Une nouvelle technique de soin pour les personnes souffrant
notamment de stress post-traumatique s'introduit peu à peu en France :
l'intégration neuro-émotionnelle par les mouvements oculaires (Eye Movement
Desensitization and Reprocessing), plus connue sous le sigle EMDR. La méthode
mise au point par la psychologue californienne Francine Shapiro consiste à
faire parler le patient du traumatisme vécu tandis qu'il suit des yeux la main
du thérapeute, déclenchant ainsi des mouvements oculaires rapides comparables
à ceux qui se produisent pendant les rêves. Il s'ensuit un travail
d'associations qui facilite le processus d'émergence de souvenirs refoulés.
|
|
Au Québec, province fréquemment à l'avant-garde en matière de techniques
thérapeutiques, le magazine en ligne
PasseportSanté.net se fait l'écho d'une conférence donnée par le Dr
David Servan-Schreiber*, qui a beaucoup contribué à la popularité de l'EMDR.
Les praticiens du Centre hospitalier de l'université de Montréal "se montrent
curieux face à cette technique ; un seul psychiatre y pratique l'EMDR pour le
moment, déclare le Dr François Lespérance, professeur à la faculté de médecine
de Montréal, mais il est question que d'autres soient bientôt formés."
A l'heure actuelle, "l'EMDR est surtout pratiquée en cabinet privé par des
psychologues et des psychothérapeutes certifiés, mais le milieu de la santé
s'y intéresse de plus en plus", note PasseportSanté.net. "Pour la
première fois, on m'a d'ailleurs demandé de l'enseigner à l'université de
Pittsburgh (Pennsylvanie), qui loge pourtant l'un des départements de
psychiatrie les plus conservateurs des Etats-Unis", annonce le Dr
Servan-Schreiber.
Devant l'intérêt manifesté par les patients, les professionnels de la santé
doivent répondre à la demande. "Depuis quelques années, signale le Dr
Lespérance, les gens que nous recevons en consultation sont de mieux en mieux
informés, surtout ceux qui viennent pour des troubles anxieux ou dépressifs.
Ils connaissent les différentes approches thérapeutiques, leurs avantages et
leurs limites." Au demeurant, en Amérique du Nord et en Europe, la demande de
thérapie associée à la technique de l'EMDR s'accroît sensiblement.
PasseportSanté.net cite le témoignage de la psychologue Judith Black.
"Cette spécialiste du syndrome de stress post-traumatique organise depuis dix
ans des formations avec la collaboration du EMDR Institute – où la pratique
fut élaborée. 'Pendant les sept premières années, souligne-t-elle, une
centaine de cliniciens ont suivi la formation. Depuis trois ans, c'est près de
300.'"
En France, l'Institut français d'EMDR affiche un succès comparable : quelque
500 professionnels ont été formés au cours des quatre dernières années. En
Allemagne et aux Pays-Bas, l'EMDR commence à être enseignée à l'université et,
au Royaume-Uni, elle est reconnue par le ministère de la Santé. Et même si
elle n'a pas été portée à la connaissance du grand public, l'EMDR a "déjà reçu
sa 'carte de compétence', signale le site québécois, les études étant assez
nombreuses pour attester de son efficacité dans les cas de syndrome de stress
post-traumatiques". D'autant qu'"on sait que ça marche", comme se plaît à
répéter à l'envi David Servan-Schreiber.
De son côté, le psychologue montréalais François Lesage fait part de son
expérience. Intervenant auprès des victimes d'agressions ou de traumatismes,
il pratique l'EMDR depuis 1997 et obtient de bons résultats avec cette
procédure, ayant constaté qu'elle "est efficace pour soigner les troubles
anxieux et les troubles phobiques – même s'ils sont en place depuis des
années". En revanche, mentionne-t-il, "ce n'est pas parce que le traumatisme
est liquidé que tout est réglé". Il prend soin de "préciser que l'EMDR n'est
pas une psychothérapie. C'est plutôt une technique qui peut s'avérer utile
dans le cadre d'une psychothérapie."
* Guérir le stress, l'anxiété et la dépression sans médicaments ni
psychanalyse (éd. Robert Laffont, 2003, éd. Pocket, 2005).
|