Entre 1300 et 1400 personnes décèdent chaque année dans notre pays suite à un suicide (env. 1000 hommes et 400 femmes), ce qui représente quatre décès dus au suicide chaque jour, soit un taux de suicide de 19,1 pour 100 000 habitants. Ces chiffres placent la Suisse parmi les pays présentant un taux de suicide supérieur à la moyenne, derrière la Russie, la Hongrie, la Slovénie, la Finlande et la Croatie, et correspondent à ceux relevés en Autriche, en Belgique et en France. Avec la diminution des décès dus aux accidents de la route et de ceux liés au sida, le suicide est devenu la première cause de mortalité chez les hommes âgés de 15 à 44 ans. Comme le risque de suicide augmente avec l’âge et compte tenu du vieillissement démographique de la population, il faut s’attendre à une augmentation du nombre de suicides chez les personnes âgées au cours des prochaines décennies.
On estime que 15 000 à 25 000 personnes font une tentative de suicide chaque année, dont 10 000 seulement (env. 4000 hommes et 6000 femmes) sont recensées et traitées sur le plan médical.
Les facteurs qui exposent les individus à un risque plus élevé de tentative de suicide ou de suicide sont complexes et concomitants. Les suicides et tentatives de suicide sont rarement des actes décidés après mûre réflexion (« suicides de bilan »). Non seulement des facteurs démographiques tels que l’âge et le sexe, mais aussi des facteurs psychiques, biologiques, sociaux et environnementaux et autres liés à l’histoire personnelle d’un individu influent sur le risque de passer à l’acte. Ni le suicide ni les tentatives de suicide ne constituent une maladie ; ils n’en sont pas nécessairement le reflet non plus. Toutefois, ils sont souvent induits par des maladies psychiques, surtout par les dépressions, les psychoses et les dépendances.
On ne dispose guère de connaissances scientifiques permettant d’expliquer pourquoi la Suisse enregistre un taux de suicide relativement élevé par rapport à ses voisins ; il n’existe pas d’explication unanimement admise sur ce phénomène.
Mesures possibles pour prévenir les suicides
Parmi les mesures de prévention du suicide, on fait la distinction entre celles relevant de la santé publique, qui s’adressent à l’ensemble de la population, et celles du domaine des soins, adaptées à des groupes à risque spécifiques.
Les mesures de santé publique tentent d’influencer les conditions de vie et l’environnement de la population générale, de certains groupes et d’individus. Elles visent, d’une part, la promotion de la santé en améliorant l’aptitude individuelle à gérer les problèmes et la détection précoce dans le domaine de la prévention du suicide, et, d’autre part, à sensibiliser la population aux maladies psychiques, à créer et à promouvoir des structures à bas seuil, à rendre plus difficile l’accès aux moyens et méthodes permettant de mettre fin à ses jours, ainsi qu’à établir un code de conduite sur le traitement du suicide par les médias.
Les mesures de soins - c’est-à-dire les soins médicaux dans le domaine de la prévention du suicide - comprennent l’amélioration du traitement, de l’accompagnement et de la réinsertion des patients psychiatriques, des personnes qui ont fait une tentative de suicide, sont en situation de crise et/ou ont des pensées suicidaires.
Prévention du suicide dans le monde
Tant l’Organisation mondiale de la santé que les Nations Unies encouragent les programmes nationaux de prévention du suicide, car ces organisations estiment que ressort médical. Seules la coopération et la coordination d’un grand nombre d’acteurs permettent la mise en place d’un programme national de prévention par les gouvernements. Plusieurs pays, comme l’Australie, la Finlande, la Grande-Bretagne, le Canada ou la Suède, se sont déjà dotés d’un tel programme.
Stratégies de prévention du suicide en Suisse
La Suisse ne dispose pas encore d’un programme national de prévention du suicide. Il ressort de l’état des lieux effectué par l’association « Initiative pour la prévention du suicide en Suisse » (IPSILON) que l’éventail des mesures visant à prévenir les suicides proposé en Suisse est restreint et ne concerne qu’un petit nombre de centres régionaux (principalement situés en Suisse romande). Elles sont destinées en premier lieu aux adolescents et aux jeunes adultes, sont centrées avant tout sur le traitement (intervention de crise) avant et/ou après une tentative de suicide et relèvent essentiellement de l’initiative privée. Dans le domaine de la prévention du suicide, les offres destinées aux personnes âgées sont insuffisantes. Par ailleurs, il faudrait améliorer la coopération et la coordination dans le cadre des projets de prévention existants.
Il est nécessaire d’agir dans les domaines suivants : monitorage et recherche, évaluation et transfert des connaissances, coordination et assurance de la qualité, contacts avec le public, lancement de projets concrets pour la prévention du suicide.
Bilan du point de vue de la Confédération
Etant donné que les suicides et tentatives de suicide ne peuvent être englobés dans la notion de maladie au sens de l’art. 118, al. 2, let. b Cst., les possibilités pour la Confédération d’agir dans le domaine de la prévention du suicide sont très limitées. En effet, c’est principalement aux cantons qu’incombe la prévention du suicide, partie intégrante du domaine des soins de santé et de la promotion de la santé.
Suicide et tentatives de suicide ne sont pas des problèmes limités au seul individu, mais un thème relevant de la santé publique, et leur prévention représente un enjeu pour la société toute entière. Le Département fédéral de l’intérieur (DFI), et notamment l’Office fédéral de la santé publique (OFSP), sont donc chargés par le Conseil fédéral d’examiner et de mettre sur pied, en coordination avec les services fédéraux concernés, les cantons et les institutions privées oeuvrant dans le domaine de la prévention du suicide, la réalisation des mesures suivantes :
intégrer la thématique du suicide et des tentatives de suicide dans le rapport sur la santé établi par la Confédération et les cantons ;
compléter les instruments de monitorage actuels dans le domaine de la santé (p. ex. enquête suisse sur la santé, monitorage de la santé de la population migrante) par des questions ayant trait aux tentatives de suicide et pensées suicidaires ;
intégrer la thématique du suicide et des tentatives de suicide dans les programmes de promotion de la santé et de prévention des dépendances de la Confédération existant dans les domaines de l’école et de la formation (p. ex. éducation + santé Réseau suisse, supra-f) et dans les projets prévus dans le domaine « vieillissement et santé » ;
intégrer la thématique du suicide et des tentatives de suicide dans la formation de base, postgrade et continue des professions médicales (projet de LPMéd)
poser les jalons pour l’élaboration de mesures d’assurance de la qualité dans le domaine intervention de crise (diagnostic et thérapie des maladies psychiques) ;
élaborer un projet de programme national de recherche (PNR) sur le thème de la santé psychique et du risque suicidaire.
Parallèlement, il conviendra d’institutionnaliser de manière appropriée la collaboration et les échanges entre la Confédération - les cantons - et IPSILON. En outre, il s’agira, dans le cadre des autres études préliminaires du DFI (OFSP) relatives à une modification de la législation en matière de prévention, d’examiner la possibilité et la nécessité d’introduire, dans la législation fédérale, une base légale pour la prévention des troubles psychiques.
http://www.educh.ch/files/files/Rapport_suicide_2005_OFSP.pdf
http://www.educh.ch/files/files/Rapport_suicide_2005_OFSP.pdf