LA VIE STRESSANTE DES ENFANTS
Par Pierre Desjardins, psychologue
Le stress
On utilise le mot stress, de nos jours, à toutes les sauces. C'est un concept flou qui peut désigner
le stresseur (l'événement auquel l'individu réagit), la tension, l'anxiété, l'angoisse, la réaction
physiologique, l'inquiétude psychique, etc. Ce concept est tellement vague qu'il est difficile pour
les chercheurs de trouver une démarche thérapeutique unifiée.
Le
stress est une réaction, autant physiologique (accélération du rythme cardiaque, chute depression, rougissement), que psychique (angoisse, dépression, excitation). C'est une réaction à
un événement que l'on peut nommer
stresseur, événement qui peut avoir une valeur autantpositive (cadeau inattendu à Noël, gain à la loterie) qu'une valeur négative (perte d'amis, échec
scolaire). Le stress est cette réaction de l’organisme qui mobilise, prépare à l’action. Si, pour faire
image, on pense aux sprinters, le stress serait représenté par celui qui donne le signal de départ
en criant : « À vos marques… prêts… partez. »
Le
stresseur, cet événement, donc, auquel réagit l'individu, peut provenir de l'extérieur, en sommede l'environnement, comme de l'intérieur de l'individu. Il peut provoquer son effet stressant par la
rencontre des deux mondes, intérieur et extérieur.
Dans les situations extrêmes, on ne parle plus de stress et de stresseur, mais bien de
trauma etd'
événement traumatique. Le trauma est une réalité subjective interne, d'ordre psychologique, quidéborde les capacités de défense et d'adaptation de la personne. L'événement traumatique, lui,
s'opère dans une réalité externe et objective. C’est, en somme, un stresseur d’une intensité telle qu’il
laisse la personne sans possibilité de réaction.
Toute personne délimite pour elle-même le possible et l'impossible, le pensable et l'impensable.
L'événement traumatique a ici valeur d'impossible et d'impensable. Quand il y a trauma, le moment
présent se fige et occupe tout l'espace psychique. Plus rien d'autre n'existe alors. La vie perd son
sens et les événements n'ont plus leurs valeurs relatives.
Pour en revenir au stresseur, on peut considérer qu’il y en a trois types.
Il y a d’abord les changements rapides, qu’ils soient positifs ou négatifs ( on verra plus loincomment les enfants, tout comme les adultes d’ailleurs, sont sujets dans le monde moderne à
ce type de stresseurs ) ;
Les menaces ou les dangers qu’on rencontre, qu’ils soient objectivement fondés ou pas ( lesmédias contribuent beaucoup à multiplier ce type de stresseurs en rapportant ce qui fait le plus
vendre soit de l’information à teneur violente; ainsi, des situations quotidiennes et banales,
comme prendre le métro, deviennent des situations stressantes )
L’impression d’avoir à réagir rapidement à la situation dans laquelle on se trouve ( or, on vitjustement dans un monde où cette impression est omniprésente ).
De façon schématique on peut dire, par ailleurs, que tout individu réagit toujours soit pour éviter
un danger, une menace, soit pour s’attaquer aux obstacles qui se dressent devant lui. Dans ces
deux cas, il y a réaction au stresseur.
Il faut mentionner ici qu’il y a une distinction à faire entre être actif et être agité ( être efficace ou
« brasser de l’air » ) ou encore entre être actif et être stressé ( se mobiliser ou s’inquiéter ). L’enfant
stressé peut se sentir coincé, paralysé parce qu’il ne voit aucune possibilité de régler la difficulté à
laquelle il est exposé. Dans cette même situation d’impasse, un autre enfant pourra s’agiter pour
évacuer cette tension, sans toutefois que cette agitation ait de l’effet sur le stresseur. Quels parents,
par exemple, n’ont pas vécu l’expérience des enfants qui se mettent à s’énerver en voiture quand
justement les parents cherchent à se concentrer parce que la circulation s’alourdit, la route est
difficile à suivre, les risques de se perdre sont plus grands? Enfin, l’enfant actif se mobilisera pour
agir sur le stresseur.
L’individu « stressé » est donc, en quelque sorte, sollicité à bouger. Il est poussé à changer quelque
chose pour permettre un nouvel équilibre. On comprendra alors que le « stress » risque de devenir
néfaste si la personne qui l’éprouve est réduite à l’impuissance. De positif qu’il était, le stress devient
alors négatif, sinon chronique. On comprendra également que les enfants sont beaucoup plus
vulnérables que les adultes parce que leur pouvoir décisionnel, leurs moyens de faire face aux
stresseurs et leurs capacités de fuir les situations dangereuses sont restreints. À titre d’information, il
semble que les enfants d’aujourd’hui, considérés normaux, seraient aussi stressés que les enfants
des années 50 et 60 considérés atteints sur le plan de la santé mentale.
Les enfants sont plus susceptibles de vivre de l’impuissance, de subir, sans pouvoir y échapper, une
tension qui finira ainsi par devenir néfaste parce que c’est une tension qui ne leur appartient pas et
sur laquelle ils ne peuvent que très peu. En effet, on peut considérer que les parents, fréquemment,
qu’ils en soient conscients ou non, souhaitent que leurs enfants vivent la vie qu’eux n’ont pu vivre et
ainsi risquent de leur imposer quelque chose d’étranger. D’autre part, ces mêmes enfants sont de
plus en plus pris et débordés par les difficultés, problèmes et enjeux des adultes (massacre au
Rwanda, guerre au Kosovo, l’effondrement des Twin towers, la faim dans le monde, les trous dans
la couche d’ozone, le réchauffement de la planète…).
Liste des stresseurs
À la liste classique des stresseurs que vous trouverez jointe en annexe, ajoutons ici une liste de
situations stressantes auxquelles les enfants sont plus susceptibles d’être exposés. Il ne s’agit
pas d’une liste exhaustive cependant.
•
L’école
Être accepté dans les meilleures écoles
La rentrée scolaire
Vivre des difficultés ou des échecs
Avoir de mauvaises notes
Aller chez le directeur
Se perdre (dans l’école ou sur le chemin)
Être ridiculisé en classe
Harcèlement (« taxage », « bullying »)
Période d’examens
Être choisi le dernier
Faire une présentation orale•
Faire partie des meilleures équipes sportives11
Il y a une publicité télévisée qui nous montre un enfant bafouillant en tentant de dire à son pèreque sa performance n’a pas été suffisante pour qu’on le retienne comme joueur de l’équipe de
basket de l’école. Il se justifie en se référant aux idoles qui eux-mêmes auraient échoué à leurs
premiers essais, nous indiquant clairement à quelles normes on se réfère. Il est tout soulagé de
voir son père bien y réagir mais ce même père, si bienveillant qu’il soit, le relance à l’année
suivante pour en faire partie. Il n’est pas dit que ce n’est pas si important que cela de faire partie
de cette équipe.
•
Faire partie des artistes les plus performants (musique, danse…)•
Le bruit•
La violence familiale•
L’environnement instable
Déménagement2
Changement d’école2
Changement de classe
Changement de groupe
Changement de professeur ou d’éducateur
Changement de parents
Changement de milieu
Changement de routine
Perte d’amis•
Manque d’autonomieUne nouvelle religion : l’Éducatif
Peut-être qu’on insiste trop dans notre société sur l’importance d’apprendre. L’éducatif s’infiltre
partout dans le monde occidental, aucun espace n’en est épargné. Même les colonies de
vacances offrent des forfaits thématiques, soumettant les enfants à un encadrement organisé,
avec l’objectif qu’ils y apprendront quelque chose (seconde langue, discipline sportive, discipline
artistique, etc.). On oublie les vertus du jeu libre qui est pour l’enfant son monde naturel. Le jeu
peut refléter ses désirs et ses joies, ses préoccupations et ses tensions. En effet, si on observe
les enfants, c’est par le jeu libre qu’ils mettent en scène leurs fantasmes, qu’ils s’expriment, qu’ils
écoulent leurs frustrations, qu’ils répètent les événements importants de leur vie et qu’ils tentent
d’avoir une certaine emprise sur ce qui leur advient, de maîtriser leurs angoisses. Par exemple, le
jeu colin-maillard existe depuis plusieurs siècles et il semble qu’il s’enracine dans la peur
universelle du noir. Dans ce jeu, l’enfant s’y plonge délibérément. L’enfant qui donne à manger à
sa poupée, celui qui personnifie un dentiste, le petit groupe qui joue au chevalier et à la
princesse, tous reproduisent des situations de vie, recréent des sociétés en miniature à l’intérieur
desquelles ils s’exercent à comprendre ce qui se passe et travaillent à s’insérer.
Nos sociétés sont maintenant tellement compétitives qu’on tient à ce que nos enfants en
apprennent le plus possible pour qu’ils aient plus tard un avantage. Et on doit pouvoir vérifier ce
qu’ils apprennent. On peut plus difficilement savoir ce que le jeu libre leur apprend, alors qu’on
peut mesurer par un test les progrès en lecture. Avoir du plaisir au hockey, ça ne se mesure pas,
gagner 4 à 2, oui. Les sociétés asiatiques ont une tradition forte en ce sens. On voit des
immigrants originaires de ces pays réussir exceptionnellement à l’école. On peut cependant se
demander à quel prix cette « réussite » ! Il y a quelques années, on rapportait au Japon un taux
de suicide passablement élevé et on peut croire que, pour ceux qui mettaient ainsi fin à leurs
jours, c’eut été une façon de vouloir se débarrasser d’une vie qui ne leur convenait pas. Il fut un
temps également où on reconnaissait aux Japonais de grandes capacités à copier et adapter des
technologies inventées ailleurs alors qu’on les considérait assez peu créatifs eux-mêmes.
Aujourd’hui, le taux de suicide chez les jeunes au Québec est très élevé. Selon Santé Canada,
ce taux aurait doublé depuis les trente dernières années. Assiste-t-on au même phénomène de
dépossession de soi, d’épuisement prématuré ?
2
Selon une recherche menée en 1998 et rapportée par Développement des ressources humaines
Canada, il existe une corrélation entre le changement de résidence et le changement d’école et
les moindres compétences des enfants de même qu’avec les mauvais résultats à l’école.
Les enfants d’aujourd’hui sont soumis à une triple pression :
•
Pression à la maturation parce que les parents sont débordés;•
Pression à la performance pour répondre aux exigences de nos sociétés efficaces,axées sur la consommation;
•
Pression à l’excellence pour répondre aux besoins narcissiques des parents, besoinsconcentrés souvent sur un seul précieux enfant.
Sortons de la vie de nos enfants pour qu’ils s’intéressent à la vie, à leur vie.
DANS LA VIE PROFESSIONNELLE COURANTE
Qu'est-ce que que le stress ?
- la conception du stress selon les scientifiques
- la conception du stress dans le langage courant
Les facteurs de stress en milieu professionnel
A propos de l'anxiété comme cause et conséquence du stress
La prévention et le traitement du stress
Le stress est un concept à la mode. Il est de bon ton de dire que l'on est stressé. Depuis plusieurs dizaines d'années, les consultations médicales se sont multipliées tandis qu'ont fleuri ouvrages et études sur le sujet et qu'individus et entreprises se sont vu largement proposer séminaires et sessions intensives de « gestion du stress » par des moyens nombreux et de plus en plus sophistiqués.
Le succès de cette notion dans le corps médical et le public, notion devenue souvent "fourre-tout, a malheureusement compliqué un problème simple à la portée de "tout le monde " et l'a volontiers conduit à l'hermétisme. Qu'on en juge plutôt par ces propos d'un "spécialiste" du stress proposant une « médecine holistique » dont « les méthodes font appel, selon les cas, au retraitement des émotions, à l'approche systémique, à la pensée complexe, à la thérapie familiale issue de l'école de Palo Alto, au concept d'incertitude, à l'équithérapie, au cognitivo-comportementalisme, à la vidéothérapie, à la psycho-biologie » (sic) !
Dans la perspective pragmatique que nous suivrons ici on peut dire que, pour un individu, le stress va toujours de pair avec son incapacité (ou sa difficulté...) à affonter avec succès un événement quelconque de la vie.
C'est dire que le stress peut survenir dans de multiples situations et revêtir des aspects infinis comme le sont événements et personnalités.
Ici nous n'envisageons que le stress en milieu professionnel
Parler de stress amène obligatoirement à concevoir deux éléments
intimement liés :
1 - des facteurs causals,
2 - les conséquences sur l'organisme de ces facteurs
mais ces éléments simples vont, dans un processus en cercle vicieux, réagir
les uns sur les autres sans qu'il soit possible ensuite de les dissocier.
De cette donnée découle d'emblée une première difficulté de langage qu'il faut bien connaître : le terme de "stress" est employé volontiers soit pour désigner un facteur causal, soit pour désigner ses conséquences, soit pour désigner les deux éléments conjoints. D'où des malentendus courants.
C'est dire qu'il convient, autant que possible :
- de désigner la "cause" du stress par les termes de "facteur
stressant ", d'"agent du stress" ou de "stresseur",
- et de réserver le terme de "stress" aux "réactions",
aux "réponses", aux conséquences" sur l'organisme.
Quant au sujet on le qualifiera de "stressé" .
Il faut savoir qu'il y a deux conceptions du stress :
- celle des scientifiques
- celle dont témoigne le langage courant
La conception du stress selon les scientifiques
Ici, tous les événements de la vie sont des agents de stress :
- banals ou exceptionnels
- heureux (tel un gros gain à la loterie, un "coup de foudre" pour
telle personne...) ou malheureux (un deuil...)
- d'intensité très faible (une simple "incitation") ou très
importante (telle une agression physique ou psychique caractérisée)
- de quelque nature qu'ils soient : physique (bruit, chaleur, froid, douleur,
blessure, odeur agréable ou nauséabonde, musique.. ), chimique, microbienne,
psychologique,
- venant de autres ou de soi-même.
Ici, le stress désigne toutes les réactions possibles aux "événements"
de la vie
Dans cette perspective, tout individu est en état permanent de stress :
"l'action, c'est le stress", "la vie c'est le stress",
" le stress, c'est la vie", "Le pire stress c'est l'absence de
stress"
Le stress est considéré comme un phénomène permanent face aux stimulations
multiples qu'apporte simplement le fait de vivre.
Schématiquement, il comporte :
- soit une adaptation du sujet, un épanouissement, un "progrès",
- soit une non-adaptation du sujet (une incapacité à faire front) qui est
source de souffrance, voire d'épuisement et de maladie.
En somme, dans cette conception, il y stress à chaque fois qu'il y a interaction entre un individu et son environnement. Le stress c'est le courant qui nous emporte, c'est le dynamisme qui nous fait lever le matin, travailler, vivre, où le "bon" et le "mauvais" sont indissociables, ce sont les multiples péripéties de la vie où vont intervenir données programmées génétiquement et celles qui sont acquises au cours de la vie.
La conception du stress dans le langage courant
Cette conception est différente de la précédente. Ici, en parlant de stress on désigne seulement des conséquences "malheureuses", "désagréables","fâcheuses"... en réponse à des facteurs considérés comme de purs facteurs d'agression d'origine extérieure ou intérieure à l'individu. On dit être tendu, surmené, fatigué, soumis à des contraintes et des épreuves.
Ici, le stress est donc considéré comme un élément purement "négatif" allant de pair avec un mal-être (par opposition au bien-être). Il n'y a qu'un "mauvais" stress
C'est cette conception restrictive mais très pragmatique que nous suivrons ici.
Il ne faut pas perdre de vue néanmoins que parler de "bon" et de "mauvais" stress est très schématique et arbitraire car il ne saurait y avoir de limites précises entre les deux. On sait bien que des événements "malheureux" par leurs conséquences immédiates (telle une perte d 'emploi, tel un handicap...) peuvent se révéler "heureux" pour l'individu par leurs conséquences à distance. Comme toujours, il n'y a pas de frontières précises entre le normal et la pathologique mais une continuité.
De plus les qualificatifs de "bon" et de "mauvais" ne sont appliqués ici que dans une perspective fort limitée : celle de la santé physique ou mentale. Or, les individus ont, pour vivre, d'autres critères que ceux de la santé. Vaut-il mieux mourir à soixante ans d'un infarctus du myocarde dû à une vie stressante et intéressante, ou à quatre-vingt ans d'une vie tranquille et sans histoires? Chaque individu a, en la matière, sa réponse propre et sa sagesse.
C'est dire aussi que ces propos de médecine pratique excluent toute notion morale ou philosophique.
Il convient de distinguer ceux :
- qui viennent de l'environnement
- ceux qui viennent de l'individu
Ceux qui proviennent de l'environnement
On peut citer :
- la précarité de l'emploi
- l'autorité,
- la demande "exagérée" de rendement et f'efficacité,
- la stimulation affective pour être compétent, ponctuel, fiable, créatif,
- l'ambiance défavorable,
- la rivalité entre personnes de même niveau,
- l'environnement agressif : les décisions rapides et à enjeux importants,
le rythme de travail exagéré, l'inconfort, le bruit, la climatisation défectueuse,
les produits toxiques...
Ceux qui viennent de l'individu
Les handicaps concernent avant tout certaines dispositions
psychologiques constitutionnelles ou acquises
- comme handicaps constitutionnels on peut citer :
- l'anxiété qui génère un sentiment d'insécurité, une crainte diffuse,
une "tension" permanente, voire une dépression,
- le pessimisme,
- la mauvaise appréciation de soi,
- le scrupule exagéré...,
qui fragilisent les personnalités.
- comme handicaps acquis on peut citer :
- l'insuffisance des compétences professionnelles réelles ou supposées (par
l'individu) face aux exigences de l'entreprise,
- les perturbations neuro-psychiques entraînées par les grands toxiques
sociaux (boissons alcooliques, tabac, café) ou les médicaments psychotropes
- et puis il y a les maladies ou les handicaps d'ordre divers (la surcharge
pondérale étant l'un de ces handicaps).
Ils sont de deux ordres : neuro-psychique et somatique (concernant le corps par opposition au psychisme).
Les troubles neuro-psychiques
Comme nous l'avons remarqué d'emblée le stress est un processus en
cercle vicieux où l'on trouve des dispositions (ou perturbations) mentales à
la fois comme causes et comme conséquences. En ce qui concerne les conséquences
on peut citer :
- l'anxiété voire la dépression,
- la fatigue,
- l'irritabilité, l'énervement, l'agressivité d'où les difficultés
relationnelles,
- les migraines, les douleurs cervicales,
- les troubles du sommeil,
- l'indécision, la perte d'attention, la déconcentration, la négligence des
règles de la sécurité...d'où
- la démotivation et l'absentéisme qui s'en suit.
- et le recours tentant aux psychotropes (alcool, tabac, café, médicaments...)
pour atténuer la pénibilité des troubles en question, tous produits qui
vont encore aggraver l'état du sujet.
Les troubles somatiques
Ils sont le plus souvent la résultante d'une perturbation
. soit du du système nerveux central (dont le toxique le plus courant est
l'alcool)
. soit du système neuro-végétatif (dont le grand toxique est la nicotine)
(les médicaments psychotropes étant, quant à eux, toxiques pour l'un et
l'autre système).
C'est le système cardio-artériel qui est le plus fréquemment concerné. Peuvent survenir : une hypertension artérielle transitoire ou durable, des palpitations, des douleurs thoraciques pouvant témoigner d'une angine de poitrine, voire d'un infarctus du myocarde
Mais les troubles peuvent porter sur bien d'autres appareils, notamment,
. sur l'appareil endocrinien (les hormones interviennent puissamment à la
fois dans le stress et dans la capacité du sujet à y faire face)
. sur l'appareil digestif (troubles divers, ulcère de l'estomac..)
Il est pas impossible aussi que le stress prolongé, en influençant défavorablement les défenses immunitaires, puisse favoriser un processus de cancérisation.
Comme on l'a sans doute remarqué l'anxiété, cette émotion faite d'une inquiétude passagère ou permanente, est à la fois une des principales causes et une des principales conséquences du stress. Comme lui, il peut désigner le meilleur et le pire.
L'anxiété peur représenter bien entendu un élément pathologique très
défavorable, voire une maladie caractérisée
On sait que le taux de mortalité est supérieur chez les grands
anxieux...
Une étude (celle de Fawzy en 1993) a montré de même que les cancéreux qui,
dans les mois qui suivent leur intervention chirurgicale, ont un faible niveau
d'anxiété présentent un taux de survie supérieur aux autres.
Mais l'anxiété c'est aussi et d'abord un élément favorable en tant que source d'énergie.
Une constante euphorie, une absence quasi totale d'anxiété, comme on en rencontre souvent chez certains consommateurs de vin, constitue un grave handicap notamment quant au dépistage des maladies qui, fréquemment, a lieu avec retard.
L'expérimentation animale vient témoigner de ce phénomène... En rendant des rats anxieux, soit par frustration d'une récompense à laquelle ils étaient habitués, soit par "punition" (sous forme, par exemple, d'un petit choc électrique non "mérité"), on se rend compte que ces rats deviennent plus "intelligents". Plus vigilants dans leur environnement, ils s'adaptent mieux à une situation nouvelle, ils apprennent plus vite...
Chez l'homme il en est de même : les performances physiques et psychiques sont améliorées par une certaine anxiété qui pousse en avant et permet d'"en faire un peu plus". Serge Trigano dit de son père Gilbert : « Mon père est un visionnaire optimiste sur le long terme, un gestionnaire angoissé au quotidien : l'angoisse est son moteur ».
L'étude de Fawzy, citée plus haut, vient aussi appuyer cette donnée en montrant qu'à l'annonce du diagnostic de cancer (et non plus dans le cours du traitement) un degré assez élevé de détresse affective fait prévoir une plus plus grande probabilité de survie. La raison semble être que les patients qui minimisent trop la gravité de leur maladie ne mobilisent pas toutes leurs ressources dont ils disposent pour lutter contre elle avec succès.
C'est dire que l'anxiété est un phénomène normal, une énergie nécessaire à la vie. Elle joue un rôle important dans l'apprentissage, elle démultiplie les capacités de l'étudiant, de l'athlète, du décideur... Obligeant le psychisme à s'adapter aux situations nouvelles, elle est indispensable à un bon fonctionnement de la personne.
Mais chacun a sa personnalité
Entre les extrêmes il y a bien des intermédiaires. C'est dire que toute
mesure de l'anxiété est assez arbitraire. Certes, il existe :
- des échelles, des questionnaires à la disposition des médecins...
Ils sont utiles essentiellement pour l'établissement de statistiques mais
fort peu dans tel cas particulier
- des mesures biologiques. Certains tests comme celui à la caféine
(le café est une des substances les plus actives pour créer l'anxiété)
peuvent révéler une sensiblité accrue chez les anxieux chez lesquels
surviennent facilement des crise de panique.
Néanmoins, l'essentiel n'est pas de se référer à des normes tout à
fait illusoires mais de se poser les questions utiles :
- Suis-je plus ou moins anxieux par rapport à mon passé récent ?
- Mon anxiété est-elle une entrave à mes objectifs ?
- Mon anxiété est-elle source de souffrance pour moi ou pour mon entourage ?
ceci en vue d'y apporter un éventuel correctif.
Une prévention efficace, reposant sur des principes simples, est à la portée de la très grande majorité des individus
Les principaux principes concernant la personne à suivre dans cette perspective sont :
- la compétence professionnelle évolutive,
- la qualité (ou la non-perturbation) du système nerveux. Ce qui,
en pratique courante, signifie avant tout de ne pas user :
. d'alcool (sauf à doses minimes, de façon non habituelle et dans la seule
perspective d'un plaisir d'ordre gustatif),
. de tabac,
. de café (sauf à petite dose et, là aussi, dans la seule perspective esthétique),
. des médicaments psychotropes (somnifères en particulier).
- un traitement quotidien de la fatigue par la relaxation, par un sommeil adéquat (éventuellement une sieste), par une hydrothérapie simple (douche ou bain tiède quotidien ou bi-quotidien)
En ce qui concerne le sommeil, domaine souvent négligé,
disons schématiquement qu'un bon sommeil suppose quelques règles minima qui
sont les suivantes :
. celles qui sont relatives à l'ambiance : une bonne aération, une
température basse, un degré hygrométrique satisfaisant. En pratique, ces
données essentielles supposent généralement que le chauffage soit exclu de
la chambre à coucher ;
- celles qui sont relatives au comportement personnel :
. ne pas utiliser de somnifères (sauf raison impérieuse relevant d'un état
pathologique grave), de tabac (la nicotine perturbe toujours le système
neuro-végétatif directement en cause dans le sommeil), peu ou pas de
boissons alcooliques (l'alcool est avant tout un anesthésique),
. faire précéder le coucher d'une douche ou d'un bain, d'une activité
psychique (lecture...) ou/et d'une activité physique modérée,
. ne pas rester en position allongée et dans l'obscurité en cas d'insomnie
prolongée dans un contexte dépressif ou anxieux (cette position est toujours
défavorable quand il s'agit d'affronter une situation pénible).
Quant à l'hydrothérapie, elle a une double fonction : réaliser
une balnéothérapie et assurer une hygiène corporelle rigoureuse.
Outre l'utilisation large de l'eau alimentaire, la pratique quotidienne de la
douche et/ou du bain et l'obtention d'une excellente hygiène corporelle
constituent pour un individu, d'une part la base d'une prise en charge pour un
meilleur équilibre, d'autre part un moyen extrêmement efficace pour réduire
la fatigue musculaire et nerveuse, pour promouvoir la détente et la
relaxation, pour apporter une sensation de bien-être, pour soutenir ou récupérer
une énergie défaillante, pour lutter contre le laisser-aller et l'état dépressif.
Cette donnée est donc très importante dans bien des circonstances mais elle l'est particulièrement chez les personnes fatiguées, stressées, fragilisées physiquement et psychiquement.
- une organisation du temps de travail et de détente,
- une alimentation satisfaisante où la consommation de céréales, de légumes, de fruits et d'eau es t largement privilégiée,
- une activité physique adaptée (notamment sportive) et intellectuelle autant que possible quotidienne,
- un bon réseau relationnel familial et amical,
- un moment de plaisir quotidien.
Quant à l'action sur l'environnement ,
elle peut être discutée notamment avec le médecin de travail ou les
responsables de l'entreprise.
Le traitement qui s'avère nécessaire dans
certains cas, où le sujet est submergé par ses difficultés, relève
:
- dans un premier temps d'une aide psychologique simple
- en cas d'échec d'une aide psychologique spécialisée qui sera le plus
souvent associée à une médication psychotrope.
L'aide psychologique simple, qui repose d'abord sur une bonne
relation médecin-malade, comporte :
- une évaluation rationnelle de la situation stressante,
- un inventaire des ressources disponibles (compétence professionnelle,
relations sociales, communication avec les autres...)
- l'élaboration d'un plan d'action dans la perspective d'apporter des remèdes
visant à :
. contrôler les réactions émotionnelles,
. organiser le temps de travail, de détente, de sommeil...,
. vivre dans le présent,
. s'exprimer et communiquer avec des personnes de confiance,
. être réaliste dans ses objectifs
. apprécier ce que l'on a, relativiser les difficultés,
. avoir quelques valeurs de référence
. trouver des activités de rechange, des moments de plaisir
. accepter que la vie comporte obligatoirement des échecs qui peuvent être
source de progrès
. juger de ses limites et les accepter,
. s'engager avec détermination,
en y associant les éléments cités plus haut concernant :
. la compétence professionnelle
. l'hygiène de vie portant principalement sur le non-usage de tous les
produits perturbant le système nerveux, sur l'alimentation, le sommeil,
l'activité sportive et intellectuelle, la balnéothérapie, la relaxation
(pouvant utiliser des techniques de groupe telles que le yoga, le training
autogène...).
en sachant que ces modifications du comportement demandent obligatoirement un travail de longue haleine (alors qu'est attendu souvent un résultat rapide).
Cette aide peut éventuellement être associée à une prescription médicamenteuse non agressive telle que calcium, magnésium, vitamines (B et C).
Si le cas s'avère particulièrement grave
La consultation d'un psychiatre s'impose. En fonction du cas particulier,
celui-ci pourra mettre en Ïuvre :
- une psychothérapie plus complexe adaptée,
- une médication psychotrope,
- un suivi constant,
méthodes visant avant tout à maintenir le sujet dans un état aussi tolérable
que possible pour lui et son entourage.
La médication psychotrope
- elle ne doit être utilisée
. qu'en cas d'échec des moyens psychologiques,
. pour une très courte période,
. quand les troubles de l'humeur sont au premier plan,
. en complément d'une aide psychologique,
- elle fait appel à un médicament anxiolytique ou à un antidépresseur.
- en sachant,
. que tous les produits sans exception, contrairement à ce qui est dit
souvent, entraînent une accoutumance (accoutumance qui est seulement plus ou
moins rapide ou contraignante suivant les cas),
. que cette médication ne fait que réduire certains effets désagréables du
stress, ne supprime pas la cause et qu'elle fragilise automatiquement
l'individu face aux problèmes rencontrés dans le présent ou dans le futur,
. que plus le recours à ces produits est prolongé, plus l'état
psychologique devient précaire et plus rare est la guérison.
En résumé, la prévention du stress en milieu professionnel est à la portée de la grande majorité des individus instruits de quelques données simples et leur consacrant quelque attention.
--------------------------------------------Pr A. Gaillard - Médecin Honoraire du CHU de Nantes
Un autre texte d'infos
Depuis de nombreuses années déjà, le mot " stress " est entré dans notre vocabulaire quotidien. Il arrive parfois que les enfants eux-mêmes l'utilisent lorsqu'ils se préparent à des épreuves scolaires.
Cette soudaine célébrité est-elle un phénomène de mode citadin ou répond-elle en fait à un problème de fond lié à notre époque ?
En fait, la notion n'est pas nouvelle et il est bien possible que notre civilisation génère davantage de stress qu'autrefois. Nous vivons dans un monde plus complexe, où les événements se déroulent à un rythme accéléré et exigent de nous des décisions plus rapides, où les exigences de performance sont élevées (ne pas y satisfaire peut nous marginaliser très vite), où les changements sont fréquents et les repères de moins en moins visibles.
DES ORIGINES DU MOT, DE LA NOTION DE STRESS
Le mot stress nous vient du latin " stringere " (serrer), puis du vieux français " estrece " qui signifiait " étroitesse, oppression ". Apporté en Angleterre par les envahisseurs normands, il a donné le mot " stress " qui a pendant longtemps, évoqué des phénomènes physiques de pression mécanique, comme par exemple la pression exercée sur une poutre ou une arche de pont.
Dans les années 50, un chercheur canadien d'origine hongroise, Hans Selye, dans un ouvrage intitulé " The stress of life ", applique pour la première fois le terme de stress aux phénomènes manifestés par des êtres vivants soumis à des agressions de l'environnement. A partir de ce moment, le terme va connaître une fortune croissante, sans doute en raison de son adéquation complète avec nos modes de vie contemporains.
QU'EST-CE EXACTEMENT QUE LE STRESS ?
On peut dire qu'il s'agit de la réponse de l'organisme en vue de s'adapter à toute demande de son environnement.
Le stress,
c'est tout ce qui se passe en vous lorsque vous devez faire face aux exigences
rencontrées sur votre chemin. C'est donc un processus normal et inévitable :
vivre normalement, c'est accepter de rencontrer des circonstances pouvant s'avérer
stressantes.
Les trois phases de réaction
La phase d'alarme
Elle correspond au stress aigu.
C'est ce qui se passerait par exemple si au cours d'une croisière en mer, vous tombiez dans l'eau glacée en pleine nuit. L'organisme mobilise alors instantanément ses défenses pour s'adapter très vite aux besoins de la situation : nager, crier, se repérer, chercher un endroit, un objet où s'accrocher.
La phase de résistance
Elle correspond à l'adaptation plus durable à la situation stressante. Exemple : personne n'a entendu vos appels et vous devez vous résigner à nager pour flotter, en attendant que l'on remarque votre absence et que l'on vienne à votre recherche. Durant cette phase, votre organisme fonctionne toujours de manière à répondre aux besoins, mais plus dans un esprit d'endurance que de performance.
La phase d'épuisement
Où les ressources de l'individu ne lui permettent plus de s'adapter à la situation. Par exemple : après plusieurs heures dans l'eau froide, votre température commence à baisser, vos muscles sont de plus en plus faibles, votre vigilance altérée et vous commencez à vous laisser couler.
Ces trois phases correspondent souvent à des aspects moins dramatiques de notre vie. Par exemple, en milieu professionnel : annonce d'un gros surcroît de travail (alerte), efforts importants pendant plusieurs jours pour le faire vite et bien (résistance), démoralisation face à la difficulté de mener la tâche à bien et besoin de se reposer (épuisement).
LES STRESSEURS
Le stresseur
est l'événement qui déclenche la réaction de stress. Il apparaît dans
votre environnement : votre voiture tombe en panne, une lettre de rappel
arrive, une dispute avec un collègue ou un conjoint survient, etc….
On note deux catégories de stresseurs :
Les événements de vie ou " stresseurs existentiels "
Mort d'un
conjoint
Divorce
Blessure ou maladie
Mariage
Arrivée d'un nouveau membre dans la famille
Conflits conjugaux répétés
Nouvel emploi
Licenciement
Retraite
Dette ou emprunt importants
Déménagement
Départ en vacances
Remarquons au passage que certains événements dits positifs (mariage, naissance d'un enfant) sont ravalés au rang de vulgaires stresseurs….choquant ? Peut être, mais cela nous rappelle avec justesse que ce qui compte en matière de stress, ce sont les efforts d'adaptation que va demander la situation nouvelle à l'individu ; or, la venue d'un enfant ou d'un nouveau conjoint nécessite des efforts adaptatifs importants même si ceux-ci sont censés se faire dans la joie.
Face à la même quantité de stresseurs, chacun va réagir très différemment, en partie d'ailleurs parce qu'il va les percevoir différemment en fonction de son vécu propre. Un exemple classique est celui du décès d'un proche. Si ce proche était une belle-mère tyrannique, le décès représentera alors peut être un soulagement plutôt qu'un stresseur.
Les petits tracas quotidiens
Ce sont eux surtout qui creusent le lit du stress. L'accumulation quotidienne d'une multitude de petites contraintes, irritations et frustrations. Celles-ci ne comportent isolément qu'un faible caractère stressant mais c'est leur répétitivité qui en font des stresseurs à prendre en considération, un peu à l'image de la goutte d'eau anodine en elle-même, mais qui finit par percer la pierre la plus résistante à force de tomber toujours au même endroit.
Ces stresseurs quotidiens sont de nature diverses :
- Les
contraintes ménagères (courses, ménage, repas à préparer)
- Les tensions interpersonnelles (petits conflits avec les proches)
- La pression horaire, stresseur le plus fréquemment mentionné (horaires
chargé, travail en temps limité, manque de temps pour se faire plaisir…)
- L'environnement physique (bruit répété, entassement, durée et conditions
de transports en milieu urbain).
CONSEQUENCES DU STRESS
Réactions psychologiques
Une question est fréquemment posée aux spécialistes du stress : quelle différence y a-t-il entre l'anxiété et la dépression ? Les rapports entre le stress et ces deux notions sont complexes, mais il semble bien que l'anxiété et la dépression puissent parfois être des conséquences directes du stress.
Pour simplifier, on peut dire que vous êtes stressé tant que prédomine l'aspect de réactivité aux événements : vous vous sentez tendu, agacé parce que votre travail vous stresse, mais en rentrant chez vous le soir, ou en week-end, ou même en partant en vacances, votre tension baisse parce que vous n'êtes plus soumis aux événements stressants. Mais au bout d'un certain temps, si vous êtes trop régulièrement stressé, vous risquez d'intérioriser ce stress et de glisser sensiblement vers l'anxiété : à ce moment, même si vous n'êtes plus en contact avec vos stresseurs, vous continuerez d'y penser et d'y réagir, de ruminer ou d'anticiper les stresseurs.
Ainsi, même en week-end ou en vacances, vous ne pourrez complètement vous détendre en songeant au travail qui vous attend. Enfin, encore un pas, et vous voilà en zone de tendances dépressives, vous dévalorisant, vous sentant incapable de faire face à vos stresseurs et ayant envie de tout laisser tomber.
Bien sûr, les choses ne sont pas toujours aussi simples mais les tendances sont bien là.
Le plus souvent, le sujet stressé n'en arrive pas à ces manifestations, mais présente des signes plus discrets de surcharge psychologique :
- irritabilité,
qui fait que l'on se sent vite agressé et énervé,
- perte de confiance en soi,
- baisse de la motivation,
- diminution de la créativité, de la mémoire ou de la concentration,
- augmentation du nombre d'erreurs commises.
Réactions physiologiques
Lorsque nous sommes soumis à un stresseur, notre organisme réagit souvent de lui-même, avant même que nous en soyons conscients. En ce sens, les réactions physiques de stress sont ce que l'on appelle des réactions " phylogénétiques ", c'est-à-dire héritées de notre espèce, et de son évolution au travers des âges.
Dans un stress, l'individu est le siège de réactions hormonales complexes. Celles-ci sont marquées dans un premier temps par la libération de ce que l'on a appelé " les hormones du stress ", adrénaline et noradrénaline, destinées à nous préparer à l'action physique, à nous permettre de " passer l'obstacle ".
Puis dans un second temps, si les stresseurs se maintiennent, les hormones cortico-surrénales entrent en action : elles sont destinées à favoriser notre endurance et notre résistance, à nous permettre de " tenir le coup ".
Toute cette chimie est parfaitement au point mais il arrive parfois que, trop sollicitée, elle dépasse ses objectifs ou se dérègle quelque peu. Le stress peut alors déboucher sur des maladies psychosomatiques. C'est le cas par exemple d'un grand nombre d'allergies et de maladies de peau, de l'asthme, mais aussi de certaines hypertensions artérielles et maladies coronariennes.
De façon plus quotidienne et anodine, des manifestations comme la fatigue et les tensions musculaires (dorsalgies), les troubles du sommeil, les palpitations et les sensations d'oppression thoracique, les colites, les spasmes digestifs et ulcères représentent le lot quotidien des populations urbaines stressées.
Réactions comportementales
Il est assez facile de déceler si une personne est stressée en observant sa façon de se comporter (ladite personne pouvant très bien ne pas avoir le sentiment de l'être). Sous la pression du stress, les individus adoptent en général des gestes vifs, plus précipités, marchent et parlent plus rapidement.
Un des symptômes du stress est souvent que les individus agissent comme sous le coup d'une urgence, là ou cela ne s'impose pas. C'est par exemple ce qui frappent les provinciaux en visite à Paris : tous les passants marchent dans la rue avec précipitation, alors que tous ne sont pas en situation d'urgence.
L'individu stressé adopte aussi des attitudes plus vite agressives ou hostiles en cas de contrariété ou de frustration. D'amusantes études ont été conduites sur des cabines de téléphone volontairement déréglées, pour observer à partir de quel moment le sujet agacé commençait à s'en prendre à la machine.
Des comportements plus complexes encore, comme le recours à l'alcool ou au tabac sont assez souvent corrélés au stress.
QUE FAIRE FACE AU STRESS ?
Le problème des réactions de stress vient avant tout du fait que ces réactions sont en grande partie innées, non contrôlées et souvent non conscientes et non identifiées.
Nous nous
apercevons en général beaucoup trop tard de nos symptômes de tension
physique, au moment où ils se sont accumulés : c'est en fin de journée ou
de semaine qu'apparaissent les maux de dos, maux de tête, maux de ventre,
sentiment de lassitude, de découragement, d'irritabilité, etc…
Alors, plus tôt on identifiera ses réactions de stress, mieux l'on pourra y faire face. Mais plusieurs obstacles existent : souvent, on ne prend même pas le temps d'écouter son corps. Par ailleurs, il n'est pas facile de s'avouer que les événements ont un impact émotionnel et physique sur nous.
Dire tout simplement : j'ai eu peur, j'ai été ému, j'en tremble encore est perçu parfois (surtout chez les hommes) comme un aveu d'infériorité. Toujours la même vieille équation erronée : être stressé, c'est être faible, manquer de maîtrise.
Alors, quelle est la solution ?
Mettre en place une réponse de relaxation instantanée
Au quotidien, ce peut être très simple :
- aussi
souvent que possible dans la journée, vérifier que l'on est installé, où
que l'on se trouve, de la manière la plus confortable possible ;
- respirer alors calmement pendant une ou plusieurs minutes pour relancer une
bonne ventilation ;
- essayer de relâcher les muscles de ses mâchoires, de ses épaules, de sa
nuque ;
- visualiser un spectacle agréable (un paysage que l'on aime) ou se dire tout
simplement intérieurement une phrase apaisante (" je me détends, je
prends soin de moi ").
Bien sûr, ceci est adapté aux petits stresseurs quotidiens et ne permet pas toutefois de traverser la vie dans un état de décontraction absolue, proche de la sérénité ou du zen !
Mettre en place des activités physiques et/ou intellectuelles régulières
Elles sont indispensables pour aider à l'évacuation de la tension accumulée au quotidien (travail, vie de famille). Rien de tel par exemple qu'une bonne heure de piscine, de chant, de yoga ou même une heure de thérapie pour libérer le trop plein et notamment résoudre le stress lié à des événements existentiels importants.
Chaque jour, il est important de se réserver quelques instants, même brefs, d'activité plaisante (téléphoner à un ami, lire quelques pages d'un bon livre, prendre un verre à une terrasse ensoleillée…).
Un des éléments clé pour faire face au stress est également le principe d'auto-observation.
Ainsi, pour mieux anticiper la réaction faut-il :
- ne pas en
nier l'existence (" Stressé, moi ? jamais ! ")
- en connaître correctement les mécanismes
- ne pas sous-évaluer sa propre personnalité en matière de stress, en surévaluant
le rôle des stresseurs (" C'est parce que j'ai une vie, un travail, un
conjoint, des enfants, etc… stressants. Sinon tout irait parfaitement bien !
").
POURQUOI SOMMES NOUS ANXIEUX ???
L'ANXIETE : UNE NECESSITE ABSOLUE
De la bactérie à l'homme, l'anxiété est une réaction automatique normale (réflexe) répondant à la présence d'un danger imminent auquel il convient de réagir (soit en fuyant ou en faisant face d'une quelconque façon) afin de préserver la vie de l'espèce. Il s'agit donc là d'un comportement fondamental dont l'objectif est d'activer l'organisme et le mettre en situation de se protéger contre l'agression ou la menace d'agression. A ce comportement sont associés plusieurs modifications physiques et psychologiques :
COMMENT L'ANXIETE SE TRADUIT-TELLE PHYSIQUEMENT ? Effets
biochimiques et neurologiques MECANISME MENTAL DE L'ANXIETE LES TROUBLES ANXIEUX Anxiété
généralisée
Les
effets sur le système cardio-vasculaire Les
effets sur le système respiratoire Les
autres effets physiologiques
Autrement dit, il va donc être difficile de se concentrer sur les tâches quotidiennes. La distraction, l'impossibilité à finir le travail en cours, le manque de concentration et les troubles de mémoire sont choses fréquentes. Lorsque le cerveau ne trouve pas la source extérieure du danger ou de la menace, il réoriente ses recherches. C'est alors que la personne en état d'anxiété se livre à un travail inconscient d'introspection et invente le danger : ainsi, " s'il n'y a rien à l'extérieur qui puisse me rendre anxieux, c'est qu'il doit y avoir quelque chose qui ne tourne pas rond avec moi " . Certaines personnes se disent alors qu'elles sont en train de mourir, de perdre le contrôle ou de devenir folles. Mais alors, s'il n'existe pas de danger ou de menace imminente, pourquoi se met-on dans un état d'anxiété ? Ces symptômes ne sont pas uniquement causés par la peur immédiate. Il semble que des événements liés à l'histoire de l'individu, à son environnement, son mode de vie puissent être en cause. Le stress, la re-souvenance d'événement traumatiques dans certains types de situations vont provoquer une augmentation de la production d'adrénaline et d'autres substances chimiques qui, de temps à autres, déclenchent les symptômes d'anxiété. Si les problèmes d'origine ne sont pas dénoués, il arrive même que les symptômes physiques causés par l'anxiété fassent peur à la personne concernée (c'est le cas dans les crises de panique). S'instaure alors une espèce de boucle infernale dont il est bien difficile de sortir. Selon la théorie psychanalytique, l'anxiété serait la manifestation d'un conflit inconscient, d'une crainte, d'un événement psychologique troublant qui s'est produit durant l'enfance ou l'adolescence. Chez certaines personnes, la manière dont elles ont appris à faire face de façon adaptée ou non aux événements difficiles de cette période de leur vie pourrait entraîner une prédisposition à l'anxiété, avec une réactivation automatique de celle-ci dès qu'une situation évoque l'événement traumatique premier. Les chercheurs en neurosciences quant à eux, soulignent l'importance de l'hérédité et de la biochimie du cerveau et mettraient en cause des déséquilibres biochimiques dans la prédisposition aux troubles anxieux.
· Passer un entretien pour l'obtention d'un poste (peur d'échouer, de ne pas être à la hauteur) ; · Retourner dans un magasin pour un problème d'article non conforme (peur de la confrontation, d'un éventuel conflit) ; · Passer devant une ou un groupe de personnes -salle d'attente, réunion, transports en communs, etc…- (peur d'être observé et jugé sur l'allure générale) ; · Aller aux toilettes publiques (peur de la saleté)
LE
TROUBLE PANIQUE Les symptômes des crises peuvent donc être nombreux et amènent fréquemment les personnes qui en sont victimes à consulter dans les disciplines aussi diverses que la médecine générale, la cardiologie, la pneumologie, l'O.R.L. ou les services d'urgence. En effet, la personne souffrant d'attaques de panique s'y oriente souvent, spontanément, en fonction de la nature des symptômes les plus intenses, même si l'on retrouve, en discutant avec elle, d'autres éléments constitutifs des crises. On ne
peut relier la survenue d'une attaque de panique à un traumatisme ou à
un facteur déclenchant précis. Ce court-circuit physiologique semble
plutôt être le produit de tout un ensemble de circonstances qui ont
fini par provoquer une " surstimulation ", voir un
dysfonctionnement du système nerveux autonome.
C'est la
plus fréquente des phobies. Les peurs agoraphobiques regroupent un ensemble de situations caractéristiques incluant le fait de se retrouver seul en dehors de son domicile ; d'être dans une foule ou dans une file d'attente ; sur un pont ou dans un autobus, un train ou une voiture. Les situations difficiles sont soit évitées (par exemple : restriction des voyages) soit subies avec une souffrance intense ou bien avec la crainte d'avoir une attaque de panique ou des symptômes à type de panique. L'évitement des situations génère à long terme une totale incapacité des personnes qui en souffrent à voyager, travailler ou assumer leurs responsabilités.
§ la
saleté, les germes (bactéries, virus, champignons, parasites) On
distingue de nombreuses formes de compulsions :
Bien que
certaines variables personnelles (expériences traumatisantes durant
l'enfance, traits de personnalité, troubles mentaux préexistants,
etc.) puissent augmenter la probabilité de développer un stress
post-traumatique, il semble que le facteur le plus déterminant soit la
gravité de l'événement vécu. § Des impression ou agissements soudains "comme si" l'événement traumatique allait se reproduire (incluant le sentiment de revivre l'événement, des illusions, des hallucinations et des épisodes dissociatifs (flash-back)). § Un sentiment intense de détresse psychique lors de l'exposition à des indices internes ou externes évoquant ou ressemblant à un aspect de l'événement traumatique (par exemple : dates anniversaires, le temps froid ou le temps chaud, la neige, certains endroits, certaines scènes à la télévision, certaines atmosphères, etc.). § Une réactivité physiologique lors de l'exposition à des indices internes ou externes pouvant évoquer ou ressembler à un aspect de l'événement traumatique. § L'évitement constant de tout ce qui pourrait être associé au traumatisme (pensées, sentiments, conversations) et la réduction nette de l'intérêt pour les activités importantes de la vie quotidienne de même que l'impression de devenir étranger aux autres et démuni de sentiments.
L'ANXIETE : LE PRIX A PAYER POUR LA LIBERTE
Nos philosophes contemporains se sont interrogés sur un tout autre aspect de l'anxiété : celui de son rapport à la condition d'homme libre. L'anxiété ne serait-elle pas le prix à payer pour entrer dans une société non plus traditionnelle mais démocratique et individualiste, société de compétition forcenée et société où la place de chacun n'est pas fixée à l'avance, où " chacun est condamné à être libre et maître de sa propre destinée" ? La " condamnation à la liberté " pourrait en effet s'avérer anxiogène car le fait d'être protégé par un groupe, d'y avoir une place précise, est en soi rassurant. Emile Durkheim, sociologue, constatait, lui, que le taux de suicide baissait en temps de guerre ou de luttes sociales car en période de conflit, l'individu semble retrouver un rôle à jouer et participe ainsi à une mobilisation collective. L'action et le renforcement de l'identité constituent donc sans nul doute un remède à l'anxiété (et à la dépression, son corollaire). Par rapport aux cultures qualifiées naguères de primitives, qui offrent un monde plus apaisant dès lors que les émotions y sont canalisées par des rites, des coutumes, des places assignées, il semble que l'homme moderne ne puisse plus bénéficier pleinement, quant à lui, du soutien du groupe et ait à porter désormais seul " le poids du monde et de sa condition |
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