Voici une extrait d'un article paru sur le site
www.liberation.fr, pratiquant moi-même
le coaching je trouve très juste le regard porté par Pierre Coz sur le tsunami
de la relation d'aide. Bon à choisir entre le coaching, l'alcool, les
anti-dépresseurs ou les sectes de tout poils personnellement je pense que le
coaching est un bon moyen de soutien. Mes services de coaching proposent un
cycle de 5 séances, dans le but aussi d'éviter cette écueil. c'est un service
limité dans le temps qui permet de faire le point.
Pierre-alain Luthi
Pierre Le Coz, philosophe, juge sévèrement ce phénomène social:
«Plutôt qu'une mode, le coaching est une addiction»
Par Emmanuèle PEYRET
Des coachs de l'amour, maintenant, pour trouver l'âme soeur, régler ses
problèmes de couple, «gérer» une rupture, comme il existe des coachs pour
ranger sa maison, faire du sport, se sentir mieux dans sa pauvre tête, arrêter
de fumer, prendre ses médicaments. Plus un seul domaine de l'existence qui
échappe à la déferlante du coaching, ce qui, selon Pierre Le Coz, philosophe,
coauteur avec Roland Gori de l'Empire des coachs (Albin Michel,
2006), «annonce le danger de la perte de tout sens critique, par un
processus d'infantilisation généralisé des consciences». Une société
infantilisée, qui pense en termes de «développement personnel», de
«stratégies comportementales» et de capital à faire fructifier, en
amour comme ailleurs. Les coachs font recette auprès de cet homme post-moderne
dont le propre est d'être déprimé par son insuffisance. Se sentir heureux, à
la hauteur dans le privé comme dans le professionnel : promesse de coach. Si
l'on n'a pas réussi à séduire, c'est qu'on n'avait pas suffisamment musclé son
«estime de soi», qu'on ne s'est pas bien battu. Explications avec
Pierre Le Coz sur ces «nouveaux petits maîtres» du conformisme et du
contrôle social.
Que pensez-vous de ce nouvel avatar du coaching ?
Les coachs de la vie privée ne font jamais qu'appliquer à l'univers des
sentiments une barbarie terminologique que chacun utilise machinalement. Ils
parlent de l'amour et de la séduction comme les autres coachs, en termes de
gestion «de ressources psychiques», de «retours sur
investissement». L'autre tombe amoureux comme un client auquel j'ai réussi
à vendre une marchandise. Chez les coachs, le langage du management croise
toujours celui du sport. N'oublions pas que le terme «coach» (sinon les
pratiques) a été introduit en France par Aimé Jacquet. L'amour est une épreuve
de saut d'obstacles, qu'il faut aborder avec la mentalité du champion qui sait
«positiver» ses échecs.
Comment rendre compte de cette aliénation ?
Il existe en nous une propension à projeter sur un autre un savoir qui dépasse
nos capacités à nous comprendre nous-même. Toute la jouissance du coach vient
de ce qu'il sent qu'on lui prête volontiers ce savoir venu d'ailleurs, un
savoir qui dépasserait l'entendement ordinaire. Le succès du coaching tient à
cette illusion qu'un autre sait de moi ce que j'ignore et qui me serait
tellement important pour «réaliser mon être». Le coach sait y faire :
praticien souple du soin comportemental, il se montre chaleureux et interactif.
Moins intimidant, donc, qu'un psychanalyste, un prêtre ou un médecin
traditionnel.
Le coaching risque donc d'être plus qu'une simple mode...
On a cru au phénomène de mode dans les années 90. Mais aujourd'hui il faut se
rendre à l'évidence : le coaching a pris racine dans notre culture. C'est un
phénomène social tentaculaire dont nous aurions grand tort de minimiser le
potentiel de nuisance. Rappelons que les coachs sont loin d'avoir tous une
formation psychologique digne de ce nom. La plupart d'entre eux sont issus des
écoles de commerce ou sont d'anciens dirigeants d'entreprise.
Plutôt qu'une mode, le coaching est une addiction. Il nous libère de tout
(graisses, sucre, tabac, alcool, etc.), sauf de l'aliénation qui nous
assujettit à son altruisme managérial, parfaitement inculte et insipide.
Jusqu'à l'escroquerie intellectuelle ?
Le risque est réel. En France, jusqu'à une date récente, la manipulation
mentale avait trouvé, en guise de cheval de Troie, une appellation bien
sonnante, neutre et objective : celle de psychothérapeute. L'opinion publique a
pris conscience que le titre de psychothérapeute pouvait servir d'alibi à des
personnalités «charismatiques» aux intentions lucratives. Je pense que les
gourous vont quitter peu à peu le domaine de la psychothérapie pour investir
celui du coaching.
Quels sont les autres dangers du coaching, selon vous ?
On voit se dessiner les contours d'une société du conformisme généralisé, où
chacun est invité à donner son «libre consentement» à ce que l'on attend de lui
: être compétitif, performant, rentable, positif. La souffrance liée au travail
se trouve interprétée en termes de défaillance personnelle, de conflits
psychiques intimes. Manière cynique de faire l'impasse sur des facteurs de
désordre psychique tels que le rythme ou l'organisation du travail, ou un
salaire inadéquat à la besogne accomplie. Au pays des merveilles du coaching,
fini les «états négatifs» comme la tristesse, la conscience du
tragique ou le sentiment des limites de la condition humaine.