut également lire sur les restes
archéologiques des portes de Pompéi l'inscription "Cave canem" ("Attention au
chien") qui semble prouver l'existence du chien de garde à cette époque-là. La
poésie et la mythologie gréco-romaine regorgent aussi d'illustrations tendant à
prouver l'existence du chien dans la vie quotidienne humaine.
Les historiens du Moyen Age ont montré que
l'encyclopédie médiévale d'histoire natuelle décrit le chien comme "un
animal fidèle, que son amour des humains pousse parfois à donner sa vie pour
sauver celle de son maître"
(Albert le Grand, L'Homme et les Animaux, De Animalibus in Gail Melson, Les animaux dans
la vie des enfants p. 49).
Cependant, du 15ème au 17ème siècle, posséder
des animaux de compagnie était considéré comme un culte païen et la personne en
possession de tels animaux était condamnée pour sorcellerie. Il fallut attendre
le 18ème siècle et ses Lumières pour que l'animal de compagnie soit réhabilité.
Ce n'est qu'au siècle suivant qu'il devient le symbole d'une consommation
bourgeoise affichée. Si dans un premier temps, le chien avait un statut d'aide
aux travaux de la ferme et de la campagne, la révolution industrielle l'a
modifié et actuellement, la plupart de nos chiens ont acquis un statut de
compagnon, voire de gardien.
Actuellement, et d'après les recherches
effectuées par Gail Melson dans son ouvrage intitulé "Les animaux dans la vie
des enfants", un foyer sur deux en France partage sa vie avec un animal
domestique. Selon des observations citées par le neuropsychiatre français Boris
Cyrulnik, neuf millions de chiens seraient dénombrés en France. L'omniprésence
des animaux de compagnie dans notre quotidien nous en fait presque oublier leur
existence. Si l'importance de l'environnement immédiat est reconnu par (presque)
tous les spécialistes du développement de l'enfant, aucun n'a étudié plus en
détail leur présence auprès des enfants et leur éventuel impact sur le
développement de ceux-ci. Tout au plus s'est-on contenté, comme Freud ou Jung
(au travers des tests projectifs), de constater la fréquence d'apparitions des
animaux dans les rêves ou les représentations des enfants.
L'importance de cette présence justifie à mon
avis qu'on s'y arrête un peu plus longuement. La suite de ce travail se propose
d'examiner plus en détail les hypothèses énoncées en introduction en se basant
presque qu'exclusivement sur les observations réalisées sur mon lieu de travail
entre les filles du foyer et ma chienne Scotie.
Comme énoncé préalablement, ma chienne est de
petite taille, très sociable et bien intégrée à La Pommeraie. Je pense qu'il
faut garder cela présent à l'esprit pour la suite de la lecture de ce travail.
C'est pourquoi je me permets en conclusion à ce chapitre premier d'y introduire
une photo de ma chienne.
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Chapitre II :
Première hypothèse
:
Les quatre
fonctions principales
du chien de
compagnie
Je me propose de m'arrêter, dans ce chapitre,
aux principales fonctions offertes par Scotie dans mon intervention éducative à
La Pommeraie. Constatant depuis bientôt quatre ans d'activité dans ce foyer un
apport relationnel secourable lorsque la situation semble bloquée ou inattendue,
je souhaite, dans ce deuxième chapitre, m'arrêter sur quatre récentes
observations afin d'en analyser les bénéfices retirés.
"Etre en interaction"
Observation
: En rentrant de week-end un dimanche de juin 03, Aline est sombre, le visage
renfermé, ses yeux évitant mon regard. Elle me salue du bout des lèvres et part
dans sa chambre. Je la laisse un moment, puis, inquiète de par son silence
prolongé, je me rends vers elle, suivie de Scotie. Elle se trouve dans la petite
salle de séjour de la partie réservée aux filles dans la seconde maison du
foyer, étendue sur un divan, les yeux au plafond, l'avant-bras gauche replié à
moitié sur ses yeux. Elle ne change pas de position à mon arrivée, se contente
de me dire d'une voix à la tonalité particulièrement grave qu'elle ne veut voir
personne. Scotie pose ses deux pattes avant sur le rebord du canapé et renifle
bruyamment. Aline, alors émue, lui gratouille la tête en disant "Oh,
mais c'est Scotie! Comme tu es gentille...",
elle l'invite à monter sur le lit, et restant toujours couchée, à venir se
coucher sur son ventre. Elle retire alors son bras de ses yeux, et, des deux
mains, câline la chienne. Je garde le silence durant toute cette interaction.
Aline se met alors à parler à la chienne. lui avouant, les yeux embués de larmes
retenues, que parfois elle aimerait bien être à sa place. Scotie lui lèche alors
les mains. Aline me parle de son week-end difficile en raison d'une
décompensation en cours de sa mère psychotique.
Discussion
: Les premiers psychosociologues, comme George Herbert Mead (1863-1931) et
Charles H. Cooley (1864-1924) ont insisté sur l'importance de l'interaction dans
la construction du sentiment de soi de l'enfant ainsi que dans toute la pensée
humaine. Ils ne font ici référence bien entendu qu'à l'interaction avec d'autres
êtres humains. S'il n'y a pas d'interaction, l'enfant n'apprend pas qu'il existe
en tant qu'individu et le sentiment de soi n'émerge par conséquent pas. Si un
tel développement n'est fort heureusement guère fréquent dans les premières
années de vie, il peut cependant intervenir plus tard. En effet, la personne
continue, tout au long de son développement, d'avoir besoin d'interactions pour
maintenir le sentiment ainsi que l'envie de continuer d'exister. Parfois, le
besoin de se déconnecter avec ce sentiment et cette envie peut survenir si la
personne se trouve confrontée à des expériences de vie trop douloureuses. La
dépression et le suicide peuvent alors se trouver au bout du chemin. Au regard
de son histoire familiale, de son énorme culpabilité à ce propos et de ses
mutilations durant son parcours à La Pommeraie, je craignais pour cette jeune
fille une telle déconnexion. Mais ma seule présence n'a pas suffi à faire sortir
Aline de sa profonde tristesse. Quelque chose d'autre s'est passée entre elle et
la chienne, qui lui a permis de sortir de son état de mal-être dans un premier
temps, puis d'y mettre par la suite des mots.
Si l'utilisation du chien dans de telles
situations n'est pas la panacée, je ne peux, dans le cas présent et au regard
d'autres situations similaires, que constater qu'il peut, dans certains
contextes, servir d'intermédiaire secourable à des personnes en détresse.
Peut-être que le chien, contrairement à l'adulte humain, arrive libre de toute
arrière-pensée ou de "savoir" voire même du jugement au sujet du vécu de la
personne, ce qui peut faciliter son acceptation. Il en va de même, et par la
force des choses, avec la non divulgation à tout vent de ce que la personne peut
lui confier. Le lien avec l'animal semble par conséquent plus facile, moins
compliqué, et répondant, par sa présence intéressée, au désir le plus ardent de
toute personne: celui d'un amour pur, inconditionnel, mutuel et permanent. Dans
la situation décrite ci-dessus, Aline connaît Scotie depuis trois ans,
l'apprécie beaucoup. Et, ce qui a facilité son acceptation, elle se montre
extrêmement sociable, allant indifféremment vers tout le monde à la recherche de
caresses et d'interactions. Et Aline lui répond habituellement et très
régulièrement par moult caresses, bisous et paroles douces. Scotie a permis a
Aline de sortir d'une souffrance omniprésente et envahissante à notre arrivée ce
qui a provoqué la libération de la parole d'Aline: le lien avec moi a ainsi pu
se réactualiser.
"Prendre soin de"
Observation
: Ce jeudi 17 juillet 2003 a été pour moi une journée riche en événements et en
émotions, puisque j'ai accompagné Bénédicte et Agnès au poste de police pour une
déposition pour agression physique dont elles avaient été victimes aux abords du
Montreux Jazz Festival. Leurs dépositions n'en finissaient plus, surtout celle
de Bénédicte, souffrant de troubles d'ordre psychotique. Nous avons dû rester
plus de quatre heures au poste. Le temps a passé si vite que le soir, au repas,
Scotie n'avait toujours pas reçu sa dose quotidienne de croquettes. J'étais si
fatiguée que je ne m'en suis pas rendue compte. Florence, jeune fille arrivée à
La Pommeraie il y a 8 mois, me fait alors remarquer que Scotie n'a pas mangé de
la journée et me demande si elle est au régime. Il n'y avait plus d'eau non plus
dans sa gamelle. Je réponds que j'ai oublié, car cette journée a été trop riche
en événements et le temps a passé particulièrement vite. Florence, en me disant
qu'elle l'a remarqué, se lève et va remplir les gamelles de Scotie. Puis elle
observe que la chienne a particulièrement faim, car elle se jette littéralement
sur la nourriture. Une fois son repas terminé, Florence la caresse et se met à
lui expliquer que je l'ai un peu oubliée, mais que ce n'est pas comme çà tous
les jours. Elle lui demande de me pardonner.
Discussion
: Selon les éthologues, la néotonie, c'est-à-dire la conservation des caractères
physiques et des comportements juvéniles dans l'âge adulte de nos animaux de
compagnie, serait un mécanisme apporté par l'évolution et destiné à exciter nos
pulsions de protection et de soins. Cette néotonie s'observe, chez le chien, par
d'une part la conservation à l'âge adulte des caractères physiques juvéniles
suivant: une tête plus grosse et plus ronde par rapport au corps, des yeux plus
proéminents, une mâchoire plus courte et des dents plus petites que chez le
loup, ancêtre de nos chiens domestiques; ainsi que, d'autre part, par la
conservation, à l'âge adulte, des comportements juvéniles de soumission et des
demandes d'attention fréquentes. Ces traits s'observent également chez les bébés
humains et disparaissent au cours du développement, comme l'a constaté Konrad
Lorenz. C'est en se basant sur ces observations et ces similitudes que la
biophilie en est venue à émettre l'hypothèse selon laquelle les humains et plus
particulièrement les enfants sont intrinsèquement intéressés par les animaux.
Ces traits de néotonie s'observent chez
Scotie et sont mis encore plus fortement en exergue par sa petite taille ainsi
que les toilettages trimestriels nécessaires à son hygiène et accentuant la
rondeur de sa tête.
L'animal est souvent, au cours de l'enfance
et de l'adolescence, le seul objet de soins accepté par notre culture
occidentale. Il est en effet jugé intolérable qu'un enfant ou qu'un adolescent
puisse prendre en charge, c'est-à-dire être responsable des soins concernant un
adulte ou un enfant quant à son hygiène, sa santé, sa nourriture et sa sécurité.
Par contre, prodigués à un animal, ces soins deviennent tolérables et parfois
même "très bien vus". Si ces soins ne doivent pas être attribués exclusivement à
l'enfant, une prise en charge par lui de son animal, sous le regard bienveillant
d'un adulte, peut lui offrir l'occasion de s'ouvrir à un autre être vivant ayant
des besoins différents des siens.
Toutes ces raisons peuvent expliquer
l'attention de Florence à l'égard de Scotie, sa bienveillance et les soins
qu'elle lui a alors prodigués. Mais également bien plus : en effet, par son
comportement à ce moment-là, Florence, en parvenant à remarquer les besoins d'un
autre qu'elle-même, me montre qu'elle parvient à sortir de sa souffrance
d'enfant maltraitée. De ce fait, elle me montre un début de mieux être
personnel.
"Apprendre"
Observation
: Souvent, en arrivant à La Pommeraie, Scotie se précipite sur Dready et s'en
suit une longue période de jeux entre les deux animaux. Habituée à ce genre
d'ébats et sachant qu'ils ne vont se faire aucun mal, je laisse faire et vaque à
mes occupations habituelles. Cependant, ce 18 juin, la scène attire les regards
inquiets de trois jeunes filles, Elise, Martine et Esther, qui, ne sachant trop
que faire, m'appellent. Je les rassure, mais elles ne sont pas trop convaincues.
Nous les regardons faire, la directrice du foyer nous rejoint et nous commentons
la scène en direct, relevant minutieusement les indices prouvant qu'il s'agit
bien d'un jeu et non d'une agression de Scotie sur Dready : le chat est couché
sur le dos, sa queue remue, il en vient même à ronronner (de plaisir). Lui et
Scotie s'envoient de petits coups de pattes, se tournent autour, puis le chat
sur le dos recommence à jouer de ses pattes avec Scotie, qui essaie d'en prendre
une dans sa gueule. Mais ils ne se mordent pas et quand Scotie parvient à saisir
la patte du chat, elle y va doucement et relâche aussitôt. Dready pourrait la
griffer mais ne le fait pas non plus: ses coups de pattes sont ludiques, car les
griffes ne sont jamais sorties. Etc, etc... Et tout le groupe observe avec
étonnement. Au bout d'une vingtaine de minutes, Dready se lève, quitte le lieu
de jeu et va se percher sur une tablette de rangement dans le couloir. Scotie
s'en va au bureau, sur "sa" chaise, pour une sieste.
Discussion
: Pour l'anthropologue Claude Lévi-Strauss, "les
animaux sont bons pour la pensée".
L'anthropologue français signifiait par là que les animaux et leurs
comportements fonctionnent pour les hommes comme un système symbolique
permettant d'identifier les actions et les émotions humaines et de les rendre
intelligibles. En regardant Dready et Scotie "se battre", Elise, Martine et
Esther donnent du sens au comportement des deux animaux en fonction de leur
compréhension humaine de la situation. Puis, avec l'aide des deux éducatrices,
elles apprennent à décoder les mouvements corporels, les gestes et les sons des
deux animaux pour finalement aboutir à la conclusion que ces deux-là ne se
battent pas, mais qu'ils jouent. Les trois jeunes filles font, par l'observation
de cette scène, l'apprentissage de la communication non-verbale. Si cet
apprentissage se fait correctement au cours du développement, l'adolescent
parvient de lui-même à faire une interprétation correcte de cette observation.
Mais on peut imaginer qu'un enfant ayant connu un développement perturbé par des
difficultés familiales notamment n'ait pas pu faire de manière convenable cet
apprentissage. L'observer sur des animaux permettra peut-être d'en affiner
également l'observation sur les humains, si on se permet de penser que
l'expression des émotions de base que sont la peur, la joie, la surprise et la
colère est grosso modo identique chez les animaux et chez les hommes. Gail
Melson nous apprend que 10 % des enfants américains ne savent pas décoder
correctement le langage non-verbal (Gail Melson, Les animaux dans la vie des
enfants, p. 78).
Cette observation nous montre également que
les trois jeunes filles ont retiré de cette expérience et par leur "ne sachant
pas trop que faire" un sens de la responsabilité: faut-il intervenir ou pas pour
séparer les deux animaux? Imaginons qu'il eut fallu les séparer. Scotie ayant
reçu les bases d'une éducation canine adéquate, les filles auraient appris
comment donner un ordre clair et pertinent à la chienne pour que cette dernière
obéisse (ce qu'elles ont appris à faire pour quelques-unes dans d'autres
circonstances). Elles auraient appris comment agir en pareilles circonstances
autrement que par des coups ou des cris. L'animal peut servir de moyen pour
apprendre qu'il est possible d'obtenir ce que l'on désire autrement que par la
force physique ou par des éclats de voix trop bruyants ou agressifs. En donnant
des ordres clairs et appropriés à l'animal, elles apprennent également à réguler
les pulsions de pouvoir et de domination habitant toute personne.
Bien d'autres apprentissages peuvent être
faits par l'intermédiaire de l'animal et de sa prise en charge, comme par
exemple l'apprentissage du respect de l'animal (ne pas le prendre dans ses bras
à la moindre occasion et de façon soudaine), de la responsabilité (le nourrir,
le protéger, le soigner, ...), mais nous sortons ici de l'observation décrite
ci-dessus, c'est pourquoi nous n'entrerons pas plus loin dans ces autres
apprentissages découlant de la possession d'un animal domestique.
"Former du lien social"
Observation
: Le lundi 21 juillet, Esther se propose pour préparer le souper et me demande
un coup de main. Nous étions à la cuisine alors qu'arrive Julia. Esther et Julia
n'ont pas trouvé de point commun entre elles et s'ignorent pour ainsi dire.
Scotie s'amuse avec son copain Dready comme décrit ci-dessus. Julia, croyant
bien faire, s'approche vivement des deux animaux et en battant des mains crie "Cà
suffit, vous deux! Arrêtez de vous chamailler comme çà".
Esther pose son couteau et demande à Julia d'arrêter immédiatement, car ils ne
se font aucun mal, ils jouent. S'en suit alors une discussion entre les deux
filles sur ce sujet. Esther tente d'expliquer à Julia les signes montrant qu'ils
jouent et qu'ils ne se battent pas. J'approuve. La discussion continue un moment
sur le sujet, puis Julia s'excuse et invite les deux animaux à recommencer à
jouer. Puis elle quitte la cuisine pour aller faire sa lessive.
Discussion
: Cette observation montre combien Scotie peut aider deux personnes qui n'ont
pas grand chose en commun à entrer en communication et former par là-même du
lien social. Julia et Esther n'entraient que rarement en interaction, et jamais
longuement. De plus, Julia considérait Esther comme "bizarre" en raison de ses
comportements à dérive psychotique qu'elle ne comprenait pas. Scotie et Dready
leur ont donné l'occasion d'échanger à leurs sujets quelques paroles
bienveillantes et à former un lien entre elles, aussi bref fut-il.
L'animal, et en particulier le chien de
compagnie, a, comme le montre l'observation ci-dessus, un don particulier pour
faire se rencontrer deux personnes que rien ne rapproche vraiment. Ne serait-ce
qu'autour des soins à lui donner, ou d'une négociation autour d'un comportement
ou d'une sortie à lui offrir. Le chien offre également, lors d'une sortie, de
multiples occasions de rencontre. En effet, quel(le) propriétaire n'a pas fait
l'expérience de se promener seul avec son chien et d'entamer une discussion avec
un autre propriétaire de chien? L'animal sert ici de facilitateur social
permettant à deux inconnus de se rencontrer ou, dans un groupe comme celui
constitué par les jeunes filles de La Pommeraie, permettant à deux filles sans
"atomes crochus" d'entrer en interaction à son sujet et peut être de se
découvrir des passions communes. Le chien sert de médiateur dans la relation; il
permet en effet un échange d'avoir lieu. Ceci s'observe également dans la
première observation décrite en ouverture à ce chapitre: Scotie permet à Aline
de raconter son week-end et ce qui s'est mal passé pour elle en s'adressant à la
chienne tout en sachant que je suis là et que c'est à moi que ces propos
s'adressent; grâce à l'animal, le mal-être d'Aline peut s'exprimer et la
relation entre elle et moi peut s'établir. Certains auteurs parlent à ce propos
de "lubrificateur social" pour qualifier ce rôle de facilitateur de la relation
entre deux individus rendu plus aisé par la présence de l'animal. Reste
néanmoins que ce rôle de médiateur de la relation peut intervenir de manière
tout à fait positive et bénéfique dans la relation éducative, comme le montre
ces deux observations.
Chapitre III :
Deuxième hypothèse
:
Le chien comme
objet de décentration
ou
comme "moi en
miroir"
Observation
Rose est une jeune fille de 18 ans, arrivée à
La Pommeraie il y a tout juste 6 mois, et qui a souffert d'énormes carences
affectives qui l'ont, suite à de multiples formes de maltraitance, conduite à la
rue à 16 ans. Elle a lentement sombré dans diverses drogues et la désinsertion
sociale, avant, affirme t-elle, de décider de s'en sortir. Elle a aujourd'hui
retrouvé un stage qui va peut-être l'amener à un apprentissage. Rose réapprend
gentiment à La Pommeraie à refaire confiance aux adultes et à réexprimer ses
émotions autrement que par des agressions verbales.
Il est 8 heures ce matin du 22 mai 03 quand
j'arrive au foyer, dans un état physique défaillant. En effet, légèrement
enrhumée et passablement fatiguée, je tombe dans les pommes sans crier gare
depuis trois jours. Rose est à la cuisine avec notre stagiaire, notre homme de
maison et une autre jeune fille sur le point de partir à son travail. J'entre à
la cuisine, Scotie sur les talons. A peine le seuil de la porte passé que je
dois regagner les toilettes jouxtant la cuisine, en proie à de nouveaux
vertiges. D'habitude, Scotie fonce vers Rose pour recevoir des caresses et
dispenser quelques "lapouilles" (langage adopté par le foyer et caractérisant
les coups de langue amicaux de Scotie) à la jeune fille qui apprécie ce rituel
et lui fait moult compliments. Mais ce matin, Scotie ne va pas vers elle, elle
me suit et monte la garde devant la porte des toilettes, ignorant les appels de
Rose.
Je reviens à la cuisine, encourage la chienne
à aller dire bonjour à Rose, ce qu'elle finit par faire après cependant
plusieurs nouveaux encouragements de ma part. Rose l'accueille d'un "Ah!
Quand même! C'est pas trop tôt!",
puis le rituel des caresses et des lapouilles se met en place. Scotie fixe Rose
du regard, qui parle alors à la chienne en lui disant qu'elle croyait qu'elle ne
l'aimait plus, puis "Ah! Tu
aimes çà, les caresses, hein?",
suivi de "Tu en as de la
chance, toi, de recevoir autant de caresses...",
"Mais, oui, tu es gentille!".
Elle descend ensuite de sa chaise, se met à quattre pattes, joue un moment avec
Scotie. Puis après avoir reçu quelques coups de langue sur le nez, elle part à
son travail, un sourire naissant au coin des lèvres.
Discussion
: "Dans leur "conquête" du
milieu humain, ..., les animaux ont dû avoir la capacité de stimuler et libérer
les émotions, affects et phantasmes de l'Homme "en lui faisant croire" qu'ils y
adhéraient, c'est-à-dire en déployant des comportements qui touchaient sa
sensibilité, ses émotions, son affectivité et ses rêves les plus fous"
( L'enfant et l'animal, les émotions qui libèrent l'intelligence, Hubert
Montagner, p. 26). "A
contrario, les espèces animales dont les comportements spécifiques ou acquis
n'ont pu éveiller et stimuler l'adhésion émotionnelle et affective de l'Homme
n'ont pas trouvé la même place auprès de lui"
(Op.ci. p. 28). Nous avons vu ci-dessus (chapitre II) et avec l'éthologie que la
néotonie pouvait expliquer tout ou partie de l'intérêt que l'être humain apporte
au chien. Cela peut une fois de plus s'observer dans la description du cas
ci-dessus. Mais ce qui est surtout intéressant de relever ici est l'occasion que
donne Scotie à Rose de vivre ce que le psychosociologue Charles H. Cooley a
appelé des expériences de "moi en miroir". Il entendait par là que l'enfant
construit son identité personnelle, son moi, à partir des qualités reflétées par
les yeux des autres. Ces autres étant, pour les psychosociologues de cette
génération, des êtres humains exclusivement. Puis les psychologues de la
relation d'objet et du moi reprennent cette idée, notamment Heinz Kohut, qui
parle des "expériences d'auto-objet", au nombre de sept, que l'enfant peut
faire en vivant une interaction avec d'autres êtres humains. Chacune de ces
expériences a une fonction importante dans la construction du moi. Il s'agit
donc, pour Heinz Kohut, d'expériences nécessaires à toute personne et plus
particulièrement à l'enfant pour qu'il puisse établir et préserver un sens du
moi cohésif et équilibré. Je ne citerai ici que trois de ces fonctions qu'il me
semble envisageable de transposer dans les relations que l'enfant peut établir
avec son chien familier :
Il s'agit tout d'abord de la fonction de
miroir: la personne se sent reconnue et affirmée dans son existence par le
regard porté par autrui. Selon Hubert Montagner (op.ci. p. 118), "les
chiens sont en quête permanente du regard des humains. Ils initient et acceptent
des contacts oeil à oeil de longue durée, montrent et "démontrent" à tout moment
une attention visuelle très soutenue".
Si ceci dépend de la race et de l'éducation du chien, c'est particulièrement
vrai pour Scotie, qui semble capter le regard dès qu'on lui en offre l'occasion.
Toujours selon Hubert Montagner, "Il
est en effet fréquent que, dans les interactions oeil à oeil, l'animal ait un
regard "agrandi" et "aimanté". Il paraît alors marquer son adhésion aux
comportements, émotions, affects, paroles, pensées de l'enfant en développant
des comportements affiliatifs lisibles, renouvelés et durables. Par exemple, il
lèche le visage ou les mains de l'enfant ... Il peut enchaîner en se
mettant sur le flanc ou le dos ..."
(op ci. p.119), ce qui s'observe dans la description du cas reporté ci-dessus. "Comme
dans la relation avec la ou les personnes d'attachement (père, mère),
l'attention visuelle soutenue vis-à-vis des yeux du chien familier fournit aux
enfants un "cadre" relationnel, temporel et spatial de repères familiers, a
priori sécurisants, en tous cas non insécurisants. ... Il (l'enfant) a le temps de donner une
signification et un sens aux regards et comportements du chien, en tout cas de
les interpréter par rapport à ses émotions, à ses affects, à ses pensées dans
une interaction non brouillée par les paroles et gesticulations. Son discours
montre qu'il se sent considéré comme une personne unique. Il libère son
comportement et ses productions langagières" (op.ci. p. 120).
En effet, dès que Scotie s'approche de Rose, cette dernière l'accueille avec
bienveillance, la caresse, se met à lui parler pour lui exprimer son soulagement
d'être aimée par elle. Ses paroles trahissent alors son besoin d'être reconnue,
aimée et également son besoin d'attention. Son contentement quand Scotie lui
donne enfin son attention se libère alors dans le jeu. Son plaisir est alors
évident et elle peut partir travailler avec le sourire.
Les émotions que toute personne peut
identifier chez son animal et vivre avec lui sont à mon avis les suivantes : la
joie, le plaisir, la surprise, la peur, la colère, la tristesse, le dégoût, la
détresse, l'intérêt, la culpabilité, la honte et l'amour. En identifiant ces
émotions chez soi et chez l'autre ainsi qu'en les verbalisant ou en apprenant à
le faire, la personne développe ce que Daniel Golemann a appelé l'intelligence
émotionnelle, qui englobe une perception de la vie intérieure des autres
créatures. En projetant sur Scotie des émotions et des sentiments, Rose
s'exprime en réalité sur ses propres émotions et ses propres sentiments. Daniel
Golemann a entre autre montré que dans la communication entre humains, le mode
de communication des émotions est non verbal. L'apprentissage de leur
identification et leur verbalisation par l'intermédiaire des animaux pourrait
faciliter sa transposition sur les êtres-humains, peut-être surtout si l'enfant
n'a pas appris à le faire ou n'a pas pu le faire correctement dans son milieu
d'origine. Néanmoins, il ne semble pas exister à ce jour d'étude empirique qui
se soit penchée sur ce sujet.
La deuxième fonction retenue est celle de
l'efficacité, c'est-à-dire de se sentir capable de susciter une réaction de la
part de l'autre. Nous pouvons constater la satisfaction de Rose quand Scotie
répond à ses appels : elle le câline, lui parle, puis quitte sa chaise pour
jouer avec elle. Elle s'est probablement sentie valorisée, gratifiée, d'avoir
réussi dans son désir de susciter l'intérêt de la chienne. Peut-être même que
cela lui a donné un peu plus confiance en elle.
Puis finalement, la fonction de vitalisation,
c'est-à-dire de sentir que l'autre est en phase avec ses propres émotions. La
scène finale, avant le départ au travail, peut nous laisser supposer que ce
sentiment-là a été vécu par Rose, ce qui l'a peut-être amenée à modifier son
état émotionnel sur le moment.
Chapitre IV :
Troisième hypothèse
:
L'animal comme
occasion de rencontre
avec les drames
fondamentaux de la vie
Observation
L'observation décrite ci-dessous a été
réalisée il y a une année environ avec la chatte en gestation de La Pommeraie,
Tic Tac, animal également interactif par excellence. J'émets l'hypothèse qu'une
telle observation peut être réalisée également avec une chienne, ce que je n'ai
pas encore pu faire avec Scotie.
Nous étions, un collègue éducateur, la
directrice et moi-même en montagne avec une fille et sa famille pour fêter son
aniversaire. C'était un dimanche après-midi. Seules deux filles, Adrienne et
Lucie, étaient au foyer, avec Tic Tac en fin de gestation. Nous avions emmené le
natel de garde de La Pommeraie, pour maintenir un lien sécurisant pour les
jeunes filles restées au foyer et pour pouvoir intervenir en cas de besoin. Nous
en étions au café quand le téléphone de garde sonne. Au bout du fil, Adrienne,
tout excitée et paniquée aussi, car la chatte était en train de mettre bas et
elle et Lucie ne savaient comment réagir en pareille circonstance. La directrice
les a rassurées : elles ne pouvaient rien faire, si ce n'est laisser la chatte
tranquille, lui offrir un climat calme et paisible et lui laisser à proximité
une gamelle remplie d'eau fraîche. Puis elle leur a fait raconter dans le détail
le déroulement des événements, et elle nous répétait les paroles des filles.
C'est ainsi que nous avons vécu en direct malgré la distance qui nous séparait
et avec beaucoup d'émotions partagées la naissance des huit chatons de Tic Tac.
Tout s'était déroulé au mieux, et nous avons terminé notre repas d'anniversaire
dans le bonheur de retrouver au retour les nouveaux-nés.
Une fois rentrés au foyer, nous avons
chaleureusement félicité les filles pour leur assistance bienveillante et leur
téléphone qui nous a permis de partager cette naissance avec elles. En regardant
les chatons, nous avons remarqué que deux petits avaient l'air plus maigrelets
que les autres. Ils sont morts deux jours plus tard. Les six autres ont fait le
bonheur du foyer durant trois mois, puis nous les avons donnés en adoption.
Discussion
Cette observation nous permet de constater
que, dans le partage de la vie quotidienne avec un animal de compagnie tel que
le chat ou le chien, se présentent souvent, et parfois même sans que nous ne
l'ayons choisi, des morceaux de vie sélectionnés par nos compagnons à quatre
pattes et destinés à nous offrir des occasions de partage émotionnel, plus rares
à vivre sans eux. Il s'agit des moments marquants de la vie animale et de la
vie humaine que sont la naissance, la maladie et la mort.
La gestation de Tic Tac a été l'occasion de
nombreuses discussions autour de la reproduction, de la paternité, des
difficultés liées à l'âge de la future mère, etc. Tout le groupe attendait la
venue des chatons et cela a suscité de nombreux témoignages de filles qui
avaient déjà eu l'occasion d'avoir des chats dans leur famille. Quand la
naissance des petits de Tic Tac a eu lieu, les adultes étaient absents du foyer
et les jeunes ont dû alors réagir de la façon dont elles jugeaient la plus
appropriée. Expérience responsabilisante qu'elles ont vécu d'abord dans le
stress, l'inquiétude et une certaine peur que les naissances se passent mal.
Elles ont finalement trouvé les ressources suffisantes pour gérer au mieux une
situation nouvelle. Expérience valorisante également, puisqu'à notre retour,
elles ont été félicitées pour l'accueil bienveillant et non stressant qu'elles
ont réservé aux petits et les gamelles propres et pleines déposées au chevet de
la chatte. La dynamique de groupe déclenchée par ces naissances a contribué à
rendre une ambiance chaleureuse et protectrice dans la maison pour quelques
temps encore, l'attention étant plus portée sur les petits que sur les conflits
inter-personnels habituels.
Puis le décès des deux chatons malingres ont
lancé des débats sur la vie et la mort, l'injustice de cette dernière ainsi que
les raisons de ces brutales disparitions. Gail Melson parle à ce propos de
l'opportunité que donnent les animaux aux personnes vivant avec eux d'une
rencontre avec les drames fondamentaux de la vie. S'il est vrai que ces drames
que sont la naissance, la maladie et la mort se rencontrent également hors la
présence des animaux, il est plus fréquent pour les enfants d'assister leur
animal dans la naissance, la maladie ou la mort que d'assister un parent malade,
naissant ou mourant. De plus, il peut être plus facile pour les adultes de
parler des ces drames fondamentaux avec les enfants quand ils concernent des
animaux plutôt que des proches. Peut être parce que le climat émotionnel à leur
sujet est moins chargé ou moins complexe qu'au sujet des humains, parce que
justement moins conditionné par des normes sociales implicites régissant ce
qu'il convient de dire ou de taire au sujet de ces expériences de vie.
Quoi qu'il en soit et comme nous l'avons déjà
vu dans le chapitre II de ce travail, le lien avec l'animal étant plus spontané
et moins compliqué vu leur absence de langage et par conséquent de jugement à
leur sujet, il peut s'avérer un outil pédagogique de première qualité dans
l'apprentissage des moments de vie significatifs du quotidien de tout être
vivant, humain ou animal.
Chapitre V :
Quatrième hypothèse
:
L'animal
comme moyen de
réassurance
Observation
Joëlle est une jeune zaïroise de 17 ans, qui
a vécu des traumatismes de guerre dans son pays. Elle y a également perdu sa
mère, et la description faite par elle sur ces moments de son histoire de vie
m'a plus d'une fois donné des sueurs froides. Elle n'a fait qu'un passage de
quelques mois dans notre foyer. Elle est ensuite partie en studio, tout en
continuant de bénéficier d'un appui éducatif de La Pommeraie, afin de mener à
bien un apprentissage dans l'hôtellerie. A son arrivée au foyer, elle avait un
peu peur de Scotie. Elle m'a dit que dans sa culture, les animaux étaient
considérés comme des choses sales. Mais Joëlle a très vite trouvé une utilité à
Scotie. Le soir, pour regagner sa chambre, elle devait traverser une petite
pelouse particulièrement sombre en hiver. Elle me demandait alors, lorsque
j'étais de service, de lui "prêter" Scotie, à qui je devais mettre préalablement
sa laisse, pour regagner sa chambre dans la deuxième maison de l'institution.
Nos deux maisons sont séparées l'une de l'autre par une pelouse et un étang. En
hiver, il fait sombre dès 20 heures et nous n'avons pas de lumière extérieure
éclairant le petit chemin menant de l'une à l'autre maison. Et Joëlle avait sa
chambre dans la deuxième maison, baptisée communément "maison du bas". Une fois
de l'autre côté, elle détachait la laisse et Scotie regagnait la "maison du
haut", aboyant devant la porte d'entrée pour que je lui ouvre. Le matin, au
petit déjeuner, Joëlle me rapportait la laisse de la chienne. Ce petit manège a
duré trois mois, puis Joëlle a arrêté de m'en faire la demande et a regagné sa
chambre par elle-même.
Discussion
Le psychiatre britannique et théoricien de
l'attachement John Bowlby a montré comment les jeunes enfants peuvent s'appuyer
sur un gardien qui les rassurent quand ils sont stressés ou inquiets en tirant
de cette relation un sentiment de sécurité et de bien-être essentiel à leur
capacité à survivre. Il se référait également à un gardien humain, en premier
lieu la mère en tant que première figure d'attachement de l'enfant. Bowlby a
baptisé cette forme d'attachement "attachement primaire". Viennent ensuite les
autres acteurs présents dans la vie de l'enfant, comme par exemple le père, les
frères et soeurs plus âgés, mais il n'a jamais cité les animaux.
Actuellement, cette hiérarchie dans
l'attachement est remise en cause par les psychologues, qui ont montré que
l'enfant développe simultanément des attachements multiples. Mais les chiens
n'ont jamais été cités ici non plus comme figure d'attachement, malgré leur
présence parfois constante auprès de l'enfant et leur capacité évidente
d'interagir avec lui ainsi que, notamment, de protéger leur maître.
Quand cet attachement peut se dérouler
normalement, l'enfant développe ce que Bowlby a appelé un attachement secure:
l'enfant apprend alors que ses besoins vont être satisfaits, et,
progressivement, il apprend la confiance et il se développera ainsi de façon
adéquate.
Mais lorsque cet attachement secure ne peut
être vécu par l'enfant, il ne pourra pas apprendre à avoir confiance en son
environnement pour combler ses besoins et différents troubles vont alors se
mettre en place. La Pommeraie accueille souvent des jeunes filles avec des
troubles de ce type-là. Un travail important doit alors se faire rapidement pour
qu'elle puisse "rattraper" ce retard et reprendre un développement adéquat.
Dans la situation décrite ci-dessus, Joëlle
montre une peur de la nuit et un besoin d'être sécurisée. Au regard de son
histoire de vie, je peux en déduire que sa confiance dans un environnement
stable et sécurisant a probablement été perturbé, notamment en raison de la
guerre dans son pays lorsqu'elle était enfant. Le décès de sa mère ainsi que son
placement en foyer, rajoutés à cela, peuvent sûrement être des indices révélant
l'existence de différents traumatismes ou en tous les cas révélant l'existence
d'un fort sentiment d'insécurité. Sa demande d'être accompagnée de Scotie pour
traverser une obscurité lourde de traumatismes vécus et ne demandant qu'à
rejaillir du plus profond d'une enfance déjà lointaine pourtant, si elle n'est
pas suffisante pour permettre à cette jeune fille l'accès à un sentiment de
confiance envers les autres, peut néanmoins être utile à son apprentissage,
comme nous le montre l'observation ci-dessus. La chienne sert ici de béquille de
réassurance pour Joëlle. En effet, se sentant protégée par les aboiements de
Scotie en cas de danger et après une expérience de trois mois, la jeune fille a
acquis la certitude que rien ne peut lui arriver la nuit en traversant le jardin
de La Pommeraie, et, au bout de trois mois, elle peut lâcher sa béquille et
traverser toute seule les maisons.
Elle fait en plus l'expérience d'une
confiance accordée à un animal présent et disponible malgré son sentiment
culturel d'objet sale. Une certaine complicité s'établira dès lors entre elle et
la chienne qui l'attend le soir pour accomplir sa mission.
Les sciences sociales ont mis en évidence le
concept de pourvoyeurs de soutien social pour parler de l'aide que peuvent
donner d'autres êtres humains à leurs semblables en souffrance. En effet, les
personnes bénéficiant de soutien de la part de leurs semblables en cas de
difficultés s'en sortent mieux et plus facilement que celles ne pouvant compter
que sur elles-mêmes. J'émets ici l'hypothèse que dans le cas décrit ci-dessus
Scotie a rempli cette fonction de pourvoyeuse de soutien social, en parallèle
avec les éducateurs et les autres personnes entourant Joëlle. Je pense en effet
que Scotie a donné à cette jeune fille une aide qu'elle n'a pas pu ou pas su
trouver auprès des adultes. Scotie s'est montrée ici un complément fort utile à
mes propos d'éducatrice tendant à raisonner verbalement Joëlle afin de dissiper
sa peur de la nuit. Je pense que Joëlle a pu m'entendre, mais elle a ensuite eu
besoin de tester mes propos à sa manière et probablement sans le support verbal.
Scotie lui a permis de mettre en place ce test et d'en prouver par ses propres
moyens la véracité.
Deuxième partie :
Opérationnalité de
ce travail :
L'introduction d'un
chien d'institution
à
La Pommeraie
Introduction
En me basant sur les observations décrites et
discutées dans la première partie de ce travail, je vais brosser ci-après les
grandes lignes du projet permettant à mon institution de faire l'acquisition
d'un chien dit institutionnel, si les conclusions de ce travail s'avèrent
positives et si tel est le choix de l'équipe éducative de La Pommeraie.
En effet, ayant constaté dans la première
partie de ce travail le support que peut offrir le chien dans l'intervention
éducative auprès de jeunes filles en difficultés psycho-sociales, je
souhaiterais pouvoir en introduire un à La Pommeraie, qui soit continuellement
présent auprès des jeunes filles et pas uniquement lors de mes présences
éducatives, comme cela est le cas actuellement avec Scotie.
L'appellation "chien institutionnel"
m'appartient et sert à désigner un chien particulièrement éduqué pour pouvoir
vivre en institution avec des personnes en difficultés psycho-sociales. Je me
suis inspirée de ce qui existe déjà dans le monde du handicap physique et plus
particulièrement de l'association française A.N.E.C.A.H. (Association Nationale
d'Education de Chiens d'Aide pour personnes Handicapées), qui forme et remet des
chiens d'assistance aux personnes souffrant d'un handicap moteur pour les
assister dans les gestes de la vie quotidienne. L'A.N.E.C.A.H. a inspiré
l'association suisse Le Copain, qui forme à Granges, en Valais, des golden
retrivers et des labradors pour assister les personnes à mobilité réduite dans
toute la Suisse. Le modèle de référence pour la formation de ces chiens existe
depuis plus de 25 ans et a été mis au point aux Etats-Unis par la C.C.I. (Canine
Companions for Independance). Si les chiens peuvent recevoir une formation pour
aider des personnes souffrant d'un handicap physique, je pense qu'ils pourraient
également recevoir une instruction spécifique pour vivre en institution
éducative et répondre à leur manière aux carences affectives ou aux différents
troubles psycho-sociaux de nos jeunes. Reste à voir comment et dans quelles
conditions. C'est ce que se propose d'examiner la deuxième partie de cet
ouvrage.
Problématique
En quatre ans de travail à La Pommeraie, j'ai
constaté avec récurrence, comme souligné dans la première partie de ce travail,
les problématiques du déficit affectif et des troubles du développement auprès
des jeunes filles que le foyer accueille. L'aide de ma chienne dans certaines
situations, comme mentionné précédemment, pour maintenir ou créer un lien qui a
été perturbé ou difficilement existant m'a été plus d'une fois d'un secours
indéniable. Je ne m'étendrai pas plus ici quant à la problématique, car elle a
été largement développée et discutée dans la première partie de ce travail.
Hypothèses de
compréhension
A l'adolescence, d'un point de vue
psychodynamique, toute carence dans le développement peut se rattraper si les
conditions dans lesquelles vivent les jeunes leur permettent de le faire. Mais
il faut agir rapidement, car l'adolescence est une période de vie courte,
chargée actuellement par la société de bien d'autres tâches que de rattraper un
retard développemental. Une (trop) grande place est actuellement occupée
pendant cette période de la vie par un souci d'insertion professionnelle. Mais
faire l'économie d'essayer de combler un retard dans le développement serait
néanmoins charger la personne d'un handicap important et bien souvent
destructeur pour sa vie future d'adulte. La présence d'un chien institutionnel
dans un foyer éducatif comme La Pommeraie, pour peu que l'éducateur soit
attentif et un peu formé, contribue à lui offrir des occasions d'interventions
rapides, multiples et diversifiées quand il ne sert pas de médiateur à une
relation momentanément difficile. Les possibilités de vivre ce qui n'a pu l'être
préalablement peut alors s'avérer, selon l'appréciation du chien par
l'adolescente et le caractère de l'animal, plus grandes et plus spontanées que
si un tel chien était absent. Au service de la personne en souffrance pour la
faire grandir, pour mettre des mots sur ce qu'elle peut vivre de problématique
dans l'ici et le maintenant et pour lui permettre de rattraper ses retards de
développement, le chien institutionnel peut être pour l'éducateur un outil
facilitateur de sa tâche quotidienne auprès des jeunes. Forte de mes quatre ans
d'intervention auprès de la population adolescente en difficultés
psycho-sociales et de mes trois ans et demi de travail accompagnée par ma
chienne, je me sens aujourd'hui motivée à poursuivre de façon encore plus
réfléchie mon intervention éducative en étant secondée par un chien
d'institution susceptible de remplir cette tâche.
Hypothèses d'action
Introduire un chien ayant reçu de solides
bases d'éducation canine à La Pommeraie constituerait un occasion supplémentaire
pour les jeunes filles de l'institution de rattraper plus rapidement un retard
dans leurs compétences sociales afin de pouvoir s'insérer dans le monde
socio-professionnel. La mission de notre foyer reste d'insérer
socio-professionnellement les adolescentes qui nous sont confiées. Les
éducateurs constatent souvent un retard ou un déficit de ces compétences,
freinant voire empêchant une bonne insertion socio-professionnelle. En utilisant
le chien comme facilitateur de la relation, la jeune fille bénéficiera d'une
occasion supplémentaire d'apprendre, comme décrit dans la première partie de cet
ouvrage, à verbaliser avec l'éducateur de service des expériences de vie
difficiles ou inattendues pour elle. Ainsi, un apprentissage plus rapide de
leurs compétences pourra peut-être s'accomplir, pour peu que l'éducateur soit
vigilant, la jeune fille prête et intéressée par le chien et ce dernier
suffisamment équilibré et rassuré quant à sa sécurité dans le foyer.
J'envisage dans un premier temps de faire
apprécier le nouveau chien institutionnel par chaque jeune fille. Jusqu'à
présent, je n'ai rencontré aucune adolescente ayant peur de la chienne, ou ne
la supportant pas. Au pire, c'était de l'indifférence. Mais si tel devait être
le cas, un travail sur cette peur pourrait s'amorcer dès que la jeune fille se
trouve face au chien, qui ne devrait en aucun cas constituer une menace. De
plus, une présence affectueuse, quotidienne et joueuse du nouveau chien
d'institution s'avère indispensable pour que des liens puissent se former avec
les adolescentes du foyer. Les bénéfices découlant de cette présence protectrice
nouvelle devraient être une conséquence immédiate de ce lien, chaque éducateur
veillant à établir une relation amicale et de confiance entre la jeune fille et
le chien.
Dans un deuxième temps, la présence du chien
devra permettre à l'adolescente de vivre, comme mentionné dans la première
partie de ce travail, des émotions et des expériences de vie nouvelles et non ou
mal expérimentées jusqu'ici. Avec l'aide des éducateurs, les jeunes filles
apprendront peut-être plus facilement et plus rapidement à mettre des mots
constructifs sur ces nouvelles tranches de vie vécues avec le nouveau compagnon
à quatre pattes du foyer.
De plus, en intégrant les adolescentes dans
l'éducation et la prise en charge du chien, les liens devraient se former
naturellement et les bénéfices éducatifs mentionnés dans la première partie de
ce travail apparaître rapidement.
Objectifs
Loin de charger les éducateurs d'une tâche
supplémentaire si elle peut être partagée, le chien assurera une présence
affective et protectrice continue auprès des adolescentes. Cette continuité
devrait contribuer à permettre aux jeunes filles, chacune à son rythme et selon
ses besoins, de vivre des expériences émotionnelles et éducatives nouvelles sous
l'oeil vigilant de l'éducateur de service. Facilitant comme mentionné ci-dessus
le ressenti émotionnel et libérant la parole, le chien devrait ainsi permettre
une verbalisation plus aisée à ce sujet, offrant aux éducateurs des ponts leur
permettant de rejoindre plus facilement les souffrances ou les questionnements
de la personne prise en charge. Cet objectif peut déjà être atteint à court
terme, c'est-à-dire quelques heures déjà après l'arrivée du nouvel animal.
Un deuxième objectif du chien institutionnel
consistera à permettre d'expérimenter des moments de vie peu présents dans le
quotidien institutionnel habituel (naissance, maladie, mort, prendre soin d'un
autre être vivant dépendant de soi) avec la possibilité d'y mettre des mots
constructifs. Cet objectif sera atteint à plus ou moins long terme en fonction
des circonstances de la vie.
Un troisième et dernier objectif non
négligeable consistera à permettre de vivre une tierce relation offrant à
chacun, jeune fille comme éducateur, des instants de plaisir, voire de bonheur
partagés. Cette possibilité de partage est souvent trop peu présente à mon goût
dans le quotidien éducatif institutionnel; cela devrait permettre à la jeune
fille de vivre parfois des expériences égalitaires avec ses éducateurs,
c'est-à-dire des expériences de vie dans lesquelles chacune des parties partage
des instants privilégiés et positifs à être ensemble. Je pense ici surtout aux
balades avec l'animal. Cet objectif sera atteint à court terme déjà et sera
maintenu tout au long de l'existence du chien dans le foyer.
Si ces objectifs ne pouvaient être atteints
après 8 à 12 mois, ce que je ne peux concevoir après mes expériences avec
Scotie, je pense que le chien devrait être pris en charge plus intensément par
un membre de l'équipe éducative. Ce dernier devrait continuer à l'emmener avec
lui au travail et je pense qu'à court terme, le chien retrouverait sa place de
chien institutionnel au sein de La Pommeraie.
Moyens
Il convient en préambule que chacun des
membres de l'équipe éducative soit d'accord avec ce projet et qu'une majorité
(je pense quatre éducateurs au moins sur six) s'en sente investi pour que ce
projet soit réalisable de façon convenable. Si tel est le cas, il faudra choisir
ensemble une race de chien qui soit à même d'apprendre à interagir dans un
groupe d'adolescentes en difficultés. Le chien doit être acquis à son quatrième
mois de vie, afin de pouvoir le former de manière adéquate et l'habituer dès son
plus jeune âge à son nouveau lieu de vie. Petite ou grande race sera une
question à débattre en équipe. L'équipe devra également suivre ensemble ou
individuellement une sensibilisation au dressage canin, afin de se faire obéir
du chien, de comprendre et de prévoir ses réactions dans les différentes
circonstances qui peuvent se rencontrer. Dans ce sens et pour également
sensibiliser, dans une démarche éducative, les filles aux comportements propres
du chien, j'envisage dans un premier temps une collaboration avec la SPA, puis
dans un second temps une spécialisation d'un ou deux membres de l'équipe pour un
dressage plus spécifique avec transmission aux autres membres de l'équipe. Mais
je reviendrai sur ce sujet, ci-après, dans l'analyse de l'organisation.
Une fois le chien présent dans l'institution
et pour que les objectifs décrits ci-dessus soient rapidement atteignables, je
pense que la relation à l'animal ne doit pas être imposée à la jeune fille:
l'éducateur attendra qu'elle se fasse spontanément. D'expérience avec Scotie, je
pense que cela ne posera pas de problème.
Pour ce faire, ce sera cependant à
l'éducateur de service de veiller à la sécurité et d'utiliser à des fins
éducatives quand il le juge opportun les relations qu'il peut observer entre le
chien et une ou plusieurs jeunes filles. Les soins et l'alimentation du chien
seront également de la responsabilité de l'éducateur, qui veillera à les
partager avec les adolescentes. La balade journalière, le soir après le souper,
sera effectuée par l'éducateur de service accompagné d'une ou de plusieurs
jeunes filles.
Pour le confort du chien et peut-être un
soulagement de l'équipe lors de périodes plus difficiles pouvant exister parfois
dans la vie d'un foyer, je pense qu'il convient de prévoir deux personnes
ressources dans l'équipe prêtes à prendre le chien chez elle(s) au moins un jour
et demi complet par semaine pour lui assurer un repos hors institution ainsi
qu'un suivi sur la première année, surtout pour un dressage plus intensif. Le
chien ayant une durée de vie moyenne de quinze ans, les éducateurs restant d'une
manière générale moins longtemps dans un même lieu de travail, je pense qu'il
est important pour l'équilibre du chien, animal de meute ayant besoin d'avoir
un, voire deux maîtres clairement identifiables (en tous les cas durant ses
jeunes années), que la direction (censée rester en fonction plus longtemps que
les éducateurs, selon le bon sens) et la personne responsable de ce projet
puisse s'investir un peu plus.
Quant au financement de ce projet, je pense
qu'il convient de planifier une dépense d'environ 1800 francs pour l'acquisition
d'un chien sans trouble du comportement, sain et capable d'apprendre à se
comporter de manière adéquate, environ 100 francs pour le collier, la laisse et
quelques jouets ainsi qu'une cinquantaine de francs pour l'acquisition d'une
médaille. Ce montant approximatif, variant entre 1500 et 2000 francs, représente
une dépense unique à prévoir au budget de l'institution.
Les autres dépenses, annuelles et à prévoir
également au budget, sont celles occasionnées par l'impôt sur le chien (env. 150
francs), les frais vétérinaires de routine (env. 100 francs représentant les
rappels de vaccins ainsi que le rappel chaque deux ans du vaccin contre la
rage), les frais de croquettes (env. 200 francs) et des frais divers de santé
(ex. protections contre les tiques, éventuellement frais de toilettage) pour un
montant de 100 francs, ce qui représente une dépense annuelle approximative de
550 francs.
Une autre dépense, unique également mais plus
difficile à définir avec exactitude en raison des investissements possibles des
humains et de la capacité d'apprentissage du chien, à prévoir dans un budget à
part et à long terme serait celui inhérent aux cours de dressage du chien (cf.
ci-dessous). Je n'ai pas de chiffre exact à mentionner à ce stade, mais je pense
qu'un montant de 500 francs permettrait déjà de prendre quelques leçons (pour
les membres de la SPA, dont je fais partie, le cours d'une heure revient à 10
francs).
Une dépense de dix heures éducatives sera
également à envisager, afin que les éducateurs puissent, à tour de rôle, se
rendre sur leur temps de service, à deux cours de dressage, accompagnés d'une ou
deux jeunes filles, comme mentionné ci-dessous.
Organisation
Dès l'acceptation de ce projet par l'équipe
éducative, il convient de s'entendre sur la race du chien que l'on souhaite
acquérir, en tenant compte de sa taille et de son "éducabilité" en demandant
notamment l'avis de spécialiste(s). Je pense ici demander l'avis du vétérinaire
avec lequel l'institution a l'habitude de collaborer pour soigner ses deux
chats, ainsi que l'avis d'un dresseur professionnel qui pour l'instant m'est
inconnu, mais qui pourrait appartenir à l'association valaisanne Le Copain
mentionné ci-dessus. Les jeunes filles seront informées sur le résultat de ces
consultations et leur avis sera entendu, mais la décision finale du choix de la
race reviendra à l'équipe éducative. La raison principale est que les jeunes
filles restent en moyenne 2 ans dans notre institution, l'équipe éducative (dans
laquelle est comprise la direction, qui effectue concrètement aussi des heures
éducatives) est censée rester plus longtemps et elle, comme mentionné ci-dessus,
sera principalement responsable du chien, qui, quant à lui, est censé vivre une
quinzaine d'année.
Une fois ce choix arrêté, il conviendra de
fixer deux ou trois séances d'information à La Pommeraie avec le groupe des
jeunes filles sur le comportement du chien et les réactions à avoir ou pas face
à lui dans le quotidien. Une séance sera consacrée à l'accueil du nouveau chiot
à la maison et aux gestes qu'il convient de faire pour que le chiot apprenne à
devenir rapidement propre (faire ses besoins à l'extérieur) et progressivement
autonome (capable d'attendre (la balade, les croquettes), de comprendre les
ordres et de réagir en adéquation avec eux). Je pense demander à la SPA de
pouvoir venir donner ces séances informatives à La Pommeraie.
Le groupe réclamant actuellement la présence
quotidienne d'un chien au foyer, je ne prévois aucune difficulté particulière
quant à la présence des adolescentes à ces séances. Quant aux éducateurs, seront
présents ceux qui sont en service. Les autres seront les bienvenus et leur
présence souhaitée, mais, dans un souci d'économie, leurs heures ne seront pas
comptabilisées.
Une fois tout le monde sensibilisé, nous
pourrons démarrer la phase de recherche et d'acquisition du chiot. Le choix d'un
nom pour le nouvel animal sera alors à chercher ensemble. Lorsque le moment
sera venu, je pense qu'il sera important, si possible, d'emmener une ou deux
filles avec nous pour aller chercher le nouveau chiot. Le foyer aura au
préalable fait l'acquisition d'un panier pour l'intérieur, des gamelles et des
croquettes. Il se sera aussi prononcé sur le lieu, intérieur ou extérieur, ainsi
que l'endroit exact, où le chien passera la nuit. Ce choix dépendra de la taille
du chien, mais la décision finale sera prise au colloque des éducateurs. Sera
alors envisagé l'acquisition d'une niche extérieure semblable à celle laissée
dans le jardin par la directrice et destinée à son précédant chien.
Une fois l'animal arrivé à La Pommeraie, il
sera important de démarrer au plus vite une classe de dressage à la SPA pour
apprendre au chiot l'obéissance, la propreté ainsi que les interactions avec les
humains et également les autres animaux. La participation à ces classes doit
être un moment éducatif privilégié intégrant les jeunes filles. C'est pourquoi
je pense que, s'il est important que chaque éducateur puisse y participer avec
la personne responsable du projet ou la direction de l'institution en alternance
et selon les disponibilités de chacun, deux filles au maximum doivent y être
intégrées à chaque fois. Je suis persuadée que ce n'est qu'ainsi qu'une logique
pourra se dégager dans le dressage et que le chien pourra se développer de façon
adéquate en répondant au mieux aux attentes exprimées ci-dessus. Ces cours
seront à planifier à la quinzaine pour un coût de 100 francs. Il en coûtera à
l'institution dix heures éducatives à raison de deux heures par éducateurs sauf
le responsable du projet et la direction, qui offriront trois heures chacun de
leur temps non professionnel. Une fois les bases du dressage acquises, le chien
sera propre, répondra au rappel, aura appris à se déplacer à la laisse et
répondra aux ordres de base que sont le "non", "assis", "couché", "plus bouger"
et "viens". Les humains auront ainsi appris à interagir avec leur nouveau
compagnon et à vivre en harmonie avec lui. Les cours pourront s'interrompre et
la vie quotidienne continuer avec le nouvel animal de l'institution.
Cependant et comme mentionné ci-dessus dans
la partie consacrée à l'étude des moyens, si le chien peut obéir à tous les
humains partageant sa vie quotidienne, les éthologues et autres spécialistes du
chien ont insisté à plusieurs reprises sur l'importance pour cet animal d'avoir
néanmoins une ou deux personnes au maximum de référence, communément appelés
maîtres. C'est pourquoi je propose que la personne porteuse de ce projet
accompagnée par la direction, censée rester dans la maison plus longtemps qu'un
éducateur, puissent jouer ce rôle auprès du chien, en étant présentes plus
souvent aux cours de la SPA et en le prenant au moins un jour et demi par
semaine chez elles afin de développer un lien privilégié avec cet animal qui le
ou les reconnaîtra plus spécifiquement comme maîtres. Ce seront elles qui par la
suite continueront un dressage plus spécifique du chien d'institution et qui
seront responsables d'en transmettre l'essentiel aux collègues de l'équipe
éducative.
Evaluation des
objectifs
L'évaluation de ce projet doit se faire en
deux temps distincts.
Tout d'abord, une évaluation continue
permettant de mesurer l'avancée du projet et le rapprochement ou l'éloignement
des objectifs mentionnés ci-dessus. Pour ce faire, il convient de tenir un
carnet de bord dans lequel seront consignées les informations mentionnant avec
précision chaque étape du projet décrit ci-dessus dans la partie Organisation.
La personne responsable du projet et la direction participeront en alternance et
selon leur disponibilité aux séances d'information de la SPA avec le groupe de
jeunes filles ainsi qu'aux classes de dressage. Elles tiendront en quelque sorte
le fil conducteur de ce projet. Elles noteront lors de chacune des classes le
nom des participants ainsi que les principales nouvelles connaissances que le
dresseur a dispensé aux participants, ceci pour pouvoir le transmettre à ses
collègues lors du prochain colloque. Les personnes de service auront alors
charge de le transmettre au groupe; si tel n'a pas pu être fait, la personne
responsable du projet le transmettra à son prochain service. Ce journal de bord
servira également à noter les questions ou difficultés pouvant surgir lors de la
vie quotidienne avec l'animal pour les traiter à la prochaine heure de dressage.
Cette évaluation continue permettra au projet de se mettre en place.
Puis des évaluations plus ponctuelles seront
alors à définir, je pense à la quinzaine. Elles seront faites en deux temps:
Tout d'abord en colloque par l'équipe
éducative, chacune de ces évaluations se basera sur les observations des
éducateurs et sera consignée également dans le carnet de bord. Elle répondra
succinctement aux quatre questions suivantes :
1. Le chien se développe t-il de façon
équilibrée? (absence d'agressivité, de menace voire de morsure; chien joyeux,
serein, confiant envers les humains et les autres animaux).
2. Son bien-être est-il assuré? (nourriture
et balade adéquates; lien privilégié à un, voire deux éducateurs, assuré)
3.Quels bénéfices pour les jeunes filles
avez-vous remarqué quant à la présence du chien?
Le chien a t-il permis ou facilité un échange
éducatif avec une jeune fille? Si oui, l'expliquer brièvement. (deuxième
objectif).
4. L'animal a t-il gêné d'une quelconque
manière votre travail éducatif? Si oui, l'expliquer brièvement. (premier
objectif).
5. Les adolescentes vous ont-elles aidé dans
la prise en charge du chien? (nourriture, balade, soin).
Si oui, qui? à faire quoi? (premier
objectif).
6. Avez-vous pu partager des moments de
plaisir ou de bonheur avec les jeunes filles autour du chien? Si oui, lesquels?
(brève description). (troisième objectif).
Ces évaluations ponctuelles seront complétées
par la personne responsable du projet en posant les questions suivantes aux
jeunes filles de La Pommeraie, par écrit de préférence :
1. Sur une échelle d'1 à 6 (1 signifiant "je
l'aime pas" et 6 "je l'aime énormément"), comment dirais-tu que tu aimes le
nouveau chien de La Pommeraie?
2. Quel(s) bon(s) moment(s) as-tu vécu avec
lui?
3. Quel(s) moment(s) moins agréable(s) as-tu
vécu avec lui?
4. As-tu déjà participé à la balade du soir?
Comment l'apprécies-tu sur une échelle d'1 à
six?
5. Penses-tu que le chien se sente bien à La
Pommeraie? En sécurité?
Ces évaluations ponctuelles, qui pourront
s'espacer jusqu'à une tous les deux ou trois moins une fois la première année
écoulée, serviront à mesurer le rapprochement ou l'éloignement des objectifs
décrits ci-dessus afin d'adapter le projet au besoin, comme explicité ci-dessus
dans les parties Objectifs et Moyens.
S'il devait être constaté que le chien ne
peut se développer de manière adéquate dans le foyer, car ne s'y sentant pas en
sécurité, une possibilité d'adoption à plus ou moins long terme par la direction
ou la personne responsable du projet doit être prévu, comme mentionné ci-dessus.
Troisième partie
Conclusions
Comme explicité et illustré dans la première
partie de ce travail, Scotie m'a permis de vivre des relations éducatives riches
et peut-être même, pour certaines, qui n'auraient pas existé sans son
intermédiaire. Je pense ici surtout à ma première observation avec Aline. En
effet, peut-être que sans la chienne, Aline serait restée murée dans sa
tristesse plus longtemps. Peut-être également qu'Esther n'aurait pas eu
l'occasion d'entrer en discussion avec Julia. Rien en l'état ne nous permet non
plus d'affirmer le contraire. Ce travail ne se veut pas une recherche
scientifique, le nombre des observations et sa durée ne le permettent évidemment
pas. Il s'agit surtout d'un constat, celui de l'existence d'un lien affectif
entre des jeunes filles en difficulté psycho-sociales et un animal débouchant
sur des échanges significatifs intéressants. Néanmoins, il est vrai que toutes
mes observations ont un caractère positif, ceci pour la simple raison que je
n'ai pas eu l'occasion d'en observer de négatives. Je fais ici l'hypothèse qu'il
en a été ainsi parce que Scotie a pu développer un attachement suffisamment
sécurisant avec moi, sa maîtresse, pour qu'il ose maintenant, à quatre ans,
aller avec confiance vers les autres. Les expériences de vie majoritairement
positives qu'elle a ensuite faites en quatre ans d'existence ainsi qu'un
dressage adéquat durant sa première année peuvent également expliquer son
bien-être actuel ainsi que son bon comportement et justifier son acceptation par
le groupe des adolescentes du foyer. Tout resterait à construire dans ce sens
avec le nouveau chien d'institution, avec des risques augmentés de vivre des
expériences difficiles favorisant un comportement ultérieur inadéquat. Ces
difficultés d'apprentissage du chien peuvent s'amincir si les règles sont
clairement définies dès le départ, comme mentionné dans la deuxième partie de ce
travail. En effet, son comportement étant directement dépendant de son
environnement, le chien a besoin d'une part d'identifier clairement un ou deux
maîtres et d'autre part de revevoir des ordres clairs et affirmés de manière
identique par tous les humains vivants en sa présence. Difficulté supplémentaire
pour une institution, mais pas insurmontable néanmoins.
Scotie m'a permis d'intervenir plus aisément
sur certaines souffrances cachées des jeunes filles de La Pommeraie. Je pense
ici à l'observation faite avec Rose, qui a donné lieu par la suite à de
multiples discussions sur la manière de s'occuper d'un autre être vivant, sur
l'affection qu'elle n'a pas reçue quand elle était enfant et sur ce qu'elle
pourrait donner à ses enfants. Ou encore l'observation réalisée avec Joëlle et
sa peur de la nuit; le rituel mis en place avec Scotie qui l'accompagne à la
nuit tombée vers la maison du bas et la reddition de la laisse le matin au
déjeuner m'a donné l'occasion de parler très fréquemment, mais à petite dose, le
temps d'avaler une tasse de café ou un verre de jus de fruit, de cette peur et
de son enfance. Je ne veux pas prétendre ici que ces interactions n'auraient
jamais eu lieu sans la présence de la chienne, mais je constate qu'elle m'a
facilité l'accès à ces échanges et offert de multiples occasions d'y revenir.
Peut-être s'agit-il, comme l'ont prétendu les
critiques de Boris Levinson, d'un état d'esprit de l'intervenant, qui serait
plus détendu et plus sécurisé en présence de son chien. Psychanalyste et père de
la "psychothérapie assistée par les animaux", Boris Levinson utilisait son chien
Jingle comme "co-thérapeute" dans la prise en charge d'enfants souffrant de
troubles sévères du comportement et remarquait que l'animal pouvait offrir à
certains enfants une présence amicale les mettant suffisamment en confiance pour
accepter de parler. Son point faible a été de ne pas collecter ses observations
de manière rigoureuse comme le préconise le monde scientifique, et de se
contredire sur le fait que cette thérapie pouvait ne pas marcher avec tous les
enfants. Ses détracteurs en ont profité pour se faufiler dans cette
contradiction et prétendre que finalement l'animal ne servait que le thérapeute,
qui, en sa présence, se montrait plus attentif à l'enfant et à sa communication
non-verbale. Je n'en suis pas sûre, mais je suis prête à en accepter la critique
si, avec l'aide du chien d'institution, la qualité de mon intervention éducative
s'avère plus constructive et plus appropriée aux demandes et aux soins exigés
par une population adolescente de plus en plus carencée sur le plan affectif.
La réalisation de ce travail m'a permis de
m'arrêter sur des observations concrètes et de m'interroger sur ce qu'auparavant
je ne perçevais qu'au niveau d'un ressenti inexprimé ou partiellement verbalisé.
En me penchant sur l'élaboration concrète du projet d'introduction d'un chien
d'institution à La Pommeraie, j'ai pu me rendre compte des difficultés pouvant
survenir si un tel projet n'était pas suffisamment et correctement réfléchi. Se
posent en effet les questions de l'investissement, tant que pour l'équipe
éducative que pour le budget de l'institution, avec comme question centrale la
suivante: peut-on obtenir la même chose avec moins d'investissement? La question
est de taille, et je pense qu'il revient à l'équipe éducative dans son ensemble
d'en donner une réponse claire et précise, seule porte d'entrée convenable dans
la mise en marche de ce projet ou alors dans son abandon. Pour ma part, je pense
que le jeu en vaut la chandelle. Reste en effet présente pour moi l'idée,
renforcée par la réalisation de ce travail de fin d'études, que l'intervention
éducative auprès de personnes en difficultés ou en voie de désaffilitation
sociale peut trouver une aide secourable avec l'utilisation d'un chien formé à
cette fin et appartenant à l'institution, avec les réserves exprimées ci-dessus.
Je souhaite encore, en guise d'interrogation
finale, me demander si l'instrumentalisation qui est faite du chien par ce
projet participe à son bien-être et à son bonheur. En effet, le chien est
utilisé ici pour obtenir quelque chose de bien défini dans la vie quotidienne
des humains, comme tel est le cas avec l'utilisation du chien de police, du
chien d'avalanche ou encore du chien pour les mal-voyants. Mais ceci est le
thème d'un autre travail d'investigation, c'est pourquoi je n'entrerai pas plus
loin dans le débat, si ce n'est pour affirmer ma conviction que cet animal
d'institution recevrait beaucoup d'amour et d'attention.
Bibliographie
Ouvrages
:
Psychologie des émotions et des sentiments,
Jacques Cosnier, Paris : Retz, 1994.
La plus belle histoire des animaux,
Boris Cyrulnik, Jean-Pierre Digard, Pascal Picq et Karine-Lou Matignon, Paris :
Seuil, 2000.
Les animaux dans la vie des enfants,
Gail Melson, Paris : éditions Payot & Rivages, 2002.
L'enfant et l'animal. Les émotions qui
libèrent l'intelligence, Hubert
Montagner, Paris : Odile Jacob, septembre 2002.
Le chien. Un loup civilisé,
Evelyne Teroni & Jennifer Cattet, mai 2000
Revues
:
Le journal des psychologues,
mensuel No 165, mars 1999, p. 21 à , Dossier L'animal, un thérapeute pas si
bête.
Sciences Humaines,
mensuel No 119, août-septembre 2001, p.44 à 47, Entretien avec Antonio Damasio:
Les émotions, source de la conscience.
Sciences Humaines,
mensuel No 108, août-septembre 2000, p.21 à 45 Dossier Homme/animal, Des
frontières incertaines.
Sciences Humaines,
mensuel Hors-Série No 30, septembre 2000, p.52-53, La naissance de l'éthologie:
de l'animal à l'homme.
Sciences Humaines,
mensuel No 104, avril 2000, p. 16 à 20, Faut-il parler de ses émotions?
Sciences Humaines,
mensuel No 98, juillet 1999, p. 34 à 37, Entretien avec Paul Ekman : Le langage
naturel des émotions.
Sciences Humaines,
mensuel No 87, octobre 1998, p.32 à 35, Les animaux pensent-ils?
Sciences Humaines,
mensuel No 68, janvier 1997, p. 16 à 29, Dossier Les émotions de A à Z
Articles
Les enfants violentés et leurs animaux,
M. Robin, M.S.W., M.P.H., R.W. ten Bensel, M.D., M.P.H. J. Quigley, D.V.M., &
R.K. Anderson, D.V.M., M.P.H., Minneapolis, texte traduit et distribué par la
Société de Zoothérapie de Drummondville, Québec.
Le lien humain/animal chez les enfants souffrant d'un déficit
d'attention, I.L. Gislason, M.D.,
J. Swanson, Ph.D., E.S. Martinez, B.A., S. Szkupinski Quiroga et R.W., Castillo,
Department of Psychiatry, University of California, texte traduit et distribué
par la Société de Zoothérapie de Drummondville, Québec.
Programme de séjour à la ferme et son effet sur les enfants avec un
handicap caractériel, Samuel B.
Ross Jr., Ph.D., Martin G. Vigdor, Ph.D., Mary Kohnstamm, M.S.W. Michael DiPaoli,
S-A., Barbara Manley, B.A. and Lisa Ross, B.A., Green Chimneys Children's
Services, New York, texte traduit et distribué par la Société de Zoothérapie de
Drumondville, Québec.
Aider les enfants souffrant de déficit d'attention hyperactif et de
handicap caractériel par la thérapie assistée par l'animal et l'éducation,
Aaron Datcher, M.D., Gregory G. Wilkins, Ph.D., texte traduit et distribué par
la Société de Zoothérapie de Drumondville, Québec.
Annexes
Matériel ayant nourri ma réflexion sur
le chien d'institution :
Qu'est-ce que l'A.N.E.C.A.H.?,
site internet:
www.ac-amiens.fr/college02/wajsfelner_cuffies/anecah.htm
Le Copain,
site internet:
www.lecopain.ch/fr/portrf.htm
Enquête réalisée par la Fondation 30 Millions
d'Amis et envoyée par la fondation par courrier électronique relative à
l'insertion des animaux de compagnie dans les maisons de retraite et les
hôpitaux en France.
Document contenant les articles mentionnés
dans la bibliographie, traduit et distribué par la Société de Zoothérapie de
Drummondville, Québec.
ANNEXES au travail Le chien
d'institution : Contribution de l'animal dans la prise en charge éducative en
institution
présenté par Fabienne Zufferey en vue de l'obtention du diplôme de travail
social d'éducatrice spécialisée ESTS
Table des matières
Introduction
P. 4
Première partie : Observation
P. 6
Chapitre premier : L'animal dans l'existence humaine P.
6
Chapitre II : Première hypothèse : Les quatre fonctions
principales du chien de compagnie
P. 8
Chapitre III : Deuxième hypothèse : Le chien comme objet de
décentration ou comme "moi en miroir"
P. 13
Chapitre IV :Troisème hypothèse : L'animal comme occasion de rencontre avec les
drames fondamentaux de la vie
P.16
Chapitre V : Quatrième hypothèse : L'animal comme moyen de
réassurance
P. 18
Deuxième partie : Opérationnalité de ce travail : L'introduction d'un chien
d'institution à La Pommeraie
P. 21
Introduction
P. 21
Problématique
P. 22
Hypothèses de compréhension
P. 22
Hypothèses d'action
P. 23
Objectifs
P. 23
Moyens
P. 24
Organisation
P. 26
Evaluation des objectifs
P. 27
Troisième partie : Conclusion
P. 29
Bibliographie
P.31
Annexes
P. 33
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