Qu’est-ce que la dyslexie ?
C'est un trouble du développement cérébral au cours de la vie fœtale, qui
concerne les voies nerveuses du langage. Il existe des fragilités
génétiques dans certaines familles dont les centres nerveux du langage
fonctionnent mal. Mais des maladies infectieuses ou des troubles survenant
durant la grossesse peuvent aussi altérer le développement du cerveau et
entraîner une dyslexie qui n'apparaîtra évidemment que des années
plus tard.
Pourquoi est-elle encore si méconnue ?
Le cerveau humain dispose de voies nerveuses spécifiques au langage oral et
écrit. Le fait que la « survie » dans nos civilisations dépende entièrement
de la culture écrite est un phénomène récent. C'est pourquoi la dyslexie
n'est connue que depuis la fin du XIXe siècle, soit depuis que l'école est
obligatoire dans la plupart des pays européens.
Quels sont ses symptômes de la dyslexie
?
Un enfant « normal », autour de 6 ans, apprend à lire en quelques mois. Un
enfant de 8 ans qui a fait deux ans d'école primaire dispose des clés
essentielles pour bien lire. Le dyslexique, lui, reste à la période
initiale du déchiffrage. Il lit lentement, fait des fautes phonétiques (de
sons) à la lecture et à l'écriture des mots. Son habileté n'évolue pas avec
le temps, il refait ces fautes, même lorsqu'il voit bien son erreur.
Pourtant, il comprend ce qu'il lit, pour l'essentiel. Il utilise son
intelligence, et aussi une grande concentration, fatigante, pour pallier sa
fragilité lexicale. Dans tous les cas, la lecture n'est pas automatique ;
l'enfant persiste à déchiffrer durant des mois, voire des années, comme
s'il débutait encore son apprentissage du langage.
Comment détecter la dyslexie ?
Dans 30 à 50% des cas, l'enfant présente un trouble du langage oral
avant d'être en âge d'apprendre à lire : les sons sont mal reproduits, les
phrases mal construites… Un orthophoniste va facilement détecter ces
faiblesses. L'enfant peut aussi avoir des difficultés d'attention et
d'organisation de son travail dès la grande section de maternelle.
L'apprentissage de la lecture nécessite de reconnaître la structure
phonétique des mots (les déchiffrer) et de les mémoriser. Un adulte dispose
de ces deux voies, alors que les dyslexiques peuvent être gênés dans
une voie plus que dans l'autre.
À partir de quel âge faut-il faire
preuve de vigilance ?
Dès l'âge de 3 ans, un trouble de l'attention, du langage oral, de
concentration, d'organisation de l'espace et du temps… doivent amener à
demander un bilan neuropsychologique. La plupart des orthophonistes peuvent
l'effectuer dans le cadre d'un dépistage de la dyslexie.
Dans la majorité des cas, c'est au cours du CP que l'apprentissage de la
lecture apparaît difficile, voire impossible. L'enfant est lent, laborieux,
il fait des fautes de son à la lecture comme à l'écriture et n'aime pas
lire parce que c'est particulièrement difficile pour lui.
Plus la dyslexie est appréhendée tôt,
moins l’enfant aura de difficultés à l’école
D'une part, l'enfant ne sera pas injustement considéré comme fainéant ou
distrait, voire déficient. D'autre part, une rééducation orthophonique
précoce (dès l'âge de 2 ans et demi / 3 ans) permet des exercices
salutaires qui vont éviter que l'enfant ne démissionne et ne rejette
l'apprentissage. Même si ces exercices n'évitent pas la dyslexie,
ils permettent de renforcer les compétences de l'enfant là où il a des
faiblesses. On va travailler sur sa « conscience phonologique », l'enfant
devant apprendre à jongler avec les sons entendus, dits et lus.
Quels sont les moyens mis en œuvre
aujourd’hui à l’école ?
L'école française a totalement nié la dyslexie (ainsi que les
troubles du langage oral, comme la dysphasie), jusque dans les
années 1990. Il existe aujourd'hui encore des maîtres qui pensent que la
dyslexie n'existe pas, que tout est psychologique. Ils mettent cela sur
le compte d'une absence de motivation. Les maîtres se sont aussi sentis
culpabilisés car ils pensent que les méthodes de lecture sont à l'origine
de la dyslexie, ce qui est faux. Depuis quelques années, le
ministère de l'Éducation nationale renforce le principe d'une collaboration
entre les instituteurs, les parents et les soignants.
Y a-t-il des facteurs aggravants ?
Un trouble d'attention, une hyperactivité motrice, et bien sûr tout ce qui
peut fragiliser la motivation scolaire de l'enfant, car le dyslexique
a besoin de plus de temps, de concentration, de courage, qu'un bon
lecteur. Cette épreuve est longue, très longue, elle se poursuivra souvent
même au cours des études professionnelles, universitaires ou autres.
Comment aider l’enfant à poursuivre une
scolarité normale ?
Des certificats médicaux circonstanciés permettent de sensibiliser les
professeurs, d'authentifier la difficulté du jeune, et de recourir à
l'obtention d'un tiers temps supplémentaire aux examens. Des professeurs
acceptent aussi d'interroger les dyslexiques oralement plutôt que
par écrit. Certains pays les autorisent même à s'adjoindre une secrétaire.
Que peuvent faire les parents ?
Ils ont la charge de défendre la notion du handicap relatif de leur enfant,
d'éviter toute décision injuste ou inutile, comme les redoublements que
l'on propose souvent dans ces cas. Ils doivent aussi aider l'enfant à gérer
son travail et faciliter tout ce qui passe par la lecture.
Surtout, surtout, ne pas en rajouter ! Il vaut mieux lire le devoir ou la
récitation à l'enfant, enregistrer un texte au magnétophone, oraliser au
maximum. Il s'agit de faciliter, non pas d'alourdir le travail de l'enfant
dyslexique.
* Le Dr Paul Messerschmitt est pédopsychiatre au sein de l'unité de
psychopathologie de l'enfant et de l'adolescent de l'hôpital Armand
Trousseau, à Paris. Il est aussi l'auteur de « Ils ne savent pas lire,
s'ils étaient dyslexiques ? » aux éditions Flohic.
Pour en savoir plus
Union nationale France dyslexie dysphasie (UNFDD)
Hôpital Armand Trousseau, 26 avenue du Docteur Arnold Netter, 75012 Paris.
Tél. : 01 43 35 31 05.
Fédération des associations de parents d'enfants dyslexiques (APEDYS) :
88 rue Charles-le-Bon, 59650 Villeneuve-d'Ascq.
Tél. : 0 820 207 507.
www.apedys.org
Association Corydis - centre de ressources documentaires
4/6 allée du brindeau. 75019 Paris.
Tél. : 01 42 08 62 65.
www.coridys.asso.fr
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