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I. Présentation de La Bérallaz ..Retour au sommaire
1.1 HISTORIQUE
Le home denfants de La Bérallaz se trouve près des bois du Jorat, entre la commune de Cugy et le hameau de Montheron. La Bérallaz tient son nom du lieu-dit.
Ce bâtiment fait office de home denfants depuis plus de 70 ans. En 1925, la Ligue Vaudoise contre la Tuberculose, propriétaire de cette maison, louvre afin daccueillir des enfants dont les parents souffrent de tuberculose.
En 1964, La Bérallaz change de population et devient un home accueillant des enfants ayant des difficultés familiales. Le 1er janvier 1981, M. et Mme Viguet en reprennent la direction.
Il règne aux abords et à lintérieur de cette grande maison rose une atmosphère familiale, chaleureuse et agréable qui donne envie den connaître les habitants et de partager un peu de leur vie; cest en tout cas la forte impression que jy ai ressenti lorsque je my présentai.
1.2 TYPE, FINANCEMENT ET BUTS DE LINSTITUTION
Le home denfants de La Bérallaz est une association privée. Elle est gérée par un comité, lui-même sappuie sur des statuts. Linstitution est totalement subventionnée par le Canton de Vaud et la Confédération.
Selon les statuts, lAssociation a pour but :
- léducation de ces enfants dans une atmosphère sécurisante et leur préparation à une vie sociale et professionnelle normale.
Le retour de lenfant dans son milieu familial est un but fondamental lorsquil est réalisable. Lorsquil sagit de très jeunes enfants pour lesquels cela ne sera malheureusement pas possible, une famille daccueil est recherchée. Plusieurs enfants dans une situation intermédiaire bénéficient pour les week-ends et les vacances de familles daccueil afin de pouvoir appréhender la vie en famille, hors de linstitution.
1.3 PROCEDURE DADMISSION
Les demandes émanent en général des assistants sociaux mandatés par le SPJ après une intervention juridique ou un constat de mauvais traitement physique ou psychologique. Quelques fois les demandes proviennent des parents directement. Certaines fois, lenfant est déjà placé dans un foyer daccueil court terme (ex.: foyer de Meillerie) en attente dune institution pouvant le recevoir à moyen ou long terme.
Les critères dadmission pour La Bérallaz sont les suivants :
- pouvoir suivre une scolarité normale car La Bérallaz ne dispose pas de classes internes,
- être en âge scolaire, entre 4 et 12 ans (exceptions de moins de 4 ans en cas de fratrie),
- être placé pour au moins 2 ans (durée considérée comme le minimum pour une prise en charge éducative).
Voici en quelques points le déroulement dune procédure dadmission :
1. Demande de placement du SPJ par lintermédiaire dun assistant social.
2. La direction entre en matière en fonction des places disponibles et des enfants se trouvant déjà à La Bérallaz, ceci afin de respecter un équilibre entre les garçons et les filles et entre les âges.
3. Première rencontre avec lassistant social pour une présentation de lenfant, son génogramme, une anamnèse.
4. La situation est présentée au colloque par la direction, ensuite un référent est nommé afin de pouvoir accueillir lenfant lors de ces visites.
5. Deuxième rencontre avec lassistant social et les parents. Au cours de cet entretien, la direction tente de connaître un peu lhistoire des parents, fait un génogramme avec eux et demande les raisons du placement ainsi que ce quils en attendent. Ensuite la direction explique le fonctionnement de La Bérallaz.
6. Lenfant vient passer plusieurs après-midi à La Bérallaz afin de partager un moment avec les autres enfants et se familiariser avec la maison. Lentrée de lenfant ayant lieu en principe au début de lannée scolaire, lenfant commence souvent par faire le camp dété avec La Bérallaz qui finit lannée scolaire précédente (les deux premières semaines des vacances scolaires).
7. Le colloque décide de façon définitive les références (un homme et une femme).
8. Arrivée de lenfant accompagné soit par ses parents, soit par lassistant social ou un éducateur suivant les situations.
1.4 LES ENFANTS ACCUEILLIS
Les enfants accueillis à La Bérallaz viennent dhorizons bien différents, cependant un élément les lie, cest le fait davoir dû être retirés de leur environnement familial.
Pour certains, il est nécessaire quils soient séparés de leur famille, laquelle est perturbée soit par des problèmes de dépendance à lalcool, à la toxicomanie; soit vivant des situations de violence physique ou psychique, des situations de crise de couple ou des problèmes psychiatriques.
Certains enfants sont placés aussi pour des troubles du comportement ayant besoin dun encadrement éducatif. Il existe souvent une souffrance dordre affective chez la plupart des enfants.
1.5 LES DIVERSES COLLABORATIONS
a) Avec les parents
Un des éléments très important pour tendre à un retour de lenfant dans son milieu familial est une collaboration entre La Bérallaz et la famille de lenfant. Chaque enfant a une histoire différente et cest pourquoi chaque situation est traitée de façon particulière. En général, La Bérallaz essaie toujours de rencontrer de façon régulière les parents, car sans eux, nous ne pouvons rien faire évoluer. Cest un travail qui doit se faire ensemble et qui a comme but le bien de lenfant. Ces réunions se déroulent généralement sous la forme dentretiens à La Bérallaz. Elles sont régulièrement agendées entre les parents ou les représentants légaux, le couple directeur, le premier référent de lenfant et, si besoin, avec lenfant et/ou lassistant social. Dune manière générale, ces moments servent à :
- sinformer mutuellement de lévolution de lenfant;
- permettre à chacun de sexprimer sur comment il voit la situation;
- suivre lévolution familiale; créer et/ou maintenir une relation entre famille, enfants, assistant sociaux et institution pour construire ensemble un projet;
- mettre sur pied des objectifs communs concernant lenfant, la famille et La Bérallaz.
b) Avec les services sociaux
En ce qui concerne les services sociaux, les personnes avec lesquelles nous avons le plus de contact sont les assistants sociaux soccupant du placement des enfants. En outre, La Bérallaz a des contacts, et cela dépend de chaque enfant, avec les infirmières scolaires, dautres institutions, le SUPEA, etc.
c) Avec lextérieur
Les loisirs tels que gymnastique, football, basket, musique, chant, etc. produisent pour La Bérallaz des contacts avec lextérieur et les différentes sociétés environnantes. Les petits camarades décole des enfants sont également source de contacts, dinvitations. Les enseignant(e)s sont conviés à la rentrée scolaire à un apéritif permettant de faire connaissance; un contact est maintenu par chaque référent au vu du suivi scolaire nécessaire à lenfant.
1.6 LE FONCTIONNEMENT DE LEQUIPE EDUCATIVE
1) Les responsabilités et la répartition des tâches
Un des buts de léquipe éducative est daider les enfants qui leur sont confiés à dépasser dans la vie courante leurs problèmes afin de leur assurer, dans la mesure du possible, une évolution harmonieuse. Pour cela, il incombe à léquipe éducative dassumer des responsabilités et de répartir des tâches déterminées :
2. Les éducateurs sont chargés de transcrire les informations dordre général et nécessaires dans le livre de bord et/ou le fichier personnel des enfants. Il doit également remplir les fiches dobservation (ODC ou autres) qui seraient mises en place.
3. Les éducateurs gèrent largent de poche personnel des enfants, parfois un compte " vêtements ", ainsi que le compte collectif " loisirs ".
4. Léducateur veille à transmettre les informations nécessaires aux personnes concernées, pour le bon déroulement de la vie communautaire. Il donne un compte-rendu régulier des événements de la vie quotidienne à la direction pour décharge des responsabilités.
5. Léducateur est responsable de laccompagnement éducatif des actes de la vie quotidienne : le réveil des enfants, lhabillement, la santé, les repas, laccompagnement aux leçons, les temps de loisirs, lordre de la maison, le suivi des divers traitements comme le dentiste, médecin, thérapie; les couchers et la nuit.
6. Léducateur accompagne les enfants sur le plan scolaire, dans la mesure de ses connaissances et de ses compétences. Il assure le suivi avec les enseignants et en rend compte à léquipe et la direction. Il participe aux réunions de parents.
7. Les éducateurs assument à tour de rôle et individuellement les week-ends avec les enfants qui ne sont pas partis.
8. Léducateur veille plus particulièrement à lévolution des enfants dont il est référent, tant à La Bérallaz quà lextérieur. Il informe lensemble de léquipe et la direction des entretiens effectués, des changements et de la progression des objectifs fixés lors de ladmission ou lors de synthèses, jusquau départ de lenfant.
9. Les éducateurs, délégués par la direction, sont en relation, suivant les situations, avec les enseignants, les thérapeutes, les familles, les communautés religieuses, les médecins, les dentistes, les assistants sociaux, lorientation professionnelle et les institutions prenant en charge les enfants durant ou après leur placement à La Bérallaz.
10. Les éducateurs, après approbation de la direction, ont la responsabilité complète de lorganisation et la réalisation des camps : lieu, transports, loisirs, budget, activités et repas. Une restitution orale est faite à la direction durant le premier colloque qui suit le retour du camp ou avant, en cas de problème, pour la décharge des responsabilités.
11. Les éducateurs doivent être particulièrement attentifs au développement physique et psychique des enfants. Ils sen réfèrent à la direction chaque fois que cest nécessaire.
2) Les colloques
Deux colloques ont lieu chaque semaine :
- Le premier se déroule le mercredi matin où sont présents léquipe éducative, le couple directeur ainsi quune psychologue; cette dernière prend part au colloque selon la demande.
Ce moment est centré principalement sur les enfants de linstitution. Au cours de lannée, cela permet dévaluer les différents objectifs fixés. Chaque collègue peut apporter une situation ou partager ses préoccupations par rapport à un enfant. Léquipe peut aussi demander, comme cité ci-dessus, la présence de la psychologue, afin de les conseiller et leur donner des pistes de travail. Les décisions concernant les enfants se discutent et se prennent généralement durant ce colloque, afin que chacun adopte lattitude adéquate requise; cependant, lurgence des situations demande souvent à léducateur/trice de se positionner sur le champ.
Cest également pendant ce temps que chacun effectue les retours dentretiens (parents, psychologues, professeurs, assistants sociaux, etc.) auxquels il a participé. De même, il informe le reste de léquipe des décisions personnelles prises pour un enfant dans le cadre du quotidien en les expliquant.
Ce colloque offre la possibilité aux collaborateurs de débattre sur le fonctionnement de léquipe et de la ligne pédagogique, ou de faire des synthèses en présence des assistants sociaux, ou encore dinviter un intervenant extérieur pour parler dun sujet précis. En outre, le ou la stagiaire a une place prévue à lordre du jour pour un bilan intermédiaire ou final ainsi que pour partager une difficulté ou un souhait.
En ce qui concerne le fonctionnement du colloque, à tour de rôle, les éducateurs/trices deviennent secrétaire puis animateur/trice du colloque. Le rôle de secrétaire consiste à dresser un P.-V. La seule exception est lors dun point particulier ou dune synthèse. Dans ce cas-là, cest le référent qui a la charge de recueillir les informations et de les transcrire dans le dossier de lenfant. La semaine suivante, le secrétaire devient animateur du colloque. Son travail est dorganiser et de planifier, le matin, en reprenant les sujets inscrits dans lagenda et au tableau durant la semaine par les membres de léquipe. Il anime les débats en veillant à ce que tous les points prévus puissent être traités. Il est également responsable de remettre la discussion sur les rails lorsquune ou plusieurs personnes sortent du sujet ainsi que de permettre à tout le monde de sexprimer, déviter les coupures de parole, etc. Il débute le colloque en relisant le P.-V. effectué par ses soins afin davoir la confirmation du reste de léquipe des informations écrites. Tout le monde participe à ce tournus y compris le couple directeur.
- Le deuxième colloque a lieu le vendredi en début daprès-midi. Ce temps permet de parler de lorganisation de la maison. Les personnes présentes sont le couple directeur et léquipe éducative. Cest à ce moment-là que nous discutons des horaires, du planning de la semaine à venir, des rendez-vous divers, des départs en week-end, des non-départs.
Nous planifions aussi les activités pour le mercredi après-midi de la semaine suivante, ainsi que les camps ou activités spéciales. Normalement, nous ne parlons pas des enfants, mise à part les situations durgence.
A lieu avant la rentrée scolaire et la réouverture de La Bérallaz, une journée du dimanche où toute léquipe et la direction se retrouvent pour discuter de la nouvelle organisation, des changements qui vont intervenir et des nouveaux objectifs de groupe à mettre en place pour lannée. Ensuite, toute léquipe est présente pour accueillir puis coucher les enfants qui arrivent durant la soirée. Pour les enfants, cest un moment de séparation davec les parents ou la famille daccueil et de retrouvailles avec léquipe éducative et le lieu de vie.
- Avec la direction :
Le couple directeur a la même formation de base que léquipe éducative; cet élément facilite la communication entre professionnels. Le couple directeur est très disponible et ouvert au dialogue, ainsi il existe une réelle collaboration entre léquipe et la direction, toujours prête à intervenir en situation délicate avec la famille, etc.
- Entre éducateurs spécialisés et de la petite enfance :
Depuis la création du groupe pour les petits de 4 à 6 ans, La Bérallaz a engagé une éducatrice de la petite enfance. La présence de cette éducatrice sensibilise le reste de léquipe aux besoins spécifiques des plus petits.
- Avec le personnel de maison :
La collaboration avec le personnel de maison est dordre pratique. Il ny a pas de projet pédagogique prévu à lheure actuelle.
- Avec la psychologue :
Actuellement, La Bérallaz collabore avec une psychologue dapproche jungienne (cf. chapitre II) qui aide léquipe à prendre en charge lenfant dans sa globalité. Une grande partie des enfants de La Bérallaz suivent une thérapie. Cest une demande de la direction et de léquipe éducative; cependant tous ne vont pas chez la même psychologue ou psychiatre.
La collaboration avec la psychologue seffectue toujours à la demande de léquipe. Il sagit, généralement, de faire un bilan de la situation dun enfant afin daider léquipe à trouver des pistes daction dans la pratique. Elle rencontre lenfant dans son cabinet, effectue un bilan, puis fait un retour à léquipe lors du colloque. Cest ensemble que nous cherchons des solutions. Grâce à son écoute et à ses connaissances, elle a su donner à léquipe les outils et la confiance nécessaire afin de pouvoir réfléchir aux pistes daction. En outre, la psychologue participe à certains entretiens de famille et nous conseille aussi en fonction des difficultés de lensemble de la famille.
- Autres professionnels :
Etant donné la prise en charge globale des enfants, La Bérallaz travaille aussi avec les médecins, spécialement une femme médecin connaissant bien linstitution et offrant collaboration et flexibilité pour la consultation des enfants. En outre, il existe aussi des relations avec dautres professionnels de la santé, tels quostéopathes, physiothérapeutes, etc.
1.7 OBJECTIFS EDUCATIFS
Pour ce qui est des objectifs, il existe deux niveaux : le premier englobe les objectifs de groupe et le deuxième les objectifs individuels.
a) Les objectifs éducatifs de groupe
Une des conditions dentrée à La Bérallaz est davoir lâge scolaire. Cest pourquoi les 17 enfants de La Bérallaz sont âgés de 5 à 15 ans, jusquaux vacances dété; date à laquelle 4 enfants partent et seront remplacés à la rentrée par quatre autres. Un seul na que 3 ½ ans et est admis par exception car il est le frère de deux autres enfants qui rentrent à La Bérallaz et il sagit de ne pas séparer la fratrie.
Ces 17 enfants étaient répartis dans trois sous-groupes jusquà la rentrée scolaire 98-99, avec des objectifs spécifiques : le groupe des petits (5 à 7 ans), des moyens (8 à 12 ans) et des grands (13 à 15 ans).
- Le groupe des petits :
Un des objectifs est de leur offrir un lieu tranquille, un cadre de vie, un rythme de vie adapté à leur âge; cest-à-dire veiller à leur sommeil, leur alimentation et leur hygiène. En outre, une éducation plus centrée sur les besoins de la petite enfance peut être donnée, telle que certaines limites de base à respecter, la confiance envers ladulte, garder le contact avec lextérieur en invitant des copains ou en étant invité, offrir la disponibilité nécessaire pour leur laisser prendre ce dont ils ont besoin sans remplacer les parents et les aider à acquérir un peu dautonomie.
- Le groupe des moyens :
Ce groupe actuellement très dynamique est composé de 8 enfants de 8 à 12 ans (10 à la rentrée). Un des objectifs est de leur permettre dapprendre à vivre ensemble et à travers des activités spécifiques, selon les diverses compétences de léquipe éducative. A travers diverses règles de vie de la maison, il leur est demandé progressivement dassumer quelques petites tâches, dapprendre peu à peu à devenir autonomes, pouvoir construire un projet personnel. Lensemble de la vie communautaire et de lencadrement éducatif constitue des objectifs à atteindre pour chaque enfant dans la maison.
- Le groupe des grands :
Ce groupe est composé de 5 enfants de 13 à 15 ans. Une fois par quinzaine, le groupe se réunit pour vivre un moment privilégié; les adolescents sont obligés de participer à cette soirée. Cest un espace découte et de discussion où chacun est participant. Des activités sont proposées, telles que regarder un film, faire un jeu, un billard, une sortie, un débat, etc. Ces moments leur permettent dapprendre à accepter le regard de lautre, à devenir actifs ou moteurs dune activité.
A partir de la rentrée scolaire 98-99, il y a toujours 17 enfants, mais des enfants étant partis et dautres arrivés, léquilibre des trois groupes dâges précédents sest trouvé modifié et quatre groupes ont été ainsi désignés :
Soit quatre enfants entre 3 ½ ans et 6 ans. Le plus jeune ne va bien sûr pas à lécole enfantine, mais fait partie de ce groupe des plus jeunes. Il va commencer deux demi-journées par semaine à aller en garderie; ceci afin quil ne soit pas toujours seul avec des adultes alors que les autres enfants sont à lécole et quil puisse jouer avec des enfants de son âge. Le groupe des enfantines prend ses repas dans les locaux des " petits "; le plus jeune et sa soeur, ainsi que leur frère qui fait partie des " primaires ", ont une chambre pour eux trois, afin que leur fratrie soit réunie.
- Le groupe des primaires :
Soit cinq enfants de 7 à 9 ans. Le groupe des moyens est devenu très important (10 enfants); cest pourquoi il a fallu en faire deux groupes par classe dâge : les " primaires " pour les plus jeunes des moyens, qui se distinguent ainsi des enfantines et des " moyens ".
Une fois par quinzaine, le groupe des primaires va se retrouver pour un moment qui les concerne exclusivement eux cinq; des activités seront proposées et menées à bien.
- Le groupe des moyens :
Soit cinq enfants de 12 à 13 ans.
Une fois par quinzaine également ce nouveau groupe de cinq enfants va se réunir, organiser et vivre des activités ensemble.
- Le groupe des grands :
Soit trois adolescents de 14 à 15 ans qui vivent eux aussi une fois par quinzaine un moment pour eux (cf. " groupe des grands " avant la rentrée, ci-dessus). Ils ont aussi la possibilité de demander une soirée par semaine (rentrée jusquà 22 h.00) et planifier une activité (sortie, film, jeux, etc.)
Une " Grande Réunion " a lieu en principe une fois par mois. Cest un moment court (1/2 heure) où tous les enfants et les adultes présents dans la maison, y compris le couple directeur, se réunissent et vivent un moment privilégié de jeu et de réflexion communautaire. Lors de mon stage, il y eut des séances où le thème était la communication. Nous avons fait par exemple lexpérience dun message transmis par " téléphone arabe ", puis avons réfléchi à tout ce qui pouvait se trouver déformé comme information dans la maison. Jai trouvé ces moments très forts et importants, par le fait dêtre tous réunis.
Lenfant placé à La Bérallaz vit des difficultés dans sa famille. Chaque enfant exprime sa souffrance par divers symptômes plus ou moins différents, tels que violence, troubles de lalimentation, difficultés à communiquer, difficultés à sintégrer dans un groupe, divers maux physiques, etc.
Un des buts est de reconnaître la réalité que lenfant vit. Léquipe a créé un schéma pour identifier les différentes étapes pour amener lenfant à dépasser la crise et vivre. Il faut être, dès le début de son placement, le plus clair possible dans les objectifs pour permettre à lenfant de ne pas être trop perdu.
Schéma des étapes :
Objectifs Moyens
1. Réparation Offrir à lenfant de la De lattention, de la présence
sécurité, de la compréhension un miroir, un environnement
une structure et surtout un apaisant.
aperçu de sens.
2. Développement Redonner à lenfant sa place Notre authenticité, utiliser les
dans son âge en fonction de ressources de lenfant.
ses moyens et de son rythme.
3. Consolidation Evaluer et réadapter les Des synthèses, constat des
projets de lenfant. progrès, miroir.
4. Epanouissement Intégration du miroir, Accompagner, lâcher-prise,
développer la place de lenfant faire confiance.
dans le groupe, la famille,
la société.
5. Créativité Permettre lémergence de la Préparation et passage.
personnalité consolidée et
que lenfant puisse continuer
à se construire même après
le départ de La Bérallaz.
Les objectifs spécifiques pour lenfant sont discutés en colloque, avec les parents, avec lenfant pour quil sache où il en est. Le référent doit être garant et suivre lenfant, ainsi que faire des bilans. Les évaluations doivent devancer la crise et non la crise le moteur des évaluations.
Depuis quelques années, une psychologue jungienne collabore grandement à laction éducative de La Bérallaz. Elle participe aux colloques et offre des pistes de compréhension et de réflexion; en outre, les compétences et connaissances de chaque collègue sont sollicitées. Léquipe fait référence à divers modèles, tels que lapproche jungienne, la systémique, le comportementalisme, lanalyse transactionnelle.
Cependant, lapproche jungienne, par lapport de notre psychologue, est prédominante; cest une ambiance dans la maison, un savoir-être, une philosophie. La vision " jungienne " de lêtre humain influence fortement lintervention éducative qui est empreinte du respect de lindividu, de son projet et du sens quil donne à sa vie. Dans la collaboration que léquipe entretient avec la psychologue, une notion est essentielle; cest de partir de la réalité de lenfant, tel quil la vit, daccepter cette réalité, aussi difficile soit-elle. La psychologue tente, par des tests dassociations et un bilan dans son cabinet, de comprendre la structure et la dynamique de lenfant; ce qui permet de découvrir à quel niveau sont les blocages empêchant le développement. Par suite, le processus de guérison peut se mettre en route, une fois les rails trouvés pour diriger la psyché vers lépanouissement.
Ce qui est très agréable dans cette collaboration, ce sont les pistes très concrètes proposées aux éducateurs. A un enfant qui a peur la nuit, sera donnée une pierre " magique " protectrice à glisser sous loreiller au moment du coucher. Parfois, afin de compléter un travail fait en thérapie, notre collaboration est demandée afin de trouver des phrases à dire par chacun à lenfant; le but est de toucher linconscient de lenfant. Une attitude, un jeu de rôle, un film, un objet transitionnel, etc, peuvent nous être suggérés pour aider tel ou tel enfant à tel moment.
Afin de mieux comprendre ce mode de prise en charge, jai recherché des informations auprès de mes collègues, de la psychologue et jai surtout consulté longuement des ouvrages sur la psychologie de Jung, sur sa vie et son oeuvre. Cela ma pris un certain temps de " digestion " avant de vraiment appréhender cette psychologie. Jung, sa vie et son oeuvre sont indissociables et jai dû, pour comprendre ce quil nous a amenés, aller rechercher dans sa vie le cheminement de son esprit fécond. De plus, il sagit dun apport où spiritualité, histoire, religion et psyché sont constamment entremêlés. Toute cette recherche a été très enrichissante et jai à coeur de la présenter ici, de façon la plus succincte et simple possible, en essayant quelle nen devienne pas réductrice.
2.1 C.-G. JUNG : SA VIE, SON OEUVRE ..Retour au sommaire
Carl Gustav Jung est né en 1875 près du lac de Constance puis va passer son enfance dans un presbytère près des chutes du Rhin. Son père et sa mère furent divisés. Sa mère était extravertie et instinctive; son père, introverti, pasteur pieux, luttait pour vivre selon la foi chrétienne mais était constamment torturé par le doute. Les usages exigeaient alors de préserver les formes extérieures du mariage, mais Jung, enfant sensible et intelligent, était conscient de leur échec. Ces influences sintériorisèrent, alimentèrent ses conflits intimes et se manifestèrent dans ce quil appelle sa " personnalité no 1 " (la conscience) et sa " personnalité no 2 " (linconscient).
Dès sa plus tendre enfance, Jung eut des rêves et des fantasmes peu communs quil ne put comprendre que par la suite et dont il se demanda comment un petit garçon pouvait avoir des intuitions semblables à celles des peuples antiques. Il trouva la réponse à cette question dans le concept d " archétype " et dans celui d " inconscient collectif "; deux notions-clés de la psychologie jungienne.
Carl Gustav Jung a soutenu que la psyché de lhomme a une partie consciente et une partie inconsciente. Dans linconscient de lhomme il y a linconscient personnel qui contient toutes les expériences vécues, tout ce qui est en train de se formuler avant de venir à la conscience; il y a aussi une couche plus profonde où la psyché produit des images ou des rêves correspondant aux thèmes que nous trouvons dans la mythologie ou dans les contes de fées, cest linconscient collectif. Linconscient collectif produit des images et des thèmes qui sont communs à toute lhumanité; que lhomme soit pygmée, inuit, aborigène ou occidental, moderne ou préhistorique, il possède cela en commun, que lon retrouve dans les rêves, les mythes, les légendes et les contes de tous les peuples. Les thèmes fondamentaux, universels, Jung les a appelés les archétypes. Dans la psyché de lhomme, les déclencheurs de ces schémas archétypiques sont les instincts. Lintemporalité des archétypes relie lhomme à son essence propre, immuable depuis la fin des temps. Tous les enfants du monde connaissent ces archétypes; par exemple, une de ces images, qui a sa correspondance chez tous les peuples et toutes les civilisations est la sorcière.
En 1895, Jung commença ses études de médecine à lUniversité de Bâle. Il écrivit sa thèse de doctorat sur le spiritisme et resta toute sa vie intéressé par les choses occultes. Il choisit ensuite la psychiatrie, parent pauvre de la médecine à lépoque, convaincu que la psyché était négligée et que cétait son destin que de tenter dy remédier. Jung développa alors les tests dassociations et sintéressa aux fantasmes bizarres de ses patients.
A cette époque, un vent nouveau venu de Vienne soufflait sur la psychiatrie. Freud avait publié ses études sur lhystérie et sur les rêves et Jung estima quelles éclairaient aussi les " formes dexpression schizophréniques ". En 1907, il publia " La psychologie de la démence précoce ", Freud fut intéressé et linvita. Pendant sept ans, Jung eut des rapports très étroits avec le mouvement psychanalytique et fut pendant quatre ans Président de lAssociation Internationale de Psychanalyse.
Freud le vit comme un fils et successeur; cependant, dès le début, Jung eut des réserves sur les conceptions de Freud et fit cavalier seul pour porter son intérêt aux psychoses, à la religion, à létude de lhistoire sans laquelle il ne peut y avoir de psychologie de linconscient. Il rechercha des parallèles à ses rêves et à ses expériences fantasmatiques et il les retrouva à létude des vieux textes alchimiques. Puis il étudia le mythe de linceste et avança lidée que les désirs incestueux sont plus spirituels que biologiques; ils ne se réfèrent pas à un comportement littéral mais inaugurent un développement spirituel. Cette vue allait tellement à contre-courant de tout ce que Freud avait enseigné que Jung se retira du mouvement psychanalytique.
Auparavant considéré avec froideur par le monde académique, comme adepte de la psychanalyse, - - - fortement critiquée en Suisse pour ses théories sexuelles - , il se retrouvait à présent abandonné par ses collègues et amis, traité de mystique. A la fin des années 1913, il eut plusieurs visions accablantes quil ne comprit quun an après, lorsque la guerre mondiale éclata...
Durant cette période sur fond de guerre, il décida daccepter ses pulsions irrationnelles et franchit un pas en travaillant sur le contenu de ses émotions jusquà pouvoir les cristalliser sous forme dimages. Il se mit à jouer comme les enfants, construisant des maisons et villes de pierres, puis sculptant. A cette époque aussi, ses rêves furent emplis de détails historiques et dune forte symbolique. Une femme dans ses rêves essaya de le persuader quil créait de lart; une part de sa psyché inconsciente se présentait sous les traits dune personnalité féminine, quil nomma par la suite " anima ".
Après 1917, le flot des rêves et des visions se calma et il passa son temps à en organiser le chaos, à étudier ses propres matériaux inconscients et ceux de ses patients et à élaborer sa théorie. Dès 1916, les fruits de ce travail devinrent livres et articles : " Dialectique du moi et de linconscient ", " Types psychologiques ", " LEnergétique psychique . Dans " Le Secret de la Fleur dor " (1929), Jung expose ses tentatives pour produire des mandalas et les met en relation avec un système chinois de développement spirituel.
Emma Jung, sa femme, fut remarquable et parvint à sadapter à la personnalité de son mari sans perdre la sienne propre. Outre quelle éduqua cinq enfants, elle prit des patients, donna des cours et séminaires à lInstitut Jung de Zurich; eut des entretiens avec des visiteurs du monde entier. Et à cette époque, il nétait pas encore courant quune femme mène ce mode de vie. Elle fit aussi un travail de recherche sur la légende du Graal, laissé inachevé à sa mort en 1955.
Pendant sa vie, Jung voyagea beaucoup, tout dabord aux Etats-Unis avec son ami Freud, puis il y fit plusieurs séjours seul. Il visita le Nouveau Mexique et étudia les indiens Pueblos. Il vit lAfrique du Nord, le Kenya et lOuganda. Il voyagea également à travers lInde et sembla plus impressionné par le bouddhisme que par la religion hindoue. Il visita également les pays voisins et finit par bien connaître lAngleterre, à force dy donner des conférences et séminaires.
Jung était un homme grand et large, élégant sans excès; en vieillissant, il prenait une allure frappante et donnait vraiment limpression aux visiteurs dêtre un grand homme. Il a dit de lui-même quil avait plus et moins besoin des autres que la plupart; il était parfois inquiet de sentir un démon le pousser à la poursuite de la connaissance sans considération pour les sentiments dautrui et blessait parfois sans le vouloir. Sa vieillesse fut satisfaisante, malgré quil fut parfois convaincu que personne navait compris ce quil avait tenté de dire toute sa vie. Bien quadmiré par de nombreux amis, il lui arriva de ne supporter ni la critique ni autrui. Il décèda à Küssnacht, près de Zürich, en 1961 à lâge de 84 ans.
2.2 JUNG ET LENFANT..Retour au sommaire
Carl Gustav Jung parle intensément de sa propre enfance et de ses impressions enfantines. Il raconte combien les concepts contradictoires de ladulte ont été incohérents pour lenfant quil était. A travers sa propre expérience, il nous donne un aperçu exceptionnel de comment un enfant pense et à quoi il pense. Les adultes ont souvent la fausse conception que les enfants ne pensent quà des choses infantiles, souvent considérées comme sottes, limitées . Cependant, ladulte attentif peut reconnaître des capacités étonnantes chez lenfant.
Jung propose que la psyché de lenfant contient déjà toutes les structures nécessaires au développement progressif de la personne; la psyché de lenfant nest pas une " tabula rasa ", un espace vide, libre, en attente dêtre rempli; mais, comme un bourgeon de fleurs, elle abrite déjà en puissance les informations de son épanouissement futur.
Jung a apporté une contribution importante à la compréhension du développement de lenfant en démontrant, grâce aux tests dassociations, combien sa psychologie est intimement liée à celle de ses parents. Une famille entière peut même montrer, dune façon frappante, des réactions similaires. Les enfants peuvent avoir des rêves qui reflètent les problèmes des adultes autour deux, et lon peut souvent rapporter aux difficultés de ceux-ci, soigneusement cachées, les perturbations nerveuses ou les problèmes de comportement de ceux-là. Il suffirait parfois de mettre en lumière les difficultés et de les partager franchement avec lenfant (à un niveau compréhensible) pour que sa nervosité ou son aspect réfractaire disparaissent. Jung décrit des situations de ce genre où un jeune a pu être guéri. Il a été jusquà dire quil est peu utile de traiter un problème denfant si les parents ne tentent pas simultanément déclaircir leurs propres difficultés; mais ses successeurs ont quelque peu modifié ce point de vue, estimant quil est possible de développer et de renforcer la conscience dun jeune pour quil puisse, dans une certaine mesure, devenir un individu capable de résister aux influences nuisibles.
Linfluence inconsciente des parents sur leurs fils et filles a beaucoup plus deffets que nimporte quel précepte; ce quils disent est moins important que ce quils sont; linfluence de linconnu est beaucoup plus dangereuse que celle du connu. Les enfants réalisent souvent un aspect de la personnalité des parents qui a été refoulé ou que les circonstances les ont empêché de développer.
Il importe, pour que les enfants se développent de façon satisfaisante, que les parents, mais aussi les éducateurs, acceptent la vie, la vivent aussi pleinement que possible et quils approfondissent leur connaissance deux-mêmes. Quand il y a frustration, et cela est souvent le cas, il faut quils soient honnêtes avec eux-mêmes et le reconnaissent. Ce sont les secrets, les cachotteries, les cadavres dans les placards qui sont néfastes. Jung propose léducation non seulement des enfants, mais aussi celle des adultes à mieux se connaître, à cheminer sur la voie de lindividuation.
IV. Atelier peinture..Retour au sommaire
Un de mes objectifs de stage était danimer et de réaliser une activité seule de A à Z avec les enfants. Les activités de dessin et de peinture étant quelque chose que jaime faire depuis lenfance, jai donc choisi dinvestir latelier peinture.
Lorsque je suis arrivée à La Bérallaz, un projet était déjà en route. Il sagissait de drapeaux à peindre sur le thème du " Ciel " et qui allaient être exposés à Ouchy, ainsi que ceux dautres institutions pour enfants. Le matériel était offert par une galerie dart, instigatrice de cet événement depuis quelques années. Le projet en était à son début et jai proposé ma participation. Jai pu prendre individuellement deux fillettes, dont une était S., présentée en MIE. Au moyen de cette activité médiatrice, jai pu mieux approcher ces deux enfants; être à lécoute sans pour autant leur parler de façon directe, ce qui ma paru une façon de rentrer en relation plus agréable pour des enfants dont le passé avec les adultes est souvent lourd. Mon goût pour la peinture ma permis également de transmettre un peu de mon enthousiasme, dencourager ma création. Cette première expérience était très encourageante pour moi et pour les enfants.
Dans le cadre du camp de vacances dété, je souhaitais offrir une activité créative bien adaptée à la circonstance. Jeus lidée de proposer la réalisation de peinture sur tee-shirts; le but étant que chacun puisse réaliser une oeuvre quil pourra porter durant lété. En proposant cette possibilité aux enfants, tous ont été favorables, sauf peut-être un ou deux. Jen ai parlé à léquipe et jai eu le feu vert et carte blanche pour mener mon projet de A à Z. Une grande aventure commençait !
Un des objectif était que le coût ne soit pas trop élevé, eu égard au budjet total du camp à respecter. Cest pourquoi jécrivis une lettre au grand magasin dans lequel javais trouvé et commandé toutes les tailles de tee-shirts blancs les moins chers. Nous avons reçu en réponse une gentille lettre avec un bon dachat qui payait les 2/3 de la facture. Ne restait plus que la peinture pour tissus que je suis allée chercher dans un magasin spécialisé qui nous octroie un 10% de rabais. Il sagissait également de guider les enfants afin quils puissent être fiers de leurs créations. Dans cette optique, je me suis procuré des petits livres de modèles de dessins pour tee-shirts denfants. Après avoir encore préparé des tabliers, pinceaux, feuilles, fer à repasser, etc, javais réuni tout le matériel nécessaire pour partir en camp et animer mon " atelier tee-shirts ".
Au début du camp, jai commencé un peu trop fort en prenant trois fillettes de 12 ans très motivées et qui voulaient travailler ensemble. Le positif fut quelles travaillèrent vite et bien et donnèrent envie aux autres de réaliser aussi leur tee-shirt. Le négatif fut que jétais un peu débordée et nai pas réussi à encadrer suffisamment lune delles qui avait plus de difficultés; elle ne fut pas entièrement satisfaite de sa création. Même si elle avait décidé de tout, elle était allée trop vite, avait un peu bâclé son travail. Avec le recul, jai réalisé que cest une fille que jaurais dû prendre individuellement afin de pouvoir la guider, la freiner, la conseiller pour arriver à un résultat qui la satisfasse. Limage souvent mauvaise que ces enfants peuvent avoir deux-mêmes doit nous pousser à les aider à être fiers de ce quils réalisent.
Dès lors, jai freiné la cadence et jai travaillé avec deux enfants lorsquils étaient assez grands et assez sûrs de leurs capacités. Une des trois filles venue en premier est devenue mon assistante à certains moments et sa présence fut importante dans la dynamique de travail; ses idées souvent très précieuses pour aider les plus jeunes. Le plus souvent, jai dû travailler individuellement afin dassurer la qualité dencadrement. Pour chaque réalisation, cela a demandé en moyenne entre 2 et 4 heures de travail réparties sur les moments où il était possible de le faire, où il ny avait pas de sortie, où personne nétait " de service " (repas, vaisselle). Sur un camp de deux semaines et avec 14 enfants, il ny avait pas trop de temps, jai fait de mon mieux et ai préféré privilégier la qualité plutôt que la quantité.
Le bilan final était le suivant : 10 enfants avaient réalisé leur tee-shirt; 1 tee-shirt a été confectionné par moi-même, signé des enfants comme cadeau dadieu à un garçon qui rentrait chez lui définitivement après le camp; 1 autre fut réalisé par un grand de 14 ans avec moi pour loffrir de la part de léquipe au cuisinier de linstitution à notre retour. Au total, trois enfants navaient pu faire leur tee-shirt et souhaitaient le faire; je me suis engagée à le réaliser à la rentrée avec eux. Une grande fille de 15 ans a refusé cette création et jai estimé, avec mes collègues, que cela navait aucun sens dimposer comme obligatoire une activité créative dans le cadre dun camp de vacances, il fallait que cela reste un plaisir.
Voici ce que jai découvert par latelier peinture :
- la nécessité de prendre le temps nécessaire au bon encadrement de chacun,
- la fierté pour chaque enfant davoir mené à bien sa création, quelle puisse être admirée des autres,
- apprendre à gérer son temps et pouvoir insérer dans un travail déquipe des moments privilégiés en atelier,
- la possibilité de proposer de belles créations avec peu de moyens; demandes de participation financières, rabais au magasin, etc.,
- une expérience très positive que je renouvelerais volontiers.
Lexpérience acquise durant ce stage est déterminante pour moi, me confirme dans mes choix professionnels. Jai eu la chance de travailler dans une équipe très compétente et cohérente au sein de laquelle jai beaucoup appris et davoir un praticien-formateur qui a su me guider, me conseiller très judicieusement dans le sens de ce que je recherchais.
Le type de population a été une grande découverte. Je connaissais assez bien le handicap mental et ladolescence en difficultés en accueil court terme. Travailler avec des enfants qui sont placés à moyen et long terme pour des difficultés familiales a été très enrichissant. Il a fallu bien sûr se poser plein de questions, se remettre en question et lon apprend autant sur soi-même que sur les autres.
Au départ, je nai vu rien que des enfants comme les autres. Jour après jour, jai appris à décoder certains comportements jamais vus, à comprendre le lien avec leurs difficultés familiales.
Au départ, jai cru que le " bon éducateur " était celui qui " réussissait " toujours et avec tous les enfants. Image fausse qui sest modifiée au fil des événements pour mapercevoir que lenfant a le droit de dire non; léducateur aussi et quil faut parfois " fermer la porte "; lenfant peut la rouvrir sil le veut. Jai découvert une équipe de professionnels où on a le droit de dire que cela ne va pas avec tel ou tel enfant sans être jugé incompétent, mais que lon est reconnu à part entière avec nos forces et nos faiblesses qui peuvent se compléter.
Au départ, jai cru que jétais " arrivée " auprès de ces enfants. Il a fallu du temps pour vraiment me sentir être arrivée auprès deux, pour me sentir acceptée pleinement, pour sentir leur confiance en ladulte que je représente. Après deux mois, jai vraiment vu que les enfants mapprochaient et sadressaient à moi librement; osaient faire des confidences ou des demandes. Cette découverte dun temps nécessaire pour sapprocher, mieux se connaître, se faire confiance, ce sont les enfants qui me lont apportée et jen suis encore émerveillée. Je suis touchée surtout que le temps des tests ait pu être dépassé et que jaie pu être acceptée parmi eux comme une adulte digne de confiance.