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Adolescent suicidaire rapport de stage ados suicide Suisse
romande adolescence, un rapport de stage de Celine Terraz sur la
problématique de l'adolescence en suisse romande. Plusieurs raisons motivent le choix de ce sujet de mémoire, elles sont dordre social, personnel et professionnel. La raison dordre social sexplique par le fait que jai vécu mon enfance et mon adolescence dans un village de montagne denviron 2'800 habitants. La petitesse de ce dernier permet dêtre facilement au courant de la vie des habitants. Les mariages, les naissances ou les décès sont généralement connus par les villageois, contrairement aux milieux citadins où la population vit plus anonymement. Pendant mon adolescence, jai été sensible et interpellée du nombre de décès par suicide. Je me suis demandée, pourquoi ces personnes avaient commis cet acte ? Et pourquoi elles avaient préféré la mort à la vie ? Ces interrogations sont restées sans réponse, camouflées par le silence régnant dans la famille et les proches. La raison dordre personnel rentre en ligne de compte par le fait que jai côtoyé des jeunes adultes dont la vie navait plus raison dêtre, ces conversations mont rendues perplexe, car cesser de vivre signifie mourir. La mort est un sujet peu abordé dans notre société ; elle est probablement appréhendée en raison des souffrances précédant la mort, du deuil traversé par les personnes vivant la séparation de lêtre aimé, et des interrogations philosophiques portant sur limmortalité de lâme. Le mal-être de ces jeunes adultes a suscité mes interrogations sur le suicide et les tentatives de suicide. La raison dordre professionnel découle des stages pratiques effectués pendant ma formation déducatrice spécialisée, où jai rencontré des adolescents parlant de leurs souffrances, de leur solitude et de leur désir de mort. Mise à part mon écoute, je ne savais pas quelle démarche entreprendre avec eux. Jai trouvé un bon écho auprès de mes collègues dans les institutions de stage, toutefois je les ai sentis aussi démunis que moi. Les deux points suivants abordent les buts de la recherche et la méthode de travail. Le site educh.ch qui développe trois aspects Education Formation et Emploi en Suisse romande. Les filières de formations sociales, la formation à distance et en ligne, la formation continue, la formation professionelle, l'éducation spécialisée et ses outils d'intervention, l'emploi dans le domaine social, Interventions éducatives dans les institutions et les familles. Vous trouverez aussi des annonces et des offres d'emploi en Suisse romande Educh.ch a maintenant passé sur une nouvelle version asp n'hésitez donc pas à la découvrir, Educh.ch est depuis 1997 un site consacré à l'éducation spécialisée, avec des services et des infos pour les professionnels et les amateurs de l'éducation :- Trouvez des articles et échangez des conseils et des renseignements sur les filières de formations sociales et professionnelles, l'éducation spécialisée, le travail d'éducateur spécialisé, le coaching, les écoles et l'emploi dans le dans le domaine social, les méthodes d'interventions éducatives dans les institutions et les familles, les soins des enfants et des personnes handicapées. Les formations, écoles, université dans le domaine éducatif etc. Ce site est consacré à l'intervention éducative, aux formations sociales, à la recherche d'emploi dans le domaine social en suisse romande. Vous pouvez vous inscrire pour obtenir des informations régulières, connaître les membres présents en ligne actuellement en cliquant ici. Questions, informations, emplois au 0900 000 143 (2,50 sfr/min. - Suisse uniquement) par ce numéro vous pouvez me contacter directement pour toutes infos sur la profession d'éducateur, les filières de formations, les institutions, dont vous pouvez trouver les adresses en ligne. Mode d'emploi du site
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TABLE DES MATIERES
Partie descriptive
1. Descriptifs des centres et unités daccompagnement
psychiatrique des adolescents suicidants dans le canton de Vaud
1. La répartition de la psychiatrie pour adolescents dans le canton de Vaud
2. Service Universitaire de Psychiatrie de lenfant et de lAdolescent (SUPEA)
à Lausanne
3. Centre Thérapeutique de Jour pour Adolescents (CTJA) à Lausanne
4. Unité dHospitalisation Psychiatrique pour Adolescents (UHPA) à Lausanne
5. Service Médico-Pédagogique (SMP) à Yverdon
6. Service de psychiatrie et psychothérapie denfants et dadolescents à Vevey
7. Service de Psychiatrie de lEnfant et de lAdolescent (SPEA)
à Nyon et Morges
2. Etude comparative des centres et unités daccompagnement psychiatrique des adolescents suicidants
dans le canton de Vaud
1. Les cadres institutionnelles
2. Les patients
3. Les prises en charge
Partie théorique
3. Le suicide
1. Genèse du suicide et définitions des termes spécifiques
2. Différents référentiels théoriques
4. Ladolescence
1. Définitions
2. Le développement pubertaire
3. Le développement psychologique
4. Lautonomie
5. Les conduites suicidaires chez ladolescent
1. Quelques statistiques
2. Les facteurs pouvant entraîner des conduites suicidaires
3. Des idées suicidaires au passage à lacte
Partie pratique
6. Intervention psychodynamique adaptée à des personnes
suicidaires
1. La composition dun cycle de réactions
2. Les niveaux de détresse
3. Le programme dintervention
4. Réflexions personnelles sur ce modèle
7. Réflexions sur lapproche éducative des adolescents à
conduites suicidaires
1. Situation dAlexandre
2. Prise en charge
3. Lobservation
4. Reconnaître la souffrance
5. Projet éducatif
6. Bilan de la prise en charge
7. Le besoin daide de laidant
Conclusion
Bibliographie
Annexes
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Plusieurs raisons motivent le choix de ce sujet de mémoire, elles sont dordre social, personnel et professionnel.
La raison dordre social sexplique par le fait que jai vécu mon enfance et mon adolescence dans un village de montagne denviron 2'800 habitants. La petitesse de ce dernier permet dêtre facilement au courant de la vie des habitants. Les mariages, les naissances ou les décès sont généralement connus par les villageois, contrairement aux milieux citadins où la population vit plus anonymement.
Pendant mon adolescence, jai été sensible et interpellée du nombre de décès par suicide. Je me suis demandée, pourquoi ces personnes avaient commis cet acte ? Et pourquoi elles avaient préféré la mort à la vie ? Ces interrogations sont restées sans réponse, camouflées par le silence régnant dans la famille et les proches.
La raison dordre personnel rentre en ligne de compte par le fait que jai côtoyé des jeunes adultes dont la vie navait plus raison dêtre, ces conversations mont rendues perplexe, car cesser de vivre signifie mourir. La mort est un sujet peu abordé dans notre société ; elle est probablement appréhendée en raison des souffrances précédant la mort, du deuil traversé par les personnes vivant la séparation de lêtre aimé, et des interrogations philosophiques portant sur limmortalité de lâme. Le mal-être de ces jeunes adultes a suscité mes interrogations sur le suicide et les tentatives de suicide.
La raison dordre professionnel découle des stages pratiques effectués pendant ma formation déducatrice spécialisée, où jai rencontré des adolescents parlant de leurs souffrances, de leur solitude et de leur désir de mort. Mise à part mon écoute, je ne savais pas quelle démarche entreprendre avec eux. Jai trouvé un bon écho auprès de mes collègues dans les institutions de stage, toutefois je les ai sentis aussi démunis que moi. Les deux points suivants abordent les buts de la recherche et la méthode de travail.
La tentative de suicide dun adolescent démontre un refus de vivre dans les conditions actuelles de sa vie. Sa souffrance est aux limites de linsupportable. La mort est pour lui plus intéressante que la vie. Quest-ce que le canton de Vaud met en place comme infrastructure pour le suivi de ces jeunes ? Comment en est-il arrivé là ? Quel est le rôle de léducateur dans laccompagnement ? Voilà trois questions qui minterpellent et guident cette recherche.
Jai désiré choisir un sujet de mémoire utile pour la suite de mon parcours professionnel en tant quéducatrice travaillant avec des adolescents. Utile, dans le sens que lélaboration de ce travail de diplôme permette dapprofondir mes connaissances : des services disponibles dans le canton de Vaud, des adolescents , de moi-même et moffre des pistes de travail. Concrètement, que puis-je faire pour éviter des conduites suicidaires ?
Cette recherche a aussi pour but de sensibiliser les familles et les professionnels sur la problématique des tentatives de suicide. Chacun dentre nous peut être confronté à des adolescents à conduites suicidaires.
Jai intitulé ce travail de recherche : Prises en charge des adolescents suicidants dans le canton de Vaud : descriptifs des centres et unités daccompagnement psychiatriques et réflexions sur lapproche éducative. Je tiens à préciser que ce mémoire traite seulement les tentatives de suicide visibles, cest-à-dire non déguisées au contraire de la prise de drogues, du manque de soin de sa personne ou encore de la prise de hauts risques mettant en danger la vie de ladolescent.
Ce travail comporte trois parties. La première est descriptive, elle présente tout dabord les services psychiatriques du canton de Vaud, puis létude comparative de ces derniers. Une deuxième partie, dite théorique, offre des informations sur le suicide, les tentatives de suicide, ladolescence et les conduites suicidaires chez ladolescent. Pour finir, je développe dans la partie pratique des pistes de travail concrètes pour léducateur.
Voici encore quelques données sur la présentation de ce travail. Premièrement, jai décidé dutiliser le masculin pour parler des adolescent(e)s à conduites suicidaires, même si ce comportement concerne davantage de filles. Deuxièmement, plusieurs tableaux sont présentés dans cette recherche ; si leur provenance nest pas citée, ils sont de ma création. Et troisièmement, je tiens à préciser quà des fins pratiques, jutilise des abréviations à la place de dénominations complètes. Pour plus de clarté, Voici une liste des abréviations avec leur signification :
AEMO : Action Educative en Milieu Ouvert
AI : Assurance Invalidité
ATEMA : Accueil et Traitement de lEnfant Maltraité et Abusé
CHUV : Centre Hospitalier Universitaire Vaudois
CPDJ : Centre Psychothérapeutique de Jour pour Enfants
CTJA : Centre Thérapeutique de Jour pour Adolescents
DAMPS : Division Autonome de Médecine Psychosociale
DPP : Division de Pédopsychiatrie
DSAS : Département de la Santé et de lAction Sociale
DUPA : Département Universitaire de Psychiatrie Adulte
GHRV : Groupement des Hôpitaux Régionaux Vaudois
HEL : Hôpital de lEnfance de Lausanne
PPP : Policlinique de Pédopsychiatrie
SEI : Service Educatif Itinérant
SES : Service dEnseignement Spécialisé
SMP : Service Médico-Pédagogique
SPC : Service Psychiatrique Centre
SPEA : Service de Psychiatrie de lEnfant et de lAdolescent
SPJ : Service de Protection de la Jeunesse
SUPEA : Service Universitaire de Psychiatrie de lEnfant et de lAdolescent
SUPG : Service Universitaire de Psychogériatrie
UHPA : Unité dHospitalisation Psychiatrique pour Adolescents
UMSA : Unité Multidisciplinaire de Santé des Adolescents
Partie descriptive
Elle comprend la présentation des centres et unités daccompagnement psychiatrique du canton de Vaud et leur étude comparative. Jai choisi ce canton car cest mon lieu de vie et de formation. En outre, il me semble important, en tant que future professionnelle, de connaître les services avec lesquels je serai amenée à collaborer. Ils offrent tous une prise en charge psychiatrique. Il en existe sûrement dautres, mais je me suis basée uniquement sur les services qui organisent la psychiatrie vaudoise et dépendent du Département de la Santé et de lAction Sociale (DSAS).
Pour permettre ces descriptifs, jai constitué un questionnaire (cf. annexe 1) interrogeant les services sur le cadre institutionnel, les patients et les prises en charge. Jai chois ces trois points afin de découvrir au mieux les structures et leurs prestations.
Le canton de Vaud est divisé en quatre secteurs psychiatriques, jai donc envoyé un questionnaire aux responsables de chaque secteur. Après une analyse des réponses obtenues, jai organisé un entretien avec ces différentes personnes pour compléter les informations. Une copie du descriptif leur a été envoyée par la suite, pour leur permettre dapporter leurs corrections.
A la suite des descriptifs, jai élaboré une étude comparative en reprenant chaque élément décrit. Elle permet dune part, une analyse des services afin de mettre en évidence les différences et les similitudes, et dautre part de réfléchir sur les prises en charge médicales.
Partie théorique
La partie descriptive a entraîné quelques interrogations. Pour comprendre au mieux les conduites suicidaires et le travail effectué par les services présentés, jai décidé de mappuyer sur une littérature spécifique à ces comportements. Cette partie théorique comporte le suicide, ladolescence et les conduites suicidaires chez ladolescent.
Tout dabord je présente quelques référentiels théoriques sur le suicide. Il me semble important de rappeler divers points de vue ayant traversé notre siècle. Ensuite, je mattache à développer ladolescence et toutes les modifications que cette période implique chez lindividu. Nous ne pouvons pas appréhender les tentatives de suicide sans prendre en compte le processus développemental de cette période de la vie. Pour finir, jaborde les conduites suicidaires chez les adolescents.
La partie pratique
Cette dernière partie a pour but doffrir des pistes de travail aux éducateurs. A la suite de lapport théorique, je me suis demandée quel était le rôle des éducateurs ? Jai don cherché une littérature spécifique à lapproche éducative. Comme je nai pas trouvé douvrage écrit par des éducateurs sur laccompagnement dadolescents suicidaires, jai décidé de présenter le modèle dintervention psychodynamique de J. Mercier. Les propos sont adressés à tous ceux qui se préoccupent des personnes présentant des comportements violents et suicidaires. En plus, lélaboration de cette recherche, a affiné mes positions sur laccompagnement dadolescents suicidaires ; cest pourquoi je termine ce travail en développant quelques réflexions personnelles sur lapproche éducative.
1
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Descriptifs
des centres et unités daccompagnement psychiatrique des adolescents suicidants
dans le canton de Vaud
Introduction
Ce chapitre décrit les centres et unités daccompagnement psychiatrique des adolescents suicidants dans le canton de Vaud. Ce travail permet de relever les possibilités de prises en charge, dès quils ont reçu les soins somatiques par un hôpital après leur passage à lacte. Nous verrons ensuite les services et leurs prestations. Une liste dadresses des différentes structures se trouve en annexe (cf. annexe 2, 3).
Les centres et unités présentés sont : Le Service Universitaire de Psychiatrie de lEnfant et de lAdolescent (SUPEA), lUnité dHospitalisation Psychiatrique pour Adolescents (UHPA), le Centre Thérapeutique de Jour pour Adolescents (CTJA), le service de psychiatrie et de psychothérapie denfants et dadolescents à Vevey, le Service Médico-Pédagogique (SMP) et le Service de Psychiatrie de lEnfant et de lAdolescent (SPEA).
Chaque structure, mis à part le SUPEA, est présentée en trois points : le cadre institutionnel, les patients et la prise en charge. Je tiens aussi à préciser que seulement le troisième point est spécifique aux adolescents suicidants. Le SUPEA, quant à lui, est uniquement lorgane dirigeant dune quinzaine de services qui soccupent denfants et dadolescents, dont le CTJA et lUHPA. De ce fait, la présentation de ce service diffère, elle comporte : le cadre institutionnel, les buts des services et la prise en charge. Les informations sur le SUPEA sont tirées, non seulement des réponses du questionnaire mais aussi dun document écrit par O. Halfon et F. Ansermet, qui sintitule : " Projet de service SUPEA-DPP "
Ce chapitre est introduit par quelques informations sur la répartition de la psychiatrie pour adolescents dans le canton de Vaud, ensuite les services sont présentés individuellement. Je nai pas écrit de conclusion à la fin de ces descriptifs, afin déviter une répétition des éléments cités dans létude comparative qui forme le chapitre suivant.
1. La répartition
de la psychiatrie pour adolescents dans
le canton de Vaud.
Le canton de Vaud est divisé en quatre secteurs psychiatriques (cf. annexe 4) : les secteurs Centre, Nord, Est et Ouest.
Tous les centres dutilité publique en matière de prise en charge dadolescents sont sous lautorité du DSAS. Les secteurs psychiatriques Centre, Nord et Ouest sont sous la direction des institutions, elle-même dirigée par les Hospices Cantonaux qui dépendent du DSAS. Par contre, le secteur psychiatrique Est dépend du Groupement des Hôpitaux Régionaux Vaudois (GHRV). Toutefois, il a été mandaté par le DSAS pour soccuper de cette partie du canton de Vaud. Jai crée cet organigramme à partir des données de chaque service
Tableau 1 : Organigramme des secteurs psychiatriques du canton de Vaud
1.1 Possibilités de prise en charge
Il existe plusieurs possibilités de prise en charge des adolescents suicidants dans le canton de Vaud, à partir des soins somatiques administrés aux urgences des hôpitaux ; lhospitalisation, le placement non médical avec ou sans suivi thérapeutique, et le retour à domicile avec ou sans suivi thérapeutique. Afin dêtre plus explicite, le graphique ci-dessous illustre ces trois possibilités. Volontairement, je ne cite pas tous les médecins et foyers susceptibles de les prendre en charge, mais uniquement les services psychiatriques ; afin de les faire connaître.
Tableau 2: Possibilités de prise en charge des adolescents suicidants dans le canton
de Vaud.
FOYERS MAISON
UHPA (Secteur Centre) SUPEA (Secteur centre)
Hôpital de Cery (Secteur Centre) CTJA (Secteur centre)
Hôpital de Bellevue(Secteur Nord) PPP (Secteur Est)
Hôpital de Nant (Secteur Est) SPEA (Secteur Ouest)
Hôpital de Prangins (Secteur Ouest) SMP (Secteur Nord)
Médecins traitants
Lorsque ladolescent présente des troubles psychiatriques sévères, une hospitalisation est organisée avec ou contre son gré. La seule structure fermée spécifique pour les adolescents en état de crise dans le canton de Vaud est lUHPA, située à Lausanne. Etant donné la capacité daccueil restreinte de lUHPA et du nombre de demandes, ladolescent peut être accueilli dans un hôpital psychiatrique de sa région, cest-à-dire : lhôpital psychiatrique de Cery (secteur centre), lhôpital psychiatrique de Bellevue (secteur Nord), lhôpital psychiatrique de Nant (secteur Est) et lhôpital psychiatrique de Prangins (secteur Ouest). Ce dernier cas de figure reste tout de même peu fréquent. Les quatre hôpitaux interrogés ont estimé laccueil dadolescents, tous diagnostics confondus, entre cinq et dix par année.
Une tentative de suicide dénote une souffrance chez ladolescent qui peut être liée à des problèmes familiaux. Dans ces cas-là, le Service de Protection de la Jeunesse (SPJ) est informé et organise avec le médecin de lhôpital un placement dans un foyer éducatif.
Parfois, un placement suffit à répondre à la tentative de suicide. Toutefois, il peut savérer judicieux dorganiser un accompagnement thérapeutique. Dans ce cas, les structures susceptibles de suivre ladolescent sont : le SUPEA et le CTJA (secteur Centre), le SMP (secteur Nord), la Policlinique de Pédopsychiatrie (PPP) (secteur Est) et le SPEA (secteur Ouest). Ladolescent peut aussi être suivi par un médecin traitant privé.
La troisième possibilité est le retour à domicile avec ou sans suivi thérapeutique, cependant cet accompagnement est ardemment conseillé par les médecins ayant suivi ladolescent à lhôpital. Les structures susceptibles doffrir ce suivi thérapeutique sont les mêmes que pour le placement non médical.
2. Service
Universitaire de Psychiatrie de lEnfant et de
lAdolescent (SUPEA) à Lausanne
Le SUPEA et la Division de Pédopsychiatrie de lHôpital de lEnfance (DPP) organisent la pédopsychiatrie publique du secteur centre. De ce fait, ils font partie du Service Psychiatrique Centre (SPC).
Ces deux services, distincts sur le plan administratif et qui travaillent en coordination sur le plan clinique, sont divisés en trois unités, présentées ci-dessous : les unités A, B et unités transverses (cf. annexe 3). Chaque unité est sous la responsabilité dun professeur. Environ 180 personnes travaillent, à temps complet ou partiel, dans ces trois services.
Lunité A
Cette unité regroupe les services suivants :
Jai choisi de décrire spécialement dans cette recherche le CTJA et lUHPA, car ils accueillent spécifiquement des adolescents.
Lunité B
Lunité B regroupe les services suivants :
Les unités transverses
Les unités transverses regroupent les services suivants :
Les buts du SUPEA et de la DPP sont doffrir des soins de pédopsychiatrie pour le secteur centre du canton de Vaud, de former des professionnels et de faire de la recherche. Ces soins peuvent être offerts au travers de consultations ambulatoires, dhospitalisations et du service de garde.
La formation des professionnels est diverse. Il existe une formation prégraduée et une formation postgraduée. La formation prégraduée, comme lintitule le SUPEA, se déroule sur deux jours et met laccent sur les présentations cliniques de patients. En ce qui concerne la formation postgraduée, elle regroupe les formations clinique, didactique et personnelle. La formation clinique se donne au travers du travail clinique direct et des supervisions par le chef de clinique et le médecin-cadre. La formation didactique se passe sur deux ans, à raison de deux heures par semaine. Les thèmes des cours sont spécifiques à la psychiatrie et la psychothérapie denfants et dadolescents. La formation personnelle regroupe les thèses, travaux de synthèse clinique théorique et de recherche et les supervisions individuelles de psychothérapies.
Les recherches font partie des buts des deux services. Elles sont nombreuses et se basent essentiellement sur des problèmes liés au développement de lenfant et de ladolescent.
Etant donné le nombre important des prises en charge de tous les services, dirigés par le SUPEA, je me suis attachée à décrire uniquement les possibilités de prise en charge dun adolescent suicidant à la suite des soins somatiques offerts par le service des urgences du CHUV.
Lors dune tentative de suicide, le service des urgences du CHUV appelle pour les 13 à 16 ans, soit le service de pédopsychiatrie de liaison du CHUV ou le service de garde du SUPEA et de la DPP. Pour les adolescents de 16 à 18 ans, les urgences contactent la Division Autonome de Médecine Psychosociale (DAMPS). Le service appelé se déplace, et fait une évaluation de la situation avec le patient, et si possible ses parents. Il apprécie si le désir de mort est présent ou si la situation sest momentanément calmée. Ensuite, le médecin de lhôpital tient compte de lavis du consultant du service pour mettre en place la suite de la prise en charge. Elle peut différer dun adolescent à lautre ; elle dépend des risques suicidaires, de leur contexte social et des facteurs déclenchants de la tentative de suicide. Par exemple, si ladolescent refuse un accompagnement thérapeutique et présente des risques de récidive, lhôpital se doit dorganiser une hospitalisation en milieu psychiatrique contre son gré. En définitive, les possibilités de prises en charge de ces adolescents sont nombreuses, nous pouvons cependant les regrouper en trois catégories : suivi des adolescents au domicile, hospitalisés, ou placés dans un foyer.
Le retour à domicile est accordé lorsque le contexte familial nest pas pathogène, que ladolescent ne présente pas de signe de récidive et de psychopathologie sévère. Si un de ces critères nest pas rempli, ladolescent peut être placé dans un foyer. Toutefois, une hospitalisation est possible pour les adolescents à risque de récidive et dotés dune psychopathologie sévère.
Voici les diverses prises en charge possibles (cf. tableau 3, p. 13) :
- avec un suivi thérapeutique par un des services du SUPEA, cest-à-dire les consultations du
Bugnon, de la Passerelle ou du service de Pédopsychiatrie de liaison du CHUV pour une
continuité de la prise en charge après lévaluation ;
- avec un suivi thérapeutique par la DAMPS ;
- avec un suivi thérapeutique par un médecin traitant ;
- et prise en charge journalière par le CTJA ;
- sans suivi thérapeutique ;
- avec un suivi thérapeutique par un des services du SUPEA ;
- avec un suivi thérapeutique par la DAMPS ;
- avec un suivi thérapeutique par un médecin traitant ;
- et prise en charge journalière par le CTJA ;
- sans suivi thérapeutique ;
- à lUHPA ;
- à lhôpital de Cery, si plus de place à lUHPA.
Lapproche théorique
Généralement, les services du SUPEA prennent les patients en charge selon le modèle théorique psychodynamique de type psychanalytique, afin de comprendre la personne et agir au niveau des forces inconscientes. Toutefois, chaque service peut aussi se référer à dautres référentiels théoriques.
Tableau 3: Possibilités de prises en charge dun adolescent suicidant
dans le secteur Centre
3. Centre Thérapeutique de
Jour pour Adolescents
(CTJA) à Lausanne
Les locaux du CTJA se trouvent au sein de lhôpital psychiatrique de Cery à Prilly. Dans le courant de lannée 1998, il devrait déménager dans des locaux au centre de la ville de Lausanne pour en faciliter laccès. Le CTJA est un centre dutilité public dépendant des Hospices cantonaux, eux-mêmes dirigés par le DSAS.
Le centre est ouvert cinq jours par semaine uniquement la journée. De ce fait, les adolescents rentrent à leur domicile pour la nuit et les week-ends. LUHPA assure les urgences en cas dappel en dehors de heures douverture du centre.
Buts du centre
Une des missions du centre est doffrir des soins de pédopsychiatrie au travers dun traitement et de lélaboration dun projet individuel avec ladolescent et, si possible sa famille. La prise en charge permet de dégager des hypothèses psychodynamiques et dévaluer le contexte familial, psychosocial et scolaire. Lunité a aussi pour but de former des professionnels, tels que médecins, infirmiers, éducateurs, etc.
Financement
Lunité est entièrement financée par lEtat de Vaud et la Confédération. Les factures pour les prestations au client sont envoyées à la caisse maladie ou lAssurance Invalidité (AI), qui les prend en charge. Une participation de 10%, plus éventuellement la franchise sont facturées par la caisse aux parents. LAI prend en charge les psychothérapies des personnes dont les séquelles gêneraient considérablement ou rendraient impossibles la formation ultérieure et lexercice dune activité lucrative. En outre, pour bénéficier de cette aide financière, un traitement spécialisé intensif a dû être appliqué pendant une année, sans apporter damélioration suffisante.
Léquipe pluridisciplinaire
Léquipe pluridisciplinaire est composée de treize collaborateurs à temps partiel ou complet : un chef de clinique adjoint, un médecin chef, un médecin associé, deux psychologues, une infirmière, un assistant social, deux éducateurs, un stagiaire éducateur, deux enseignants spécialisés et une secrétaire.
Fonctionnement du centre
Le fonctionnement du centre comprend les colloques entre collaborateurs, le travail en réseau, lencadrement des personnes en formation, les supervisions et le règlement de base pour les patients.
Léquipe des collaborateurs se retrouve une fois par semaine pour un colloque. Cette rencontre pluridisciplinaire fait partie du système de communication. Elle permet tout dabord des discussions dordre administrative, la présentation des nouvelles situations ou demandes en cours et le choix des admissions. En plus, le colloque est utilisé pour transmettre des informations au reste de léquipe des événements marquants concernant un adolescent, et les comptes rendus des différents entretiens individuels ou en famille. Si nécessaire, les collaborateurs ont à disposition, un espace de réflexions cliniques à partir dune situation dun adolescent, présentée par un collègue et un espace de réflexions théoriques. Les synthèses (bilan des patients) peuvent être aussi organisées au sein des colloques. Par ailleurs, les informations circulent au travers de documents écrits, ou oralement, de manière formelle et/ou informelle.
Le CTJA travaille en réseau afin de regrouper des professionnels pour débattre un thème précis rencontré dans leur pratique professionnelle et pour regrouper des personnes en liaison autour dun patient.
Lencadrement des personnes en formation se fait au travers dentretiens avec un référent de léquipe du même corps de métier, de séminaires, de vidéos, de psychodrames individuels et de supervisions.
Le CTJA fixe doffice une supervision pour léquipe pluridisciplinaire tous les quinze jours.
Les moyens pour évaluer et mesurer le travail des collaborateurs sont les supervisions et les fiches dévaluation. Lors des supervisions, les thérapeutes peuvent analyser, avec laide dune personne extérieure, la prise en charge thérapeutique. Cet éclairage permet de réajuster éventuellement la prise en charge. Les fiches dévaluation permettent de suivre lévolution du patient.
Le centre est un lieu où les patients vivent, mangent, jouent et suivent des activités ; cest pourquoi ils sont soumis à un règlement de base pour le bon fonctionnement du centre.
1. Lintroduction et la consommation de drogue, dalcool ou de médicament est strictement interdite (les traitements médicamenteux sont décidés exclusivement par les médecins du
CTJA).
2. La violence physique nest pas tolérée.
3. La possession dobjets dangereux est interdite (léquipe se réserve le droit de juger quels
objets sont dangereux).
4. Léquipe se réserve en tout temps le droit de prendre des mesures quelle juge nécessaires à la sécurité dun adolescent et/ou au bon fonctionnement de lunité (fouille, tests sanguins ou
urinaires, confiscation dobjets, autorisation de sortie).
5. La présence au CTJA est obligatoire dans le cadre de lhoraire défini pour chaque
adolescent.
3.2 Les patients
Le CTJA accueille des adolescents de 13 à 18 ans. La clientèle est composée dun plus grand nombre de filles que de garçons ; environ deux tiers de filles pour un tiers de garçons. Comme le centre a ouvert ses portes lannée précédente, nous ne pouvons pas donner le nombre dadolescents suivis par année. Toutefois, de juin à décembre 1997, le nombre de patients pris en charge sélève à 16 adolescents. La capacité daccueil du CTJA est dune quinzaine dadolescents par jour.
Les patients accueillis sont des adolescents souffrant de syndromes psychiatriques aigus et de divers problèmes psychologiques. Les syndromes psychiatriques aigus survenant à ladolescence sont des troubles graves de lhumeur, des épisodes dépressifs majeurs, des décompensations psychotiques, des tentatives de suicide, des anorexies mentales stabilisées, des états limites, des décompensations névrotiques sévères, etc.
Les troubles psychologiques sont des troubles du comportement, des problèmes scolaires, des conflits familiaux, des troubles fonctionnels, etc. La prise en charge par le CTJA est demandée lorsque les troubles de ladolescent justifient un encadrement spécialisé en institution.
Les patients sont toujours adressés sur indication médicale. Elle peut provenir des médecins traitants, des hôpitaux, du SUPEA, de lUHPA, du SMP, de la Policlinique de Pédopsychiatrie (PPP) ou du SUPEA. Dans le secteur centre, si ladolescent suicidant est pris en charge par le CHUV pour les soins somatiques, il peut être adressé au CTJA par le service de Pédopsychiatrie de liaison ou la DAMPS, qui aura effectué une consultation à lhôpital.
Les procédures dadmission des adolescents ayant fait une tentative de suicide ne diffèrent pas des autres demandes de prise en charge. Voici la procédure dadmission pour le CTJA.
Procédure dadmission
1. Une demande est faite après indication médicale.
2. Létude de la demande est faite en colloque, léquipe prend la décision daccepter ou de ne pas accepter la demande en fonction des places disponibles et de la situation.
3. Un premier entretien a lieu avec un médecin.
4. Un deuxième entretien a lieu avec le médecin, le ou la référent(e) et un autre collaborateur par exemple : éducateur, infirmier ou ergothérapeute. Lors de cet entretien, il est décidé si oui ou non ladolescent viendra quinze jours à lessai.
5. Durant ce temps dessai, le jeune peut découvrir le centre, et léquipe peut faire une
évaluation de son état psychique, de ses capacités évolutives, de son mode de
fonctionnement et des possibilités de mobiliser la famille.
Les moyens de prise en charge
Les moyens utilisés pour le suivi des adolescents sont résumés en huit points :
1. Des entretiens individuels et familiaux en présence du médecin et du référent.
Pendant ces moments-là, des projets de soins sont établis avec le patient et ses proches si cela est possible. Ce projet est individuel et propre à chaque patient. Il permet délaborer un programme pour ladolescent comprenant une psychothérapie et différentes activités du centre.
2. Une psychothérapie individuelle dinspiration psychanalytique prise en charge par les
médecins et les psychologues.
3. Un support médicamenteux peut être offert pour diminuer certains symptômes
de la psychopathologie.
4. Des réunions collectives entre les adolescents et les soignants permettent dapprofondir des questions liées à la vie de groupe. Ces réunions ont lieu une fois par semaine.
5. Des psychodrames de groupe ont lieu une fois par semaine. Ils sont utilisés par les
thérapeutes pour permettre aux patients de faire un lien entre les difficultés ressenties dans
les scènes jouées et les difficultés quils rencontrent dans leur vie.
6. Des ateliers proposant des activités manuelles ou socioculturelles. Ces activités ont pour but de structurer les journées, de motiver les adolescents à sinvestir et à découvrir une activité dans le but dune réadaptation sociale.
7. Une évaluation pédagogique et scolaire faite par lenseignant de lunité en coordination avec les référents de ladolescent. Le but de cette évaluation est de favoriser une intégration scolaire ou professionnelle dans les meilleures conditions possibles.
8. Un bilan socio-familial fait par lassistant social permet dévaluer les ressources de
lentourage et de la famille.
La durée moyenne dun traitement est dune année. Elle dépend de la sévérité de la pathologie. A la suite de son séjour au CTJA, ladolescent peut être suivi par un des thérapeutes du CTJA, par son médecin traitant ou un autre thérapeute, selon son libre choix.
Lapproche théorique
Le CTJA prend en charge les patients selon le modèle théorique psychodynamique. Mais une collaboration est aussi recherchée avec les familles et une intervenante extérieure au CTJA, dont le référentiel théorique est le modèle systémique.
Le réseau de collaboration du CTJA
Les relations du centre avec lextérieur sont nombreuses : le CTJA travaille avec le service de Pédopsychiatrie de liaison, la DAMPS, le SUPEA, les hôpitaux, et le secteur privé des professions médicales et sociales. En outre, il collabore avec le SPJ, lUnité Multidisciplinaire de Santé des Adolescents (UMSA), lAction Educative en Milieu Ouvert (AEMO), les institutions spécialisées accueillant des adolescents, les écoles, les gymnases, le Service dEnseignement Spécialisé (SES), le tribunal des mineurs, les personnes faisant partie de lentourage du patient, les sociétés sportives, musicales et artistiques, etc.
En ce qui concerne les adolescents suicidants pris en charge dans des foyers, une collaboration est recherchée entre le milieu socio-éducatif et le CTJA pour lélaboration dun projet de soins commun. Le CTJA a besoin des foyers pour certaines situations et les foyers sollicitent le CTJA pour des prises en charge.
4. Unité
dHospitalisation Psychiatrique pour
Adolescents (UHPA) à Lausanne
LUHPA est une structure de soins de pédopsychiatrie à temps complet pour les adolescents en état de crise. Elle est située dans le bâtiment hospitalier du CHUV. Cette unité récente date de 1997. LUHPA est un centre public dépendant des Hospices cantonaux, eux-mêmes dirigés par le DSAS.
Le service est ouvert 24h/24h, toute lannée. Cependant, pour des raisons de sécurité, le libre accès des adolescents à lextérieur peut être autorisé ou interdit par léquipe pluridisciplinaire.
Buts du service
Une des missions du service est doffrir des soins de pédopsychiatrie au travers de traitement et délaboration dun projet individuel avec ladolescent et si possible sa famille. La prise en charge permet entre autre de contenir ladolescent de dégager des hypothèses psycho-dynamiques et dévaluer le contexte familial, psychosocial et scolaire. Lunité a aussi pour but de former des professionnels, tels que médecins, infirmiers, éducateurs, etc.
Financement
Lunité est entièrement financée par lEtat de Vaud et la Confédération. Les factures pour les prestations au client sont envoyées à la caisse maladie.
Léquipe pluridisciplinaire
Léquipe pluridisciplinaire est composée de quatorze collaborateurs à temps partiel ou complet : un chef de clinique, un médecin associé, un médecin assistant, une psychologue, cinq infirmiers, un assistant social, un éducateur, un enseignant spécialisé, une ergothérapeute et une secrétaire, dont la plupart travaille à temps partiel.
Fonctionnement du service
Le fonctionnement du service comprend les colloques entre collaborateurs, le travail en réseau, lencadrement des personnes en formation, les supervisions, les moyens dévaluation et le règlement de base pour les patients.
Léquipe des collaborateurs se retrouve une fois par semaine pour un colloque. Cette rencontre pluridisciplinaire fait partie du système de communication. Elle permet tout dabord des discussions dordre administrative, la présentation des nouvelles situations ou demandes en cours et le choix des admissions. En plus, le colloque est utilisé pour transmettre les informations au reste de léquipe des événements marquants concernant un adolescent, et les comptes rendus des différents entretiens individuels ou en famille. Si nécessaire, les collaborateurs ont à disposition, un espace de réflexions cliniques à partir dune situation dun adolescent et un espace de réflexions théoriques. Les synthèses (bilan des patients) peuvent être aussi organisées au sein des colloques. Par ailleurs, les informations circulent aussi au travers de documents écrits ou oralement de manière formelle ou informelle.
LUHPA travaille en réseau afin de regrouper des professionnels pour débattre un thème précis rencontré dans leur pratique professionnelle et pour regrouper des personnes en liaison autour dun patient.
Lencadrement des personnes en formation se fait au travers dentretiens avec un référent de léquipe du même corps de métier, de séminaires, de vidéos, de psychodrames individuels et de supervisions.
LUHPA fixe doffice une supervision pour léquipe pluridisciplinaire tous les quinze jours.
Les moyens pour évaluer et mesurer le travail des collaborateurs sont les supervisions et les fiches dévaluation. Lors des supervisions, les thérapeutes peuvent analyser, avec laide dune personne extérieure, la prise en charge thérapeutique. Cet éclairage permet de réajuster éventuellement la prise en charge. Les fiches dévaluation permettent de suivre lévolution du patient.
Lunité est un lieu de vie où les patients vivent, mangent, jouent, dorment et suivent des activités ; cest pourquoi ils sont soumis à un règlement de base pour le bon fonctionnement du service.
1. Les sorties et visites sont accordées en fonction de la situation individuelle de chacun.
2. Les adolescents ne quittent pas lUHPA sans lautorisation des soignants. Ils indiquent lheure de retour.
3. Lintroduction et la consommation de drogue, dalcool ou de médicament est strictement interdite dans lunité (les traitements médicamenteux sont décidés exclusivement par les médecins de lUHPA).
4. La violence physique nest pas tolérée.
5. La possession dobjets dangereux est interdite (les soignants se réservent le droit de juger quels objets sont dangereux et pour qui).
6. Les relations sexuelles sont interdites.
7. Léquipe soignante se réserve en tout temps le droit de prendre des mesures quelle juge nécessaires à la sécurité dun adolescent et/ou au bon fonctionnement (fouilles, tests sanguins ou urinaires, confiscation dobjets, autorisation de sortie ou de week-end).
Lunité a planifié un horaire dheures de visite : du lundi au vendredi deux fois une heure par jour, le samedi pendant huit heures et le dimanche pendant six heures. Les heures peuvent être modifiées selon prescription du médecin.
LUHPA accueille des adolescents de 13 à 18 ans. La clientèle est composée dun plus grand nombre de filles que de garçons ; environ deux tiers de filles pour un tiers de garçons. Comme lunité a ouvert ses portes lannée précédente, nous ne pouvons pas donner le nombre dadolescents suivis par année. Toutefois, de juin à décembre 1997, le nombre de patients sélève à 35 adolescents, correspondant à 43 séjours. Lunité dispose de sept lits, de ce fait un maximum de sept adolescents peuvent être accueillis chaque jour.
Les patients accueillis sont des adolescents en état de crise souffrant de syndromes psychiatriques aigus et de divers problèmes psychologiques. Les syndromes psychiatriques aigus survenant à ladolescence sont des troubles graves de lhumeur, des épisodes dépressifs majeurs, des bouffées délirantes, des décompensations psychotiques, des tentatives de suicide, des anorexies mentales, des états limites, des décompensations névrotiques sévères, etc. Les troubles psychologiques sont des troubles du comportement, des problèmes scolaires, des conflits familiaux, des troubles fonctionnels, etc.
La prise en charge par lUHPA est demandée lorsque les adolescents sont en état de crise et nécessitent une hospitalisation.
Les patients sont toujours adressés sur indication médicale. Elle peut provenir des médecins traitants, des hôpitaux, du SUPEA, du SMP, de la PPP ou du SPEA. Dans le secteur centre, si ladolescent suicidant est pris en charge par le CHUV pour les soins somatiques, il peut être adressé à lUHPA par le service de Pédopsychiatrie de liaison ou la DAMPS, qui aura effectué une consultation à lhôpital.
Les procédures dadmission des adolescents ayant fait une tentative de suicide ne diffèrent pas des autres demandes de prise en charge. Voici la procédure dadmission pour le CTJA.
Procédure dadmission
1. Une demande est faite après indication médicale.
2. Si la demande est urgente, en fonction des places disponibles, le médecin peut prendre seul
la décision daccepter ou de ne pas accepter la demande. En général, les demandes dadmission sont présentées en colloque et léquipe prend la décision daccepter ou de refuser la demande.
3. Un entretien est organisé entre le médecin et les demandeurs.
4. Accueil du jeune au centre. Dès son arrivée, un médecin et un soignant seront ses référents.
Les moyens de prise en charge
Les moyens utilisés pour le suivi des adolescents sont résumés en neuf points :
1. Des entretiens individuels et familiaux en présence généralement du médecin psychiatre et
du référent. Pendant ces moments-là, des projets de soins sont établis avec le patient et ses
proches si cela est possible. Ce projet est individuel et propre à chaque patient. Il permet
délaborer un programme pour ladolescent comprenant une psychothérapie, différentes
activités, un planning des éventuelles visites, sorties, week-ends à lintérieur ou à
lextérieur de lUHPA, autorisations de téléphone, etc.
2. Une psychothérapie individuelle dinspiration psychanalytique donnée par les médecins
et les psychologues.
de la psychopathologie.
4. Des réunions collectives entre les adolescents et les soignants permettent dapprofondir des questions liées à la vie de groupe. Ces réunions ont lieu deux fois par semaine.
5. Des ateliers encadrés par léquipe soignante et lergothérapeute à travers des activités de médiations diverses, telles que des activités créatrices, atelier de contes, théâtre, sports,
sorties.
6. Une évaluation pédagogique et scolaire faite par lenseignant de lunité en coordination avec les référents de ladolescent. Le but de cette évaluation est de favoriser une intégration scolaire ou professionnelle dans les meilleures conditions possibles.
7. Un bilan socio-familial fait par lassistant social, concernant des activités à lextérieur avec dautres adolescents ou son lieu de vie hors de lunité. Ce bilan permet aussi dévaluer les
ressources de lentourage et de la famille.
8. Des activités sportives à lextérieur de lUHPA sont exigées au moins une fois par semaine.
9. Des activités de jeux ou de loisirs sont mises en place en accord avec léquipe soignante.
La durée moyenne dun traitement varie de deux semaines à six mois. Elle dépend de la sévérité de la pathologie. A la suite de lhospitalisation, ladolescent peut être suivi par un des médecins de lUHPA, par son médecin traitant ou par un autre thérapeute, selon son libre choix.
Lassistant social organise son retour à domicile ; cependant si ladolescent ne peut pas retourner vivre chez lui pour des raisons familiales, lassistant social met en place une procédure dadmission dans un foyer pour adolescents. Tout placement est organisé avec le SPJ.
Lapproche théorique
LUHPA prend en charge les patients selon le modèle théorique psychodynamique. Mais une collaboration est aussi recherchée avec les familles et une intervenante extérieure au CTJA, dont le référentiel théorique est le modèle systémique.
Le réseau de collaboration de lUHPA
Les relations de lunité avec lextérieur sont nombreuses, lUHPA collabore avec le service de Pédopsychiatrie de liaison, la DAMPS, le SUPEA, les hôpitaux, le secteur privé des professions médicales et sociales, le SPJ, lUMSA, lAEMO, les institutions spécialisées accueillant des adolescents, les écoles, les gymnases, le SES, le tribunal des mineurs, les personnes faisant partie de lentourage du patient, les sociétés sportives, musicales et artistiques, etc.
En ce qui concerne les adolescents suicidants pris en charge dans des foyers, une collaboration est recherchée entre le milieu socio-éducatif et lUHPA pour lélaboration dun projet de soins commun. LUHPA a besoin des foyers pour certaines situations et les foyers sollicitent lUHPA pour des hospitalisations.
5. Service Médico-Pédagogique (SMP) à Yverdon
Le SMP est un centre public situé au coeur dYverdon. Il est le service de pédopsychiatrie de la partie Nord du canton de Vaud. Le secteur dactivité du SMP recouvre 48% du canton de Vaud cest pourquoi les antennes de Payerne, Orbe, St-Croix et le Sentier à la Vallée de Joux se sont créées afin de mieux desservir la population. Toutes les demandes de consultation ou de traitement pour le Nord vaudois sont centralisées à Yverdon, car les différentes antennes dépendantes du SMP nont pas de secrétaire, mais sont uniquement des lieux de consultations. De ce fait, je décris principalement le service dYverdon. Le SMP est un centre public dépendant des Hospices cantonaux, eux-mêmes dirigés par le DSAS.
Le SMP est ouvert du lundi au vendredi aux heures de bureau. Le service de garde médicale de la région assure les urgences lors dappel en dehors des heures douverture du service.
Buts du service
Une des missions du service est doffrir des soins de pédopsychiatrie au travers de consultations : dinvestigation pour les parents et les enfants confrontés à des difficultés psychologiques chez lenfant, de guidance (conseil) pour les parents, et en pédiatrie aux hôpitaux de la région sur demande du médecin de lhôpital. En outre, le service fait des bilans psychologiques, offre des traitements logopédiques et différentes formes de prises en charge thérapeutiques.
Les consultations permettent de dégager des hypothèses psychodynamiques et dévaluer le contexte familial, psychosocial et scolaire, afin de mettre en place une prise en charge thérapeutique individuelle et/ou familiale. Le service a aussi pour but de former des professionnels, tels que médecins, chefs de clinique et psychologues.
Financement
Lunité est entièrement financée par lEtat de Vaud et la Confédération. Les factures pour les prestations au client sont envoyées à la caisse maladie ou lAI, qui les prend en charge. Une participation de 10%, plus éventuellement la franchise sont facturées par la caisse aux parents. LAI prend en charge les psychothérapies des personnes dont les séquelles gêneraient considérablement ou rendraient impossibles la formation ultérieure et lexercice dune activité lucrative. En outre, pour bénéficier de cette aide financière, un traitement spécialisé intensif a dû être appliqué pendant une année, sans apporter damélioration suffisante.
Lorsque les adolescents demandeurs dune prise en charge refusent davertir leurs parents de leur démarche, des modalités de facturation sont négociées avec ladolescent en attendant une modification de la situation.
Léquipe pluridisciplinaire
Léquipe pluridisciplinaire est composée de vingt collaborateurs à temps partiel ou complet pour tout le secteur Nord: deux chefs de clinique, quatre médecins assistants, un médecin adjoint, cinq psychologues, quatre psychologues assistants, une logopédiste et trois secrétaires.
Fonctionnement du service
Le fonctionnement du service comprend les colloques entre collaborateurs, le travail en réseau, lencadrement des personnes en formation et les moyens dévaluation du travail.
Léquipe des collaborateurs se retrouve une fois par semaine pour un colloque. Cette rencontre pluridisciplinaire fait partie du système de communication. Elle permet tout dabord des discussions dordre administrative, la répartition des demandes de consultation, un espace de réflexions cliniques à partir dune situation dun adolescent et un espace de réflexions théoriques. Les synthèses peuvent être aussi organisées au sein des colloques. Elles nont pas lieu systématiquement pour chaque patient. Par ailleurs, les informations circulent oralement de manière formelle.
Le SMP travaille en réseau afin de regrouper des professionnels pour débattre un thème précis rencontré dans leur pratique professionnelle et pour regrouper des personnes en liaison autour dun patient.
Lencadrement des personnes en formation se fait au travers de séminaires et dentretiens avec un supérieur hiérarchique. En outre, les collaborateurs en formation suivent une heure de supervision par semaine à lextérieur et une à deux heures dencadrement avec une personne hiérarchiquement supérieure, à lintérieur du service.
Les moyens pour évaluer et mesurer le travail des collaborateurs sont les supervisions individuelles. Lors des supervisions, les thérapeutes peuvent analyser, avec laide dune personne extérieure, la prise en charge thérapeutique. Cet éclairage permet de réajuster éventuellement la prise en charge.
Le SMP accueille des enfants et des adolescents de 0 à 18 ans. Environ 1000 patients sont suivis chaque année, dont 500 sont des nouvelles prises en charge. Les adolescents représentent environ le 25% des patients, cest-à-dire approximativement 250 personnes par année. La clientèle est composée dun plus grand nombre de garçons et ceci jusquà la pré-adolescence. Par contre, dès ladolescence, les tendances se renversent : plus de femmes que dhommes sont suivis.
Les patients accueillis sont des enfants et des adolescents souffrant de problèmes psychologiques et/ou de syndromes psychiatriques aigus. Les problèmes psychologiques sont des troubles psychiques, des troubles du comportement, des problèmes scolaires, des conflits familiaux, des troubles fonctionnels, etc. Les syndromes psychiatriques aigus survenant à ladolescence sont des troubles graves de lhumeur, des épisodes dépressifs majeurs, des bouffées délirantes, des décompensations psychotiques, des tentatives de suicide, des anorexies mentales, des états limites, des décompensations névrotiques sévères, etc. Si ladolescent souffrant de syndromes psychiatriques aigus a une demande daide suffisante, et que lencadrement familial est stable et soutenant, le SMP peut prendre en charge ladolescent. Toutefois, si ces conditions ne sont pas remplies, ladolescent sera hospitalisé à lUHPA.
Les patients sont adressés au SMP par les médecins traitants, les hôpitaux, les parents, les adolescents eux-mêmes, les psychologues, le SPJ, les pédiatres, les enseignants, etc.
Lorsque les adolescents demandeurs dune prise en charge refusent davertir leurs parents de leur démarche, le service entre en matière également pour ces situations. Lun des objectifs de la prise en charge sera daider ladolescent à informer ses parents, afin de les intégrer au processus thérapeutique. Laccès aux soins reste prioritaire pour le service.
Tout dabord, je décris la procédure dadmission habituelle et dans un deuxième temps, je spécifie la procédure dadmission et les diverses prises en charge dadolescents suicidants. La présentation de ces diverses prises en charge débute à partir des soins somatiques administrés aux urgences de lhôpital.
Procédure dadmission habituelle
1. La demande est enregistrée au secrétariat par téléphone ou visite du demandeur.
2. Lors dun colloque, un thérapeute est nommé en fonction des spécificités de la demande et du lieu dhabitation du futur patient. Car si ce dernier est dans le secteur de Payerne, Orbe,
St-Croix ou de la Vallée de Joux, la demande est transmise à lantenne régionale.
3. Le thérapeute désigné contacte le patient et/ou ses parents.
4. Une démarche de prise en charge thérapeutique est proposée au demandeur.
Lorsquune situation urgente ne peut attendre le jour du colloque, lappel est transmis par le secrétariat au thérapeute de garde qui fixe le premier rendez-vous.
Procédure dadmission et diverses prises en charge dun adolescent suicidant
Lors dune tentative de suicide, lhôpital de soins généraux, qui a soigné ladolescent sur le plan somatique appelle généralement le SMP pour consulter le patient avant sa sortie. Dans les 24 heures qui suivent, une personne du SMP (chef de clinique, médecin ou psychologue) se déplace et fait une évaluation de la situation. Dans ces cas-là, le déroulement de ladmission diffère de la procédure habituelle ; cest le thérapeute sur place qui évalue avec le patient, et si possible ses parents, les mesures de prise en charge adaptées. Il apprécie si le désir de mort est présent ou si la situation sest momentanément calmée. Ensuite, le médecin de lhôpital tient compte de lavis du consultant du SMP pour mettre en place la suite de la prise en charge de ladolescent. Les prises en charge diffèrent dun adolescent à lautre ; elles dépendent aussi des risques suicidaires des adolescents, de leur contexte social et des facteurs déclenchant la tentative de suicide. Par exemple, si ladolescent refuse un accompagnement thérapeutique et présente des risques de récidive, lhôpital se doit dorganiser une hospitalisation en milieu psychiatrique contre son gré. En définitive, les possibilités de prise en charge de ces adolescents sont nombreuses, nous pouvons cependant les regrouper en trois catégories : suivi des adolescents vivant au domicile, hospitalisés, ou placés dans un foyer.
Le retour à domicile est accordé lorsque le contexte familial nest pas pathogène, que ladolescent ne présente pas de signe de récidive et de psychopathologie sévère. Si un de ces critères nest pas rempli, ladolescent peut être placé dans un foyer. Toutefois, une hospitalisation est possible pour les adolescents à risque de récidive et souffrant dune psychopathologie sévère.
Voici en dix points les diverses prises en charge possibles dun adolescent ayant fait une tentative de suicide (cf. tableau 4, p. 30):
Les moyens de prise en charge
Les moyens professionnels utilisés, pour le suivi des adolescents, sont une psychothérapie individuelle, les entretiens de famille organisés par les médecins ou les psychologues prenant en charge ladolescent, et le support médicamenteux.
Les thérapeutes tentent, au travers dune psychothérapie, déclaircir avec ladolescent les circonstances de sa vie qui lont amené au passage à lacte. Ces réflexions doivent permettre à ladolescent de trouver des moyens autres que le suicide pour apaiser sa souffrance.
Les entretiens de famille sont très importants, car la tentative de suicide ébranle, touche lentourage et provoque souvent une mobilisation de celui-ci. La famille peut réagir soit par un recouvrement du problème en niant la gravité de lacte, soit par un mouvement de rejet envers ladolescent, ou par une prise de conscience du problème et un désir de tout mettre en place, tel quun traitement en famille pour trouver des solutions. Quant au support médicamenteux, il peut être offert pour diminuer certains symptômes de la psychopathologie.
La durée moyenne dun traitement varie de quelques consultations à une psychothérapie pendant plusieurs années. Certains adolescents abandonnent le traitement après quelques consultations, dautres profitent des soins donnés pendant plusieurs années. La durée du traitement dépend de la sévérité de la pathologie.
Tableau 4: Possibilités de prises en charge dun adolescent suicidant
dans le secteur Nord
Lapproche théorique
Le SMP prend en charge les patients selon le modèle théorique psychodynamique. Une collaboration est aussi recherchée avec les familles dans la prise en charge des adolescents. Des collaborateurs, ayant suivi des cours systémiques, offrent à léquipe leur regard sur les situations.
Le réseau de collaboration du SMP
Les relations du SMP avec lextérieur sont nombreuses : le service collabore avec les hôpitaux, le secteur privé des professions médicales et sociales, le SPJ, lAEMO, les institutions spécialisées accueillant des enfants et des adolescents, les écoles, les gymnases, le SES, le tribunal des mineurs, les personnes faisant partie de lentourage du patient, le Service Educatif Itinérant (SEI), les infirmières de santé publique, etc.
En ce qui concerne les adolescents suicidants pris en charge dans des foyers, une collaboration est recherchée entre le milieu socio-éducatif et le SMP pour lélaboration dun projet de soins commun. Le SMP a besoin des foyers pour certaines situations et les foyers sollicitent le SMP pour des consultations.
6. Service de psychiatrie et psychothérapie denfants et dadolescents à Vevey
Le service de psychiatrie et psychothérapie denfants et dadolescents fait partie de la fondation de Nant à Corsier sur Vevey, qui constitue le secteur psychiatrique de lEst vaudois. Ce secteur est donc privé, mais sa mission est publique. Cest pour des raisons historiques quil fait partie dune fondation privée. En effet, en 1968 la fondation de Nant devient, par convention signée avec lEtat, lhôpital psychiatrique de lEst vaudois. Plus tard, en 1985, elle reçoit la mission dorganiser la psychiatrie publique du secteur Est du canton de Vaud. Afin daméliorer laccessibilité du service aux patients, celui-ci dispose de trois lieux de consultations ambulatoires : à Vevey, Montreux et Aigle. Les trois lieux de consultations sont sous la responsabilité du médecin chef de Vevey et fonctionnent de la même manière, cest pourquoi je décris uniquement le service de Vevey.
Le service se compose de deux structures : La PPP et le Centre psychothérapeutique de Jour pour Enfants (CPDJ). La PPP offre une prise en charge ambulatoire, par contre le CPDJ est un hôpital de jour pour enfants. De ce fait, dans la présentation de ce service, je développe uniquement la première structure, cest-à-dire la PPP car le CPDJ prend en charge uniquement des enfants et cette population nest pas prise en compte dans cette recherche.
La PPP est ouverte du lundi au vendredi aux heures de bureau. Le service de garde médicale de la région assure les urgences lors dappel en dehors des heures douverture du service.
Buts du service
Une des missions du service est doffrir des soins de pédopsychiatrie au travers de consultations : dinvestigation pour les parents et les enfants confrontés à des difficultés psychologiques chez lenfant, de guidance (conseil) pour les parents, pendant la grossesse, et en pédiatrie aux hôpitaux de la région sur demande du médecin de lhôpital. En outre, le service fait des bilans psychologiques et différentes formes de prises en charge thérapeutiques.
Les consultations permettent de dégager des hypothèses psychodynamiques et dévaluer le contexte familial, psychosocial et scolaire, afin de mettre en place une prise en charge thérapeutique individuelle et/ou familiale. Le service a aussi pour but de former des professionnels tels que médecins, chefs de clinique et psychologues.
Financement
Lunité est entièrement financée par lEtat de Vaud et la Confédération. Les factures pour les prestations au client sont envoyées à la caisse maladie ou lAI, qui les prend en charge. Une participation de 10%, plus éventuellement la franchise sont facturées par la caisse aux parents. LAI prend en charge les psychothérapies des personnes dont les séquelles gêneraient considérablement ou rendraient impossibles la formation ultérieure et lexercice dune activité lucrative. En outre, pour bénéficier de cette aide financière, un traitement spécialisé intensif a dû être appliqué pendant une année, sans apporter damélioration suffisante.
Lorsque les adolescents demandeurs dune prise en charge refusent davertir leurs parents de leur démarche, des modalités de facturation sont négociées avec ladolescent en attendant une modification de la situation.
Léquipe pluridisciplinaire
Léquipe pluridisciplinaire est composée de huit collaborateurs à temps partiel ou complet : un chef de clinique, un médecin chef, un médecin assistant, une psychologue, deux psychologues assistants, une psychologue stagiaire et une secrétaire.
Fonctionnement du service
Le fonctionnement du service comprend les colloques entre collaborateurs, le travail en réseau, les supervisions, lencadrement des personnes en formation et les moyens dévaluation du travail.
Léquipe des collaborateurs se retrouve une fois par semaine pour un colloque. Cette rencontre pluridisciplinaire fait partie du système de communication. Elle permet tout dabord des discussions dordre administrative, la répartition des demandes de consultation, un espace de réflexions cliniques à partir dune situation dun adolescent et un espace de réflexions théoriques. Les synthèses peuvent être aussi organisées au sein des colloques. Par ailleurs les informations circulent aussi au travers de documents écrits ou oralement de manière formelle.
La PPP travaille en réseau afin de regrouper des professionnels pour débattre un thème précis rencontré dans leur pratique professionnelle et pour regrouper des personnes en liaison autour dun patient.
Lencadrement des personnes en formation se fait au travers de séminaires, de vidéos, de psychodrames individuels, de supervisions et dentretiens avec un supérieur hiérarchique.
Des supervisions ont lieu selon les besoins de léquipe.
Les moyens pour évaluer et mesurer le travail des collaborateurs sont les supervisions et les fiches dévaluation des prises en charge. Lors des supervisions, les thérapeutes peuvent analyser, avec laide dune personne extérieure, la prise en charge thérapeutique. Cet éclairage permet de réajuster éventuellement la prise en charge.
La PPP accueille des enfants et des adolescents de 0 à 18 ans. Environ 560 personnes sont suivies par année. Les adolescents en représentent environ le 16%, cest-à-dire approximativement 90 personnes par année. La clientèle est composée dun plus grand nombre de garçons et ceci jusquà la pré-adolescence. Par contre, dès ladolescence les tendances se renversent, plus de femmes que dhommes sont suivis.
Les patients accueillis sont des enfants et des adolescents souffrant de problèmes psychologiques et/ou de syndromes psychiatriques aigus. Les problèmes psychologiques sont des troubles psychiques, des troubles du comportement, des problèmes scolaires, des conflits familiaux, des troubles fonctionnels, etc. Les syndromes psychiatriques aigus survenant à ladolescence sont des troubles graves de lhumeur, des épisodes dépressifs majeurs, des bouffées délirantes, des décompensations psychotiques, des tentatives de suicide, des anorexies mentales, des états limites, des décompensations névrotiques sévères, etc. Si ladolescent souffrant de syndromes psychiatriques aigus a une demande daide suffisante, et que lencadrement familial est stable et soutenant, le SMP peut prendre en charge ladolescent. Toutefois, si ces conditions ne sont pas remplies, ladolescent sera hospitalisé à lUHPA.
Les patients sont adressés à la policlinique par les médecins traitants, les hôpitaux, les parents, les adolescents eux-mêmes, les psychologues, le SPJ, les pédiatres, les enseignants, etc.
Lorsque certains adolescents demandent de laide mais ne désirent pas informer leurs parents de cette démarche, le service entre en matière également pour ces situations. Lun des objectifs de la prise en charge sera daider ladolescent à mettre ses parents au courant, afin de les intégrer au processus thérapeutique. Laccès aux soins reste prioritaire pour le service.
Tout dabord, je décris la procédure dadmission habituelle et dans un deuxième temps, je spécifie la procédure dadmission et les diverses prises en charge dadolescents suicidants. La présentation de ces diverses prises en charge débute à partir des soins somatiques administrés aux urgences de lhôpital.
Procédure dadmission habituelle
1. La demande est enregistrée au secrétariat par téléphone ou visite du demandeur.
2. Lors dun colloque, un thérapeute est nommé en fonction des spécificités de la demande.
3. Le thérapeute désigné contacte le patient et/ou ses parents.
4. Une démarche de prise en charge thérapeutique est proposée au demandeur.
Lorsquune situation urgente ne peut attendre le jour du colloque, le chef de clinique soccupe de trouver dans les huit heures qui suivent un thérapeute disponible.
Procédure dadmission et diverses prises en charge dun adolescent suicidant
Lors dune tentative de suicide, lhôpital de soins généraux qui a soigné ladolescent sur le plan somatique appelle généralement la PPP pour consulter le patient avant sa sortie. Dans les 12 heures qui suivent, une personne de la PPP (chef de clinique, médecins ou psychologues) se déplace et fait une évaluation de la situation. Dans ces cas-là, le déroulement de ladmission diffère de la procédure habituelle ; cest le thérapeute sur place qui évalue avec le patient, et si possible ses parents, les mesures de prise en charge adaptées. Il apprécie si le désir de mort est présent ou si la situation sest momentanément calmée. Ensuite, le médecin de lhôpital tient compte de lavis du consultant de la PPP pour mettre en place la suite de la prise en charge de ladolescent. Les prises en charge diffèrent dun adolescent à lautre ; elles dépendent aussi des risques suicidaires des adolescents, de leur contexte social et des facteurs déclenchants la tentative de suicide. Par exemple, si ladolescent refuse un accompagnement thérapeutique et présente des risques de récidive, lhôpital se doit dorganiser une hospitalisation en milieu psychiatrique contre son gré. En définitive, les possibilités de prises en charge de ces adolescents sont nombreuses, nous pouvons cependant les regrouper en trois catégories : suivi des adolescents vivant au domicile, hospitalisés ou placés dans un foyer.
Le retour à domicile est accordé lorsque le contexte familial nest pas pathogène, que ladolescent ne présente pas de signe de récidive et de psychopathologie sévère. Si un de ces critères nest pas rempli, ladolescent peut être placé dans un foyer. Toutefois, une hospitalisation est possible pour les adolescents à risque de récidive et dotés dune psychopathologie sévère.
Voici en dix points les diverses prises en charge possibles dun adolescent ayant fait une tentative de suicide (cf. tableau 5, p. 37) :
Les moyens de prise en charge
Les outils utilisés pour le suivi des adolescents sont une psychothérapie individuelle, les entretiens de famille, les psychodrames psychanalytiques individuels et/ou de groupe et le support médicamenteux.
Les médecins ou psychologues tentent, au travers dune psychothérapie, déclaircir avec ladolescent les circonstances de sa vie qui lont amené au passage à lacte. Ces réflexions doivent permettre à ladolescent de trouver des moyens autres que le suicide pour apaiser sa souffrance. Les psychodrames sont des moyens utilisés par les thérapeutes pour permettre aux patients de faire un lien entre les difficultés ressenties dans les scènes jouées et les difficultés quils rencontrent dans leur vie.
Les entretiens de famille sont très importants, car la tentative de suicide ébranle, touche lentourage et provoque souvent une mobilisation de celui-ci. La famille peut réagir soit par un recouvrement du problème en niant la gravité de lacte, soit par un mouvement de rejet envers ladolescent, ou par une prise de conscience du problème et un désir de tout mettre en place, tel quun traitement en famille pour trouver des solutions. Quant au support médicamenteux, il peut être offert pour diminuer certains symptômes de la psychopathologie.
La durée moyenne dun traitement varie de quelques consultations à une psychothérapie pendant plusieurs années. Certains adolescents abandonnent le traitement après quelques consultations et dautres profitent des soins donnés pendant plusieurs années. La durée du traitement dépend de la sévérité de la pathologie.
Tableau 5: Possibilités de prises en charge dun adolescent suicidant
dans le secteur Est
Lapproche théorique
La PPP prend en charge les patients selon le modèle théorique psychodynamique.
Le réseau de collaboration de la PPP
Les relations de la PPP avec lextérieur sont nombreuses : la policlinique collabore avec les hôpitaux, le secteur privé des professions médicales et sociales, le SPJ, lAEMO, les institutions spécialisées accueillant des enfants et des adolescents, les écoles, les gymnases, le SES, le tribunal des mineurs, les personnes faisant partie de lentourage du patient, le SEI, les infirmières de santé publique, etc.
En ce qui concerne les adolescents suicidants pris en charge dans des foyers, une collaboration est recherchée entre le milieu socio-éducatif et la PPP pour lélaboration dun projet de soins commun. La PPP a besoin des foyers pour certaines situations et les foyers sollicitent la PPP pour des consultations
7. Service
de Psychiatrie de lEnfant et de lAdolescent
(SPEA) à Nyon et Morges
Le SPEA est un service public couvrant deux sous-secteurs, Nyon et Morges. Il est le service de pédopsychiatrie de la partie Ouest du canton de Vaud. Les bureaux de la direction du service sont à Nyon. Afin de mieux desservir la population, le SPEA a crée par la suite un sous-secteur à Morges. Le SPEA est un centre public dépendant des Hospices cantonaux, eux-mêmes dirigés par le DSAS. A Nyon, un centre thérapeutique de jour sest créé, il est pris en charge par deux structures différentes ; dune part léquipe thérapeutique dépend du SPEA, et dautre part léquipe pédago-éducative et ladministration dépendent de la Fondation de Vernand. Je décris principalement le service de Nyon.
Le SPEA est ouvert du lundi au vendredi aux heures de bureau, ainsi que le samedi matin. Le service de garde médicale de la région assure les urgences lors dappel en dehors des heures douverture du service.
Buts du service
Une des missions du SPEA est doffrir des soins de pédopsychiatrie au travers de consultations : dinvestigation pour les parents et les enfants confrontés à des difficultés psychologiques chez lenfant, de guidance (conseil) pour les parents, pendant la grossesse, et en pédiatrie aux hôpitaux de Nyon et Morges sur demande du médecin de lhôpital. En outre, le SPEA fait des bilans psychologiques, offre des traitements logopédiques et différentes formes de prises en charge thérapeutiques.
Les consultations permettent de dégager des hypothèses psychodynamiques et dévaluer le contexte familial, psychosocial et scolaire, afin de mettre en place une prise en charge thérapeutique individuelle et/ou familiale. Le service a aussi pour but de former des professionnels, tels que médecins, chefs de clinique et psychologues.
Financement
Lunité est entièrement financée par lEtat de Vaud et la Confédération. Les factures pour les prestations au client sont envoyées à la caisse maladie ou lAI, qui les prend en charge. Une participation de 10%, plus éventuellement la franchise sont facturées par la caisse aux parents. LAI prend en charge les psychothérapies des personnes dont les séquelles gêneraient considérablement ou rendraient impossibles la formation ultérieure et lexercice dune activité lucrative. En outre, pour bénéficier de cette aide financière, un traitement spécialisé intensif a dû être appliqué pendant une année, sans apporter damélioration suffisante.
Lorsque les adolescents demandeurs dune prise en charge refusent davertir leurs parents de leur démarche, des modalités de facturation sont négociées avec ladolescent en attendant une modification de la situation.
Léquipe pluridisciplinaire
Léquipe pluridisciplinaire est composée de seize personnes à temps partiel ou complet : un chef de clinique, un chef de clinique adjoint, un médecin chef, un médecin associé, deux médecins assistants, cinq psychologues, un assistant social, une logopédiste et trois secrétaires. Certains postes sont partagés avec le service de Morges.
Fonctionnement du service
Le fonctionnement du service comprend les colloques entre collaborateurs, le travail en réseau, lencadrement pour les personnes en formation, les supervisions et les moyens dévaluation du travail.
Léquipe des collaborateurs se retrouve une fois par semaine pour un colloque. Cette rencontre pluridisciplinaire fait partie du système de communication. Elle permet tout dabord des discussions dordre administrative, la répartition des demandes de consultation, un espace de réflexions cliniques à partir dune situation dun adolescent et un espace de réflexions théoriques. Par ailleurs, les informations circulent oralement de manière formelle.
Le SPEA travaille en réseau afin de regrouper des professionnels pour débattre un thème précis rencontré dans leur pratique professionnelle et pour regrouper des personnes en liaison autour dun patient.
Lencadrement des personnes en formation se fait au travers de séminaires, de vidéos, de suivi par un supérieur hiérarchique et de supervisions individuelles.
Des supervisions déquipe ont lieu deux à quatre fois par an. Les supervisions permettent aussi la présentation de synthèse, cest-à-dire le bilan dun patient. Les synthèses ont lieu en fonction de la demande du thérapeute, en moyenne une à deux fois par an.
Les moyens pour évaluer et mesurer le travail des collaborateurs sont les supervisions. Lors des supervisions, les thérapeutes peuvent analyser, avec laide dune personne extérieur, la prise en charge thérapeutique. Cet éclairage permet de réajuster éventuellement la prise en charge.
Le SPEA accueille des enfants et des adolescents de 0 à 18 ans. Environ 550 patients sont suivis chaque année, dont plus de la moitié sont des nouveaux cas. Les adolescents représentent environ 15% à 20% des patients, cest-à-dire approximativement 90 personnes par année. La clientèle est composée dun plus grand nombre de garçons et ceci jusquà la pré-adolescence. Par contre, dès ladolescence, les tendances se renversent, plus de femmes que dhommes sont suivis. Le SPEA émet cette constatation, mais nécessite, de leur point de vue, une vérification des statistiques.
Les patients accueillis sont des enfants et des adolescents souffrant de problèmes psychologiques et/ou de syndromes psychiatriques aigus. Les problèmes psychologiques sont des troubles psychiques, des troubles du comportement, des problèmes scolaires, des conflits familiaux, des troubles fonctionnels, etc. Les syndromes psychiatriques aigus survenant à ladolescence sont des troubles graves de lhumeur, des épisodes dépressifs majeurs, des bouffées délirantes, des décompensations psychotiques, des tentatives de suicide, des anorexies mentales, des états limites, des décompensations névrotiques sévères, etc. Si ladolescent souffrant de syndromes psychiatriques aigus a une demande daide suffisante, et que lencadrement familial est stable et soutenant, le SMP peut prendre en charge ladolescent. Toutefois, si ces conditions ne sont pas remplies, ladolescent sera hospitalisé à lUHPA.
Les patients sont adressés au SPEA par les médecins traitants, les hôpitaux, les parents, les adolescents eux-mêmes, les psychologues, le SPJ, les pédiatres, les enseignants, etc.
Lorsque certains adolescents demandent de laide mais ne désirent pas informer leurs parents de cette démarche, le service entre en matière également pour ces situations. Lun des objectifs de la prise en charge sera daider ladolescent à mettre ses parents au courant, afin de les intégrer au processus thérapeutique. Laccès aux soins reste prioritaire pour le service.
Tout dabord, je décris la procédure dadmission habituelle et dans un deuxième temps, je spécifie la procédure dadmission et les diverses prises en charge dadolescents suicidants. La présentation de ces diverses prises en charge débute à partir des soins somatiques administrés aux urgences de lhôpital.
Procédure dadmission habituelle
1. Le demandeur est enregistré au secrétariat par téléphone ou visite.
2. La secrétaire avise un des collaborateurs qui téléphone au client pour prendre note de la
demande.
3. Le collaborateur transmet la demande au colloque, un thérapeute est nommé en fonction
de la demande.
4. Le thérapeute désigné contacte le patient et/ou ses parents.
5. Une démarche de prise en charge thérapeutique est proposée au demandeur.
Procédure dadmission et diverses prises en charge dun adolescent suicidant
Lors dune tentative de suicide, lhôpital de soins généraux qui a soigné ladolescent sur le plan somatique appelle généralement le SPEA pour consulter le patient avant sa sortie. Dans les 12 heures qui suivent, le chef de clinique adjoint du SPEA (si absent, médecins ou psychologues) se déplace et fait une évaluation de la situation. Dans ces cas-là, le déroulement de ladmission diffère de la procédure habituelle ; cest le thérapeute sur place qui évalue avec le patient, et si possible ses parents, les mesures de prise en charge adaptées. Il apprécie si le désir de mort est présent ou si la situation sest momentanément calmée. Ensuite, le médecin de lhôpital tient compte de lavis du consultant du SPEA pour mettre en place la suite de la prise en charge de ladolescent. Les prises en charge diffèrent dun adolescent à lautre ; elles dépendent aussi des risques suicidaires des adolescents, de leur contexte social et des facteurs déclenchants la tentative de suicide. Par exemple, si ladolescent refuse un accompagnement thérapeutique et présente des risques de récidive, lhôpital se doit dorganiser une hospitalisation en milieu psychiatrique contre son gré. En définitive, les possibilités de prise en charge de ces adolescents sont nombreuses, nous pouvons cependant les regrouper en trois catégories : suivi des adolescents vivant au domicile, hospitalisés ou placés dans un foyer.
Le retour à domicile est accordé lorsque le contexte familial nest pas pathogène, que ladolescent ne présente pas de signe de récidive et de psychopathologie sévère. Si un de ces critères nest pas rempli, ladolescent peut être placé dans un foyer. Toutefois, une hospitalisation est possible pour les adolescents à risque de récidive et dotés dune psychopathologie sévère.
Voici en dix points les diverses prises en charge possibles dun adolescent ayant fait une tentative de suicide (cf. tableau 6, p. 44) :
Les moyens de prise en charge
Les outils professionnels utilisés pour le suivi des adolescents, sont la psychothérapie individuelle, les entretiens de famille et le support médicamenteux. Les médecins ou psychologues prenant en charge ladolescent ont pour but la restauration des aménagements psychiques de ladolescent, latténuation de la symptomatologie et une meilleure utilisation des potentialités.
Les entretiens de famille sont très importants, car la tentative de suicide ébranle, touche lentourage et provoque souvent une mobilisation de celui-ci. La famille peut réagir soit par un recouvrement du problème en niant la gravité de lacte, soit par un mouvement de rejet envers ladolescent ou par une prise de conscience du problème et un désir de tout mettre en place, tel quun traitement en famille pour trouver des solutions. En général, cest le thérapeute de ladolescent ou parfois un autre collègue qui guide les entretiens de famille. Quant au support médicamenteux, il peut être offert pour diminuer certains symptômes de la psychopathologie.
La durée moyenne dun traitement varie de quelques consultations à une psychothérapie pendant plusieurs années. Certains adolescents abandonnent le traitement après quelques consultations et dautres profitent des soins donnés pendant plusieurs années. La durée du traitement dépend de la sévérité de la pathologie.
Tableau 6: Possibilités de prises en charge dun adolescent suicidant
dans le secteur Ouest
Lapproche théorique
Le SPEA prend en charge les patients selon le modèle psychodynamique. En outre, une collaboration est recherchée avec les familles dans la prise en charge des adolescents ; des collaborateurs ayant suivi des cours systémiques, offrent à léquipe leur regard sur les situations.
Le réseau de collaboration du SPEA
Les relations du SPEA avec lextérieur sont nombreuses : le service collabore avec les hôpitaux, le secteur privé des professions médicales et sociales, le SPJ, lAEMO, les institutions spécialisées accueillant des enfants et des adolescents, les écoles, les gymnases, le SES, le tribunal des mineurs, les personnes faisant partie de lentourage du patient, le SEI, les infirmières de santé publique, etc.
En ce qui concerne les adolescents suicidants pris en charge dans des foyers, une collaboration est recherchée entre le milieu socio-éducatif et le SPEA pour lélaboration dun projet de soins commun. Le SPEA a besoin des foyers pour certaines situations et les foyers sollicitent le SPEA pour des consultations.
2
_______________________________
Etude comparative des
centres et unités daccompagnement psychiatrique des adolescents suicidants
dans le canton de Vaud
Introduction
Ce chapitre tente de comparer les centres et unités daccompagnement psychiatrique des adolescents suicidants décrits précédemment, afin de relever les similitudes et les différences entre les services. Il faut toutefois prendre ces constatations avec une certaine réserve, étant donné que le questionnaire de base était sous forme de questions ouvertes.
Jai procédé de la manière suivante : tout dabord, jai confronté chaque point traité lors des descriptifs des centres pour en faire ressortir les similitudes et différences, et ensuite jémets quelques constatations personnelles. Afin de faciliter la lecture de certaines données, jai créé des tableaux. Les initiales et les lieux géographiques désignent les services. Les points abordés sont les suivants : les cadres institutionnels, les patients et les prises en charge. Ils sont cités dans le même ordre que les descriptifs des services. Les items ne sont pas écrits par ordre alphabétique mais respectent lordre des descriptifs.
Je tiens aussi à préciser que le SUPEA nest pas pris en compte dans cette étude comparative, car il est un organe dirigeant et chacun de ses services a une spécificité. Cest pourquoi, en ce qui concerne le SUPEA, jaborde uniquement le CTJA et lUHPA qui soccupent essentiellement des adolescents.
Les points suivants permettent de comparer les statuts, les structures, les buts, les financements, les équipes pluridisciplinaires et les fonctionnements des services.
LUHPA, le CTJA, le SPEA et le SMP sont des centres publics, cest-à-dire quils dépendent des Hospices cantonaux, eux-mêmes dirigés par le DSAS. Par contre, le service de psychiatrie et psychothérapie denfants et dadolescents à Vevey fait partie dune fondation privée dont la mission est publique. Cette dernière dépend du GHRV et reçoit, aussi, des subventions de lEtat.
La structure de chaque service est très spécifique. LUHPA et le CTJA prennent en charge uniquement des adolescents alors que le SMP, le service de psychiatrie et psychothérapie denfants et dadolescents à Vevey et le SPEA prennent en charge des enfants et des adolescents. LUHPA et le CTJA sont des lieux de vie où les adolescents passent leurs journées. LUHPA se distingue des autres structures par une prise en charge à temps complet. Par contre, les trois autres sont des centres de consultations.
Le SPEA et le service de psychiatrie et psychothérapie denfants et dadolescents à Vevey ont une particularité commune, ils offrent aussi des prestations pédago-thérapeutiques au sein dun centre thérapeutique de Jour pour enfants. Etant donné que le service de psychiatrie et psychothérapie denfants et dadolescents à Vevey se compose de deux structures distinctes (la PPP et le CPDJ), cette étude comparative prend en compte uniquement la PPP, car le CPDJ concerne uniquement les enfants.
Même si le SMP, la PPP et le SPEA offrent des prestations ambulatoires aux clients, des différences existent au sein de chaque service. En ce qui concerne le SMP, il est lorgane principal du secteur Nord. Ce dernier dispose de cinq antennes, toutefois les demandes de consultations sont centralisées à Yverdon. Le service de psychiatrie et psychothérapie denfants et dadolescents à Vevey, quant à lui, dispose aussi de trois lieux de consultations, mais contrairement au SMP, chaque lieu de consultations est plus ou moins autonome et gère les demandes. En ce qui concerne le SPEA, qui a aussi un sous-secteur à Morges, fonctionne de la même manière que le service de Vevey, cest-à-dire que les deux secteurs sont autonomes.
Je peux constater, en analysant la structure des services, quil en existe uniquement deux (CTJA et UHPA), créés spécifiquement pour la prise en charge des adolescents dans le canton de Vaud. En plus, ces deux derniers offrent des lieux de vie pour les adolescents. Cette prestation nest pas retrouvée dans les autres services.
Le traitement des données concernant les structures des services est divisé en deux points : les heures douverture et les appels urgents.
Les heures douverture
Les réponses correspondent à la question posée, lors des entretiens, suite au questionnaire : " quelles sont les heures douverture de votre service ? ".
Tableau 7 : Heures douverture
HEURES DOUVERTURE | CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
Lundi au vendredi, heures de bureau | 7 | 7 | 7 | ||
Lundi au vendredi toute la journée | 7 | ||||
Le samedi matin | 7 | ||||
24h/24h | 7 |
LUHPA est ouverte 24h/24h, tandis que le CTJA est ouvert toute la journée du lundi au vendredi, de ce fait les adolescents peuvent prendre leurs repas sur place. Le SMP et la PPP sont ouverts du lundi au vendredi aux heures de bureau. Par contre, le SPEA est aussi ouvert le samedi matin.
LUHPA est donc la seule unité prenant en charge les adolescents à temps complet. Le suivi offert par tous les autres services requière forcément une prise en charge par la famille ou par un foyer. Il me semble, en effet, que la possibilité daccueillir des adolescents à temps complet est faible dans le canton de Vaud. Est-ce dû aux problèmes financiers du canton ou aux professionnels de la santé qui désirent favoriser les prises en charge ambulatoires ? A mon avis, il est préférable pour les adolescents de retourner dans leur famille, si cette dernière peut offrir un soutien. Dans les cas contraires, il me semble important de pouvoir disposer pour ladolescent dun lieu transitoire, sécurisant et permettant ainsi de faire le point de la situation avec sa famille ; car la tentative de suicide ébranle toujours cette dernière.
Les appels urgents
Les réponses correspondent à la question posée, lors des entretiens, suite au questionnaire : " Qui reçoit les appels urgents en dehors des heures douverture du service ? ".
Tableau 8 : Appels urgents
APPELS URGENTS | CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
Permanence de lUHPA | 7 | 7 | |||
Service de garde médicale régional | 7 | 7 | 7 |
Le CTJA bénéficie de la permanence de lUHPA, étant donné que cette dernière est ouverte 24h/24h. Le SMP, la PPP et le SPEA bénéficient du service de garde médicale de la région qui assure les urgences en cas dappel.
Nous pouvons donc en déduire que si un adolescent nécessite une prise en charge urgente en dehors des heures douverture du service, il est orienté à lhôpital. Cette constatation exige, à mon avis, une préparation du personnel des urgences à recevoir au mieux ladolescent.
Pour présenter les buts, jai tout dabord posé la question suivante : " quels sont les buts de votre service ? ". Comme la question était ouverte, les réponses le furent aussi, de ce fait, jai par la suite interrogé chaque service, à partir du prospectus de présentation du SPEA, lequel les décrit concrètement.
Tableau 9 : Buts des services
BUTS | CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
Soins de pédopsychiatrie | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
Projets individuels adolescents, familles |
7 | 7 | |||
Prises en charge individu, et/ou famille | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
Dégager hypothèses psycho- dynamiques |
7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
Evaluer contexte familial, psychosocial et scolaire |
7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
Formations professionnelles | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
Contenir | 7 | ||||
Investigations parents et enfants | 7 | 7 | 7 | ||
Guidances conseils parents | 7 | 7 | 7 | ||
Consultations pédiatriques sur demande médicale |
7 | 7 | 7 | ||
Bilans psychologiques | 7 | 7 | 7 | ||
Traitements logopédiques | 7 | 7 | |||
Consultations grossesse | 7 | 7 |
Tous les services offrent des soins de pédopsychiatrie, des prises en charge individuelles et/ou familiales, des dégagements des hypothèses psychodynamiques, des évaluations de contexte familial, psychosocial et scolaire et des formations professionnelles. Par contre, en ce qui concerne les autres buts des services, deux groupes se distinguent : le premier est composé du CTJA et de lUHPA, le deuxième est composé du SMP, de la PPP et du SPEA.
Le premier groupe noffre pas de consultation ou de traitement logopédique. En revanche, il offre la possibilité délaborer un projet individuel et/ou familial pour ladolescent. Cette mission est très importante, car elle permet la prise en charge de ladolescent dans sa globalité, cest-à-dire son école, ses activités, ses thérapies, ses loisirs, sa famille, sa santé, etc. En plus, lUHPA tente aussi de contenir les adolescents en état de crise, cest-à-dire physiquement au travers dun cadre solide et chimiquement au travers des médicaments. Ce dernier point montre la spécificité de la prise en charge faite par lUHPA.
Le deuxième groupe, quant à lui, est spécialisé pour les consultations, telles que : des investigations pour parents et enfants confrontés à des difficultés chez lenfant, des conseils pour les parents, des consultations en pédiatrie sur demande médicale et des bilans psychologiques. Il existe aussi les consultations pendant la grossesse, mais elles concernent uniquement la PPP et le SPEA. En outre, le SMP et le SPEA offrent des traitements logopédiques.
A la suite de cette lecture, je remarque une similitude au niveau de la première prestation offerte par les services : tous offrent des soins de pédopsychiatrie. Par conséquent, les prises en charge proposées par le canton de Vaud pour pallier aux difficultés rencontrées chez les enfants et les adolescents sont, en partie, de lordre de la thérapie. Cette constatation signifie, lorsque le patient est suivi en ambulatoire, quil vit avec sa famille ou dans un foyer. Si son lieu de vie est pathogène, la prise en charge thérapeutique risque de ne pas être suffisante pour venir en aide à lenfant ou ladolescent. Cest pourquoi je trouve important, non seulement doffrir des soins de pédopsychiatrie, mais dimpliquer également la famille dans ce processus thérapeutique. Il est vrai que tous les services travaillent en collaboration avec les familles, cependant cette collaboration ne doit pas, à mon avis, sarrêter à quelques minutes de discussion, mais doit être tout aussi importante que les psychothérapies individuelles vécues par les enfants et les adolescents.
Voici un tableau mettant en évidence les moyens permettant le financement des services et des prestations diverses facturées aux clients. Les réponses correspondent dune part à la question posée, lors des entretiens suite au questionnaire : " comment votre service est-il financé ? ", et dautre part, à la suite de lentretien téléphonique avec un agent de lAI.
Tableau 10 : Financement
FINANCEMENT | CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
Financé par Etat de Vaud et Confédération |
7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
Prestations payées par caisse maladie |
7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
Prestations payées par lAI | 7 | 7 | 7 | 7 | |
Facturation repas au patient | 7 | ||||
Négociations modalités factures adolescents |
7 | 7 | 7 |
Les cinq services sont financés par lEtat de Vaud et la Confédération. Tous les services, sauf lUHPA, envoient les factures des prestations aux clients à la caisse maladie ou lAI qui les prennent en charge. En ce qui concerne lUHPA, cest seulement la caisse maladie qui prend en charge les prestations, car la durée des traitements nest pas assez longue. En effet, lAI prend en charge uniquement les soins à partir dune année de traitement intensif nayant pas apporté damélioration.
Le SMP, la PPP et le SPEA offrent une certaine souplesse lors de la facturation des prestations des prises en charge des adolescents qui ne désirent pas avertir tout de suite leurs parents. Ils négocient les modalités de facturation avec le client lui-même. Si cette souplesse se retrouve chez ces trois derniers, cest aussi parce que laccessibilité de ces services est facile, alors que pour être admis au CTJA ou à lUHPA, une demande ne peut se faire sans indication médicale. En effet, les adolescents pris en charge par le CTJA ou lUHPA souffrent de syndromes psychiatriques qui nécessitent une collaboration rapide avec les parents.
Le CTJA est le seul centre à demander une contribution de Fr. 13.50 pour le repas de midi. En tant que centre de jour, le forfait pour la prise en charge ambulatoire ne comprend pas les repas, cest pourquoi les parents se doivent de participer financièrement. Toutefois, nous ne pouvons pas comparer cet élément avec les autres services, car, mise à part lUHPA, ces derniers noffrent pas la possibilité de manger. Je ne remets pas en cause cette participation, car si ladolescent devait se nourrir dans une cantine scolaire, les parents devraient aussi débourser. Par contre, je trouve le prix du repas élevé. Ce prix correspond presque au menu du jour dun restaurant, alors que dans une cantine scolaire, le prix du menu du jour est de Fr. 8.--environ.
1.5 Les équipes pluridisciplinaires
Les réponses correspondent à deux demandes du questionnaire : " combien de collaborateurs êtes-vous ? " et " quelles sont les professions exercées dans votre établissement ? "
Les renseignements sur le nombre de collaborateurs sont peu significatifs, car dune part les personnes travaillent à temps complet ou partiel, et dautre part je nai pas pu obtenir des chiffres sur le nombre de postes de travail. Par contre, il est intéressant danalyser les professions exercées dans les différents services.
Tableau 11 : Collaborateurs
COLLABORATEURS | CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
||
Chef(s) de clinique | 1 | 2 | 1 | 1 | |||
Chef de clinique adjoint | 1 | 1 | |||||
Médecin chef | 1 | 1 | 1 | ||||
Médecin associé | 1 | 1 | 1 | ||||
Médecin(s) assistant(s) | 1 | 4 | 1 | 2 | |||
Médecin adjoint | 1 | ||||||
Psychologue(s) | 2 | 1 | 5 | 1 | 5 | ||
Psychologue(s) assistant(s) en formation | 4 | 2 | |||||
Psychologue stagiaire | 1 | ||||||
Infirmier(s), infirmière (s) | 1 | 5 | |||||
Assistant social | 1 | 1 | 1 | ||||
Educateur(s) | 2 | 1 | |||||
Stagiaire éducateur | 1 | ||||||
Enseignant(s) spécialisé(s) | 2 | 1 | |||||
... suite | CTJA | UHPA | SMP | PPP | SPEA | ||
Ergothérapeute | 1 | ||||||
Logopédiste | 1 | 1 | |||||
Secrétaire(s) | 1 | 1 | 3 | 1 | 3 | ||
Total des collaborateurs | 13 | 14 | 20 | 8 | 16 |
Quatre professions se retrouvent dans chaque service, il sagit de chef de clinique, médecins (adjoint, chef, assistant ou associé), psychologue et secrétaire. Ceci sexplique par le fait quune des missions est doffrir des soins de pédopsychiatrie. La profession de logopédiste est spécifique au SMP et au SPEA. Toutes les autres professions telles que : assistant social, éducateur, enseignant spécialisé, infirmier, etc. sont spécifiques au CTJA et à lUHPA. Toutefois, le SPEA compte parmi ses collaborateurs un assistant social comme le CTJA et lUHPA. La seule unité qui comporte une ergothérapeute est lUHPA.
A nouveau, des différences existent entre les deux services spécifiques aux adolescents (CTJA et UHPA) et les trois autres (SMP, PPP et SPEA). Pour les deux premiers, accueillir des adolescents pendant une journée et plus, implique une infrastructure différente. De ce fait, des professionnels tels quéducateur, enseignant spécialisé, assistant social et infirmier sont importants pour le suivi au quotidien. LUHPA, de par sa spécificité daccueillir des adolescents en état de crise et de les contenir, demande une présence plus importante des infirmiers que dans les autres services.
Par ailleurs, il est intéressant de noter quil ny a pas de psychologues au niveau des cadres, il sagit uniquement de médecins.
1.6 Les fonctionnements des services
Pour présenter les fonctionnements, jai tout dabord posé la question suivante : " quel est votre système de communication ? " et " avez-vous des moyens pour évaluer et mesurer votre travail ? " Comme les réponses ne furent pas assez précises, jai interrogé chaque service à partir du total de toutes les réponses. Les points abordés lors des entretiens étaient les colloques, le travail en réseau, lencadrement des personnes en formation, les supervisions déquipe, les moyens dévaluation et les règlements de base.
Tableau 12 : Fonctionnement
FONCTIONNEMENT | CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
COLLOQUE | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
1x/semaine | 7 | 7 | 7 | 7 | |
2x/semaine | 7 | ||||
Points administratifs | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
Présentation demandes en cours | 7 | 7 | |||
Choix admissions | 7 | 7 | |||
Transmission informations sur patients | 7 | 7 | |||
Compte rendu entretiens | 7 | 7 | |||
Réflexions cliniques | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
Réflexions théoriques | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
Synthèses | 7 | 7 | 7 | 7 | |
Répartition des demandes | 7 | 7 | 7 | ||
Circulation informations écrites | 7 | 7 | 7 | ||
Circulation informations orales formelles | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
Circulation informations orales informelles | 7 | 7 | |||
TRAVAIL EN RESEAU | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
Thème pour professionnels | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
Patient | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
ENCADREMENT PERSONNES EN FORMATION | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
Suivi dun référent (même profession) | 7 | 7 | |||
Entretiens avec supérieur hiérarchique | 7 | 7 | 7 | ||
Séminaires | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
Vidéos | 7 | 7 | 7 | 7 | |
Psychodrames individuels | 7 | 7 | 7 | ||
Supervisions | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
SUPERVISION DEQUIPE | 7 | 7 | 7 | 7 | |
1x/toutes les deux semaines | 7 | 7 | |||
Selon demande déquipe | 7 | ||||
2 à 4x/an | 7 | ||||
Synthèses | 7 | ||||
MOYENS DEVALUATION | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
Supervisions | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
Fiches dévaluation | 7 | 7 | 7 | ||
REGLEMENT DE BASE | 7 | 7 |
Le CTJA, lUHPA, le SMP et la PPP organisent des colloques une fois par semaine, tandis que le SPEA les organise deux fois par semaine. Ils sont utiles au fonctionnement de chaque service. Toutefois, des similitudes et des différences existent au niveau de lutilisation du colloque. Tous utilisent le colloque pour : débattre des points administratifs, un espace de réflexions cliniques et théoriques, la répartition ou présentation des demandes.
Le CTJA et lUHPA utilisent aussi les colloques pour choisir les admissions, transmettre aux collègues les informations sur les patients et donner des comptes rendus des entretiens individuels ou familiaux. Ces derniers points ne sont pas partagés par le SMP, la PPP et le SPEA, car les prises en charge des patients sont plus individuelles. Comme les patients du CTJA et de lUHPA peuvent être pris en charge par plusieurs personnes, il est important lorsquil y une rocade des collaborateurs, dinformer chacun sur lévolution des patients. Quant aux synthèses, elles sont aussi présentées en colloque, mis à part le SPEA, qui les présente lors des supervisions déquipe.
En ce qui concerne la circulation des informations, tous utilisent le colloque pour informer oralement de manière formelle. Linformation écrite est utilisée par le CTJA, lUHPA et la PPP. Par ailleurs, le CTJA et lUHPA informent aussi oralement de manière informelle. Ce dernier point mincite à faire un lien avec ma pratique professionnelle. Lorsque le service est un lieu de vie pour les patients, plusieurs collaborateurs travaillent en même temps, de ce fait, linformation circule souvent oralement, de manière informelle.
Tous les services travaillent en réseau, soit pour débattre un thème précis entre professionnels, ou soit pour regrouper les personnes en liaison autour dun patient. Cet élément semble important dans la prise en charge des patients. Il me semble que dune part lavis dautres professionnels est constructif, et que dautre part la rencontre de lentourage du patient permet de découvrir son réseau relationnel et son système de fonctionnement.
Tous les services offrent un encadrement pour les personnes en formation au travers des supervisions, des séminaires et du suivi dun référent de même profession pour le CTJA et lUHPA, ou dun supérieur hiérarchique pour le SMP, la PPP et le SPEA.
Des moyens de formation peuvent être proposés, tels que des vidéos et des psychodrames individuels. Le CTJA, lUHPA et la PPP utilisent ces deux moyens. Le SPEA utilise principalement les vidéos, tandis que le SMP nutilise aucun de ces deux moyens.
Tous les services, hormis le SMP, organisent des supervisions déquipe. Pour le CTJA et lUHPA, elles ont lieu une fois toutes les deux semaines. La PPP organise des supervisions déquipe uniquement sur demande de cette dernière. En ce qui concerne le SPEA, elles ont lieu deux à quatre fois par an.
En analysant la fréquence des supervisions, je constate que le CTJA et lUHPA sont les services qui organisent le plus de supervisions. Est-ce dû à la gravité des psychopathologies de leurs patients ou à une exigence professionnelle du SUPEA ?
Tous les services utilisent la supervision comme moyen dévaluation. Quant aux fiches dévaluation, uniquement le CTJA, lUHPA et la PPP les utilisent. Nous constatons que chaque service emploie un moyen ou plus dans la pratique professionnelle.
Les patients sont soumis au règlement de base du CTJA et de lUHPA. Il concerne uniquement ces deux services, car ils sont des lieux de vie. De ce fait, pour le bon fonctionnement du service, chacun est soumis à ce règlement.
Les points suivants permettent de comparer les patients pris en charge, leurs troubles et leurs provenances.
Pour présenter ces populations, jai posé les questions suivantes : " quelle est la tranche dâge des patients que vous accueillez ? ", " la clientèle est-elle plus féminine, masculine ou équivalente pour les deux sexes ? ", " quel est le total des patients suivis ? " et " combien dadolescents avez-vous pris en charge en 1997 ".
Il est difficile de comparer le nombre de patients accueillis chaque année, car dune part je nai pas reçu de réponses précises, et dautre part le CTJA et lUHPA ont ouvert leurs portes uniquement en juin 1997. Par ailleurs, je nai pas dinformation supplémentaire concernant le nombre de patients par catégorie de psychopathologie. Ce tableau permet uniquement de prendre conscience du nombre denfants et dadolescents suivis lannée précédente par ces services.
Tableau 13 : Patients pris en charge
POPULATION | CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
Age des patients | 13 à 18 ans | 13 à 18 ans | 0 à 18 ans | 0 à 18 ans | 0 à 18 ans |
Patients suivis en 1997 | 16 (juin à décembre) | 35 ( juin à décembre) | 1'000 env. | 560 env. | 550 env. |
Adolescents (13 à 18 ans) suivis en 1997 | 16 | 35 | 250 env. | 90 env. | 90 env. |
A ladolescence, plus de filles ou de garçons suivis ? | filles | filles | filles | filles | filles |
Le CTJA et lUHPA accueillent uniquement des adolescents, alors que le SMP, la PPP et le SPEA accueillent des enfants et des adolescents. Le nombre de patients pris en charge en 1997 pour une période de six mois, sélève à 16 adolescents pour le CTJA et 35 adolescents pour lUHPA. Le SMP a consulté environ 1000 patients en 1997, la PPP environ 560 patients et le SPEA environ 550 patients. Si le nombre de patients du SMP est élevé, cest aussi parce que le secteur Nord recouvre le 48% du canton de Vaud.
En ce qui concerne les adolescents pris en charge en 1997, le SMP évalue le nombre à environ 250. La PPP et le SPEA comptent avoir pris en charge environ 90 adolescents.
Tous les services affirment quà ladolescence, il y a plus de filles que de garçons suivis ; ceci semble propre à cette période car pendant lenfance, il y a plus de garçons que de filles accompagnés.
2.2 De quels troubles souffrent-ils ?
Pour présenter les troubles dont souffrent les patients, jai tout dabord posé la question suivante : " quels sont les motifs de la prise en charge ? ". Comme les réponses furent incomplètes, jai créé une liste en additionnant toutes les réponses pour interroger chaque service. Les items sont classés en deux catégories : " les syndromes psychiatriques aigus " et " les problèmes psychologiques ". Le terme utilisé pour la première catégorie est emprunté à lUHPA. Quant à la deuxième catégorie, je lai intitulée "les problèmes psychologiques ", car pour ma part, et à la suite dune lecture de divers dictionnaires, je constate quils sont moins inscrits, que les troubles psychiatriques dans une psychopathologie sévère. Le signe des croix en gras, met en évidence le type de troubles spécifiquement pris en charge.
Tableau 14 : Troubles chez les patients
TROUBLES CHEZ LES PATIENTS | CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
|
SYNDROMES PSYCHIATRIQUES AIGUS | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 | |
Troubles graves de lhumeur | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 | |
Episodes dépressifs majeurs | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 | |
Bouffées délirantes | 7 | 7 | 7 | 7 | ||
Décompensations psychotiques | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 | |
Tentatives de suicide | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 | |
Anorexies mentales | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 | |
Etats-limites | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 | |
Décompensations névrotiques sévères | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 | |
PROBLEMES PSYCHOLOGIQUES | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 | |
Troubles psychiques | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 | |
Troubles du comportement | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 | |
Problèmes scolaires | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 | |
Conflits familiaux | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 | |
Troubles fonctionnels | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
Tous, excepté le CTJA qui ne prend pas en charge dadolescent à bouffées délirantes, traitent les syndromes psychiatriques aigus (troubles graves de lhumeur, épisodes dépressifs majeurs, bouffées délirantes, décompensations psychotiques, tentatives de suicide, anorexies mentales, états limites, décompensations névrotiques sévères) et les problèmes psychologiques (troubles psychiques, du comportement, scolaires, fonctionnels, conflits familiaux).
Le CTJA a répondu négativement au suivi des adolescents à bouffées délirantes. Pour léquipe, il lui semble plus judicieux de les hospitaliser à lUHPA.
Je tiens à préciser que le CTJA et lUHPA sont spécialisés pour accueillir des adolescents à syndromes psychiatriques aigus. Les situations graves sont généralement prises en charge par lUHPA et lorsque la situation est stabilisée, la personne peut être accueillie au CTJA. Les troubles psychologiques ne font, peut-être, pas partie des motifs de prise en charge de ces deux derniers, cependant ils sont souvent présents chez les patients.
En ce qui concerne le SMP, la PPP et le SPEA, les motifs de prises en charge cités lors de la demande, sont le plus souvent des problèmes psychologiques. Selon les responsables des services, les adolescents à syndromes psychiatriques aigus peuvent être pris en charge, seulement si leur demande daide est suffisante, que lencadrement familial est stable et soutenant.
2.3 Provenance des prises en charge
Pour présenter les provenances des prises en charge, jai posé la question suivante : " qui vous a adressé le patient ? ". Toutefois, cette liste nest pas exhaustive. Il nest pas possible de détailler toutes les provenances.
Tableau 15 : Provenances des prises en charge
PROVENANCE DES PRISES EN CHARGE | CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
Médecins traitants | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
Hôpitaux | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
SUPEA | 7 | 7 | |||
UHPA | 7 | ||||
SMP | 7 | 7 | |||
PPP | 7 | 7 | |||
SPEA | 7 | 7 | |||
Pédopsychiatrie liaison | 7 | 7 | |||
DAMPS | 7 | 7 | |||
CTJA | 7 | ||||
Parents | 7 | 7 | 7 | ||
Adolescents | 7 | 7 | 7 | ||
Psychologues | 7 | 7 | 7 | ||
SPJ | 7 | 7 | 7 | ||
Pédiatres | 7 | 7 | 7 | ||
Enseignants | 7 | 7 | 7 |
Nous constatons que tous les services accueillent des adolescents adressés par les médecins traitants ou les hôpitaux. Cet élément met en évidence, à mon avis, le rôle important des médecins et des hôpitaux qui sont en général les premiers appelés lorsquil y a des problèmes physiologiques ou psychologiques.
Mis à part les deux éléments cités auparavant, la provenance des demandes nest pas la même pour tous les services. Je constate deux types de provenance. Le premier concerne le CTJA et lUHPA, les demandes sont adressées après indication médicale. De ce fait, elles proviennent spécialement des milieux médicalisés tels que : le SMP, le SUPEA, la PPP, le SPEA, la Pédopsychiatrie de liaison du CHUV, la DAMPS, le CTJA ou lUHPA.
Le deuxième concerne le SMP, la PPP et le SPEA, les demandes nont pas besoin dêtre adressées après indication médicale. Elles peuvent provenir des parents, des adolescents, des psychologues, du SPJ, des pédiatres, des enseignants, etc. Une des particularités de ces trois services, est doffrir la possibilité aux adolescents dêtre pris en charge, même sils nont pas encore avertis leurs parents de cette démarche. Cette attitude des professionnels a pour but de ne pas refuser les demandes.
Les points suivants permettent de comparer les procédures dadmission, les propositions de prises en charge depuis lhôpital, les moyens de prises en charge, qui sont les psychothérapeutes ?, la durée des traitements, les approches théoriques et les réseaux de collaboration des service. Ce dernier point est important, car il nous informe sur des possibilités de soins dans le canton de Vaud.
3.1 Procédures dadmission des adolescents suicidants
Chaque centre a décrit leur procédure dadmission en quatre ou cinq points. Jai rassemblé les réponses et donné un terme précis aux différentes étapes de ladmission ; je les ai vérifiés auprès des instances concernées.
Tableau 16 : Procédure dadmission
PROCEDURE | CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
POINT 1 | |||||
Demande après indication médicale | 7 | 7 | |||
Appel de lhôpital | 7 | 7 | 7 | ||
POINT 2 | |||||
Demande traitée en colloque | 7 | 7 | |||
Evaluation à lhôpital | 7 | 7 | 7 | ||
POINT 3 | |||||
Entretien avec médecin | 7 | 7 | |||
Proposition prise en charge | 7 | 7 | 7 | ||
POINT 4 | |||||
Prise de décision (collaborateurs, patient, parents | 7 | ||||
Accueil au centre | 7 | ||||
Décision du médecin | 7 | 7 | 7 | ||
POINT 5 | |||||
Temps dessai | 7 | ||||
Accompagnement ou non par thérapeute venu à lhôpital | 7 | 7 | 7 |
Les procédures dadmission du CTJA et de lUHPA sont identiques pour tous les patients. Par contre, les procédures dadmission pour le SMP, la PPP et le SPEA, ne sont pas semblables pour tous les patients. En effet, la procédure nest pas la même sil sagit dun adolescent qui a fait une tentative de suicide ou si cest un enfant à problèmes scolaires.
Etant donné que cette recherche est spécifique aux adolescents suicidants, je vais donc axer ma comparaison sur les procédures dadmission de ces derniers. Pour le CTJA et lUHPA, les trois premiers points de la procédure sont identiques : la demande est faite après indication médicale, cette dernière est traitée en colloque et ensuite un entretien avec un médecin est planifié. Le quatrième point pour le CTJA est dorganiser un entretien avec les collaborateurs, le patient et les parents pour une prise de décision, et par la suite laccueil du patient pour un temps dessai. Quant à lUHPA, après lentretien avec le médecin, le patient est accueilli ou non à lunité.
Le SMP, la PPP et le SPEA procèdent de la même manière, cest-à-dire : un appel est donné par lhôpital, une évaluation a lieu sur place, une proposition de prise en charge est faite, le médecin de lhôpital prend une décision et finalement un accompagnement ou non par le thérapeute venu à lhôpital est organisé.
3.2 Propositions des prises en charge depuis lhôpital
Ce point concerne uniquement le SMP, la PPP et le SPEA. Les réponses correspondent à la question posée, lors des entretiens suite au questionnaire : " quelles sont les possibilités de prises en charge des adolescents qui ont fait une tentative de suicide, depuis les soins somatiques offerts à lhôpital ? ".
Tableau 17 : Propositions de prises en charge
PROPOSITIONS | CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
Domicile, suivi par le service | 7 | 7 | 7 | ||
Domicile, suivi par un médecin traitant | 7 | 7 | 7 | ||
Domicile, suivi par le CTJA | 7 | 7 | 7 | ||
Domicile, sans suivi | 7 | 7 | 7 | ||
Foyer, suivi par le service | 7 | 7 | 7 | ||
Foyer, suivi par un médecin traitant | 7 | 7 | 7 | ||
Foyer, suivi par le CTJA | 7 | 7 | 7 | ||
Foyer sans suivi | 7 | 7 | 7 | ||
UHPA | 7 | 7 | 7 | ||
Hôpital psychiatrique (région) | 7 | 7 | 7 |
Les mesures proposées par ces trois services sont identiques, cest-à-dire : un retour au domicile, dans un foyer, à lUHPA ou encore à lhôpital psychiatrique de la région. Pour les deux premières propositions, ladolescent peut être suivi ou non par un médecin traitant, une personne du service ou pris en charge par le CTJA. Le CTJA et lUHPA ne sont pas mandatés pour proposer à lhôpital des prises en charge, par contre ils peuvent être sollicités à la suite de lhospitalisation, comme cité ci-dessus.
3.3 Moyens de prises en charge
Pour présenter les moyens des différents services, jai tout dabord posé la question suivante :
" quels outils professionnels ou moyens dintervention utilisez-vous dans la prise en charge de vos patients ? ". Comme les réponses ne furent pas assez précises, jai interrogé, à nouveau, chaque service à partir du total de toutes les réponses.
Tableau 18 : Moyens de prises en charge
MOYENS DE PRISES EN CHARGE | CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
Projets de soins (entretiens individuels, familiaux | 7 | 7 | |||
Entretiens de famille | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
Psychothérapie individuelle | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
Support médicamenteux | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
Réunions entre patients et soignants | 7 | 7 | |||
Psychodrames de groupe | 7 | 7 | |||
Activités manuelles, socioculturelles | 7 | 7 | |||
Evaluations pédagogiques et scolaires | 7 | 7 | |||
Bilans socio-familiaux | 7 | 7 | |||
Sports | 7 | ||||
Jeux ou loisirs | 7 | ||||
Psychodrames individuels | 7 |
Tous les services utilisent comme moyen de prise en charge les entretiens de famille, une psychothérapie individuelle et un support médicamenteux. Pour le SMP et la SPEA, ces trois moyens sont les seuls utilisés. Quant à la PPP, elle utilise aussi les psychodrames individuels et de groupe.
En ce qui concerne le CTJA et lUHPA, les moyens utilisés sont plus nombreux. Tous les deux organisent des activités manuelles et socioculturelles, des bilans socio-familiaux, des projets de soins, des évaluations pédagogiques et scolaires, et des réunions entre patients et soignants. Il existe tout de même quelques spécificités : le CTJA organise des psychodrames de groupe et lUHPA des jeux, des loisirs et des activités sportives.
La comparaison de ces données met en évidence le nombre plus élevé des moyens dans les services accueillant des adolescents sur une journée. Il est vrai que les patients accueillis par le CTJA et lUHPA sont dans un état plus grave que les autres. Je constate aussi quil existe un lien entre les moyens utilisés et les professions des collaborateurs. En loccurrence, le CTJA et lUHPA disposent déducateurs, denseignants spécialisés, dergothérapeutes et dinfirmiers que lon ne retrouvent pas dans les autres services.
3.4 Qui sont les psychothérapeutes ?
Les réponses correspondent à la question posée, lors des entretiens, suite au questionnaire :
" qui sont les psychothérapeutes ? ".
Tableau 19 : Les psychothérapeutes
PSYCHOTHERAPEUTES | CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
|
Médecins | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 | |
Psychologues | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
Chaque service fonctionne de la même manière ; toutes les psychothérapies sont prises en charge soit par les médecins, soit par les psychologues.
Les réponses correspondent à la question posée, lors des entretiens, suite au questionnaire :
" quelle est la durée des traitements ? ". Je nai pas pu récolter des informations précises quant au nombre dadolescents et la durée de leur prise en charge. Les données suivantes nous informent uniquement sur la moyenne des durées de traitement.
Tableau 20 : Durée des traitements
DUREE TRAITEMENT | CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
Une année (en moyenne) | 7 | ||||
2 semaines à 6 mois | 7 | ||||
une consultation à plusieurs années | 7 | 7 | 7 |
La durée moyenne des traitements est évaluée à une année pour le CTJA, de 2 semaines à 6 mois pour lUHPA et dune consultation à plusieurs années pour le SMP, la PPP et le SPEA.
Ces renseignements sont représentatifs des missions de chaque service. En ce qui concerne le CTJA, lélaboration dun projet individuel pour chaque adolescent, nécessite une prise en charge claire en objectifs et en durée. LUHPA, de par sa spécificité daccueillir des adolescents en état de crise, demande un laps de temps restreint. Quant au SMP, à la PPP et au SPEA, de par leur large spectre de prestations, touchent une population plus grande. De ce fait, la durée des prises en charge est très variable.
Les réponses correspondent à une demande du questionnaire : " est-ce que votre service a un référentiel théorique pour prendre en charge les patients ? ".
Tableau 21 : Approches théoriques
APPROCHES THEORIQUES | CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
Psychodynamique, psychanalyse | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 |
Systémique | 7 | 7 | 7 | 7 |
Nous constatons que tous les services utilisent le référentiel théorique psychodynamique. En outre, tous, sauf la PPP, disposent de collaborateurs qui ont suivi des cours de systémique. Ces informations mettent en évidence la centration sur le vécu subjectif dans la compréhension et laccompagnement des patients. La systémique est aussi utilisée, mais nest pas citée en premier lieu.
3.7 Les réseaux de collaboration des services
Les réponses correspondent à la question posée, lors des entretiens, suite au questionnaire : " quel est votre réseau de collaboration ? ". Comme les réponses ne furent pas précises, jai interrogé, à nouveau, chaque service à partir du total de toutes les réponses. Je tiens à préciser que cette liste nest pas exhaustive, mais donne tout de même une idée des nombreuses collaborations de chaque service.
Tableau 22 : Les réseaux de collaboration
RESEAUX COLLABORATION | CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
|
Pédopsychiatrie liaison | 7 | 7 | ||||
DAMPS | 7 | 7 | ||||
SUPEA | 7 | 7 | ||||
Hôpitaux | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 | |
Secteur privé professions médicales et sociales | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 | |
SPJ | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 | |
UMSA | 7 | 7 | ||||
AEMO | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 | |
Institutions spécialisées | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 | |
Ecoles | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 | |
Gymnases | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 | |
SES | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 | |
Tribunal des mineurs | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 | |
Entourage du patient | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 | |
Sociétés sportives, musicales, artistiques | 7 | 7 | ||||
SEI | 7 | 7 | 7 | |||
Infirmières santé publique | 7 | 7 | 7 |
De nombreuses relations avec lextérieur sont similaires pour tous les services, il sagit : de lAEMO, des écoles, des gymnases, des hôpitaux, des institutions spécialisées accueillant des enfants et des adolescents, lentourage des patients, le secteur privé des professions médicales et sociales, le SES, le SPJ et le tribunal des mineurs.
Par ailleurs, dautres relations sont spécifiques à certains services. Par exemple, pour le CTJA et lUHPA, une collaboration existe avec la DAMPS, la Pédopsychiatrie de liaison du CHUV, les sociétés sportives, musicales et artistiques, le SUPEA, le tribunal des mineurs et lUMSA. Les relations avec certains départements du CHUV existent de par leur situation géographique. En ce qui concerne les différentes sociétés et le tribunal des mineurs, cest dû à leur type de prises en charge. Pour le SMP, la PPP et le SPEA, une collaboration spécifique existe avec les infirmières de la santé publique et le SEI. Ces relations illustrent le travail dinvestigation fait pour les enfants confrontés à des difficultés.
Tous les services sont des centres publics. Il existe uniquement deux structures créées spécifiquement pour la prise en charge des adolescents du canton de Vaud : le CTJA et lUHPA. Le SMP, la PPP et le SPEA sont des lieux de consultation pour enfants et adolescents.
Les professions médicales et sociales telles que : infirmier, assistant social, éducateur, enseignant spécialisé et ergothérapeute sont exercées spécifiquement au CTJA et à lUHPA. Nous pouvons donc faire une corrélation entre le nombre de professions et de prestations offertes par ces deux services.
Comme chaque service offre des soins de pédopsychiatrie, un grand nombre de médecins et psychologues font partie des équipes pluridisciplinaires. Létude de ces services met en évidence le support psychothérapeutique pour la prise en charge des enfants et adolescents en difficultés psychologiques et psychiatriques.
Tous les services utilisent lapproche psychodynamique afin de comprendre la personne et agir au niveau des forces inconscientes. La systémique est aussi utilisée pour comprendre les situations, mais elle me semble moins importante. Or, je trouve, quun travail effectué avec la famille doit faire partie intégrante de la prise en charge du patient. Suite à mon expérience professionnelle et aux dires des personnes rencontrées, les troubles psychologiques peuvent aussi être des symptômes des problèmes familiaux. Je ne peux dire exactement quel est le travail effectué en collaboration avec les familles, cependant nous devrions encore plus développer ces liens.
A la suite de cette étude comparative, je prends conscience quil existe uniquement sept lits disponibles dans le canton de Vaud pour accueillir des adolescents en état de crise ; il sagit de lUHPA. Cette disponibilité me paraît plutôt faible. Si je me permets ce commentaire, cest à la suite dun entretien avec une des responsables de lUnité de crise pour adolescents et jeunes adultes à Genève, et des expériences du Centre Abadie à Bordeaux. En ce qui concerne les adolescents à comportements suicidaires ou en état de crise, il serait judicieux de leur offrir un temps de transition pour faire le point de la situation ; ceci permettrait aussi de ne pas banaliser le passage à lacte et daider le jeune à accéder aux soins. Comme le dit une des responsables de lUnité de crise pour adolescents et jeunes adultes à Genève, un adolescent sur dix suit réellement une psychothérapie à la sortie de lhôpital. Il faut donc trouver dautres moyens pour lencourager à accepter de laide.
Pour conclure, je dirais que cette étude permet de connaître, dune part les services psychiatriques du canton de Vaud prenant en charge des enfants et des adolescents, et dautre part les différentes prestations offertes par chacun deux. A la suite de cette étude, nous sommes donc en mesure de savoir où sadresser en cas de difficultés et quels sont les moyens utilisés pour traiter les patients. La deuxième partie de ce travail de recherche est théorique. Elle est introduite par un chapitre sur les différents référentiels théoriques sur le suicide et les tentatives de suicide.
3
___________________________
Il nexiste pas une définition universelle du suicide. De même, le sens de cet acte violent diffère dune personne à lautre. Le but de ce chapitre est dintroduire les termes de suicide et tentative de suicide. Les auteurs choisis abordent ces phénomènes selon différents référentiels théoriques sociologique, psychologique, psychiatrique et psychanalytique.
Ce chapitre parle du suicide en général. Cest pourquoi les théories présentées sont succinctes, elles offrent toutefois une palette des idées qui ont traversé notre siècle. Les chapitres suivants traitent du suicide et des tentatives de suicide à ladolescence.
1. Genèse du suicide et définitions des termes spécifiques
Je trouve important de mentionner lorigine du mot suicide et les différents termes spécifiques utilisés dans ce mémoire, afin de comprendre leur signification.
Le mot " suicide " est né au 17ème siècle, en Angleterre, afin de simplifier lexpression et lexplication dun même phénomène, cest-à-dire se donner la mort. Le mot suicide voit le jour sous sa forme latine dans le livre de lAnglais Sir Thomas Browne, Religio medici, publié en 1642.
Cest en 1734 que ce terme apparaît dans la langue
française ; il est introduit par lAbbé Prévost qui séjourna en Angleterre.
Si on dit " il se suicide " et non " il suicide ",
cest parce que ce terme signifie bien un crime contre soi-même. En Angleterre, le
médecin George Cheyne explique le suicide comme une maladie anglaise. Georges Minois
cite : " Cest essentiellement, semble-t-il, leffet de la
conjonction des progrès statistiques, de lévolution socio-culturelle de
laristocratie, du climat dintense rivalité religieuse et de lessor de
la presse, dans une atmosphère générale de crise des valeurs traditionnelles pour la
seconde fois en un siècle ".
Le suicide : lacte qui a réussi
La tentative de suicide : lacte qui a échoué
Les suicidés : ceux dont le geste a été mortel
Les suicidants : ceux qui ont fait une tentative et qui ont survécu à leur geste autodestructeur
Les suicidaires : ceux pour qui le risque de recours au suicide existe
Le comportement et la
conduite suicidaire : concerne aussi bien les idées suicidaires, la tentative que le suicide
2. Différents référentiels théoriques
Les quatre référentiels théoriques mentionnés sont sociologique, psychologique, psychiatrique et psychanalytique. Je les ai choisis, car les ouvrages sur le suicide sont souvent rédigés soit par les sociologues, les psychologues ou soit les psychiatres. Il faut, toutefois, nuancer les propos retranscrits ; ils offrent uniquement une vision densemble des différents référentiels.
2.1 Référentiel théorique sociologique
Jai choisi E. Durkheim pour présenter les thèses sociologiques sur le suicide, car il est le premier sociologue français à étudier le suicide en tant que phénomène de société, en expliquant le lien entre le suicide et lintégration de la personne dans la société.
Durkheim définit le suicide ainsi : " Le suicide est, avant tout, lacte de désespoir dun homme qui ne tient plus à vivre[...] Ce qui est commun à toutes les formes possibles de ce renoncement suprême, cest que lacte qui le consacre est accompli en connaissance de cause ; cest que la victime, au moment dagir, sait ce qui doit résulter de sa conduite, quelque raison dailleurs qui lait amenée à se conduire ainsi.[...] On appelle suicide tout cas de mort qui résulte directement ou indirectement dun acte positif ou négatif, accompli par la victime elle-même et quelle savait devoir produire ce résultat ". Toutefois, cette définition exclut toutes les personnes qui se suicident sans connaissance de cause.
Pour lui, le taux de suicide ne sexplique que sociologiquement. Lorsque lindividu est trop dépendant ou au contraire, indépendant de la société, ceci peut provoquer des troubles psychologiques. Et en ce qui concerne les causes privées de la personne, souvent citées en premier, elles sont lécho de létat moral de la société. Il cite : " Cest la constitution morale de la société qui fixe à chaque instant le contingent des morts volontaires. [...] Les mouvements que le patient accomplit et qui, au premier abord, paraissent nexprimer que son tempérament personnel, sont, en réalité, la suite et le prolongement dun état social quils manifestent extérieurement ".
Suite à ces affirmations, E. Durkheim met laccent sur trois catégories de suicides liés à lintégration : le suicide égoïste, le suicide altruiste et le suicide anomique.
2.2 Référentiel théorique psychologique
En parcourant plusieurs dictionnaires, je peux définir la psychologie comme la science du comportement des organismes. Elle a pour but de découvrir lintention derrière lacte, et derrière lintention, le mobile.
Dans le grand dictionnaire de la psychologie, le suicide est expliqué comme un acte rationnel ou pathologique : " Le suicide est soit un acte rationnel, exécuté en fonction de considérations morales, sociales, religieuses, philosophiques ou personnelles, soit au contraire un acte pathologique survenant alors au cours de lévolution de diverses affections mentales (dépression, délire chronique, démence, confusion, etc.) ou dune crise existentielle aiguë sous forme dun raptus anxieux autoagressif, raptus très différent du suicide prémédité de certains mélancoliques ou délirants ". Le terme raptus indique un comportement brusque et irrésistible permettant une décharge.
2.3 Référentiel théorique psychiatrique
Pour la psychiatrie, le suicide est le symptôme dune maladie. Dans Précis pratique de psychiatrie : " Le suicide est de tous les comportements le plus important de la symptomatologie dépressive. ". Ce commentaire souligne le sérieux dun acte pathologique dans la compréhension du suicide.
De ce fait, le suicide, réussi ou manqué, dénote une maladie que le psychiatre tentera de découvrir et de soigner. Le suicide chez les jeunes : " se caractérise par une conduite dont le déroulement entraîne ou peut entraîner la mort, et dont lexplication psychodynamique ne dépend pas de la réussite ou non-réussite, mais de la perspective du sujet qui commet cet acte ".
2.4 Référentiel théorique psychanalytique
Le terme psychanalyse est inventé par S. Freud en 1896. Ce terme nomme une méthode de psychothérapie fondée sur lexploration de linconscient avec laide des citations du patient et des interprétations du psychanalyste. S. Freud étant linventeur de la psychanalyse, jai choisi dexpliquer ce point de vue à partir de ses recherches sur le suicide.
Pour la psychanalyse, la force qui pousse le sujet à se détruire est soit une attaque dirigée sur un objet introjecté ou soit un rejeton de linstinct de mort par le biais de lintrojection. Le suicide est une forme dhomicide. Personne ne peut trouver lénergie nécessaire pour se donner la mort, sil ne tuait pas en même temps un objet avec lequel il sétait identifié. Le désir de mort est premièrement dirigé contre autrui, mais se tourne contre le sujet lui-même. Cest le désir de mourir, dêtre tué et de tuer lautre.
Une des interprétations de ce désir de mort est formulé par S. Freud de la manière suivante : " La voie est barrée vers la régression totale ; de ce fait, ne pouvant plus aller quen avant, la pulsion de mort se trouve engagée dans sa manifestation : celle dun " retour " à létat inorganique ".
Conclusion
Dans ce chapitre, les thèses sociologiques sont plus développées que les thèses psychologiques, psychiatriques et psychanalytiques. Ces dernières sont reprises dans les chapitres suivants sur le suicide et les tentatives de suicide à ladolescence.
Le point de vue sociologique souligne la relation pathologique du sujet avec la société lors dun suicide. Le point de vue psychologique, quant à lui, met laccent sur lacte suicidaire rationnel ou pathologique ; il est lié aux considérations morales, sociales, religieuses ou philosophiques, soit lié à une affection mentale.
Le point de vue psychiatrique considère lacte plus comme le symptôme dune pathologie. Lexplication de la conduite suicidaire est en corrélation avec une affection du système nerveux. Néanmoins, les psychiatres tiennent aussi compte de lhistoire du patient. Le point de vue psychanalytique, quant à lui, envisage le suicide comme un homicide, où lagression normalement dirigée contre autrui est dirigée contre lacteur.
Ces constatations me permettent dentrevoir un point commun entre les différentes thèses, celui du désir chez les personnes à comportement suicidaire de mettre fin à leurs jours. Hormis ce dernier point, il existe des divergences entre certaines thèses. Pour E. Durkheim, le suicide ne peut être expliqué que sociologiquement, car ce sont les causes sociales qui ont agi sur lindividu. Quant aux autres points de vue, ils reconnaissent tous, chez les personnes à comportement suicidaire, des troubles pathologiques liés à lindividu. En guise de conclusion, je peux dire que la définition du suicide nest pas universelle et que les interprétations de lacte suicidaire diffèrent selon les auteurs et leur référentiel théorique. Le chapitre suivant rappelle quelques aspects du développement de ladolescent afin de comprendre au mieux les conduites suicidaires à cette période de la vie.
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Introduction
Cette recherche est ciblée sur une population spécifique, les adolescents. Cest pourquoi, dans ce chapitre je me suis attachée à développer cette période de la vie. Ce rappel traite les définitions de ladolescence, le développement pubertaire, le développement psychologique et lautonomie.
Le terme adolescence vient du latin " adolescere " daté de la fin du 13ème siècle, qui signifie grandir. Ladolescence implique plusieurs éléments, tels que la croissance, la transformation, lévolution et la mouvance. Ce terme adolescence est souvent utilisé comme synonyme de puberté. Il existe tout de même une nuance entre ces deux termes. La puberté représente lensemble des maturations physiques et psychiques amenant lenfant à létat adulte, tandis que ladolescence est plus une période dans laquelle le jeune se transforme sur le plan affectif et comportemental, pour devenir un adulte avec une identité et un rôle sexuels .
En ce qui concerne le début et la fin de ladolescence, il est difficile de déterminer un âge, cela diffère dune personne à lautre : certains sont précoces et dautres se développent plus tardivement. Par exemple, pour D. Marcelli, médecin psychiatre, le début de ladolescence correspond au départ de la puberté, entre dix et douze ans chez la fille et entre douze et quatorze ans chez le garçon. Il estime la durée de cette période à une dizaine dannées, voir plus.
En Suisse, la majorité est fixée à 18 ans sur le plan juridique. Cependant, ce propos est bien aléatoire car daprès L. Not, F. Dolto, S. Freud, E. Erickson et dautres auteurs, ladolescence ne sarrête pas à 18 ans. Si je donne cette information, cest parce que la politique sociale en Suisse considère les adolescents de 18 ans comme des adultes. Leur prise en charge se voit modifiée dès cet âge, alors quils ont encore besoin dun accompagnement adapté à leur statut dadolescent et non dadulte.
2. Le développement pubertaire
La puberté dure environ cinq à six ans, toutefois les variations peuvent être grandes dune personne à lautre. Plusieurs indicateurs marquent la puberté, ils sont expliqués en quatre points par G. Theintz :
Lapparition du processus pubertaire est propre à chaque individu. Toutefois, le développement peut être influencé par plusieurs facteurs, tels que lalimentation, les conditions climatiques, le milieu de vie de la personne, etc. Par exemple, des carences alimentaires telles que les vitamines, les protéines, le calcium, le magnésium perturbent le développement physique et psychique de ladolescent. Par ailleurs, le milieu de vie de la personne et/ou une famille pathologique peuvent provoquer un arrêt de la croissance physique et/ou des troubles psychologiques.
D. Marcelli nous rend attentifs sur le double enjeu psychique suscité par la transformation pubertaire. Les nécessités pour ladolescent sont, dune part de maintenir un sentiment de continuité dexistence dans un corps en changement, et dautre part dintégrer cette transformation pubertaire dans le fonctionnement psychique. Ce désir de continuité entraîne des interrogations et des inquiétudes sur son corps en changement et sur son identité. Ce corps en mutation entraîne des interrogations sur sa beauté, son poids, ses difformités, ses désirs, etc.
Je constate que certaines différences physiologiques peuvent devenir source de souffrance si ladolescent peine à les accepter.
3. Le développement psychologique
Le développement, comme son nom lindique, sapplique sur
une longue durée. Les quatre éléments en interaction sont les facteurs physiologiques,
cognitifs, affectifs et sociaux. Ce chapitre cite uniquement les trois derniers ; les
facteurs physiologiques sont développés précédemment. Un grand nombre de théoriciens
tels que J. Piaget, S. Freud, E. Erickson,
H. Wallon, etc. ont étudié le développement de lenfant et de ladolescent.
Cest pourquoi, ce chapitre nexplique pas les étapes et stades du
développement cités par chaque auteur, mais synthétise uniquement quelques éléments.
Ladolescence est un remaniement de la personnalité centré spécialement sur la quête dautonomie, ce projet de soi. Dans le Petit Larousse, autonomie signifie : " indépendance, possibilité de décider pour un organisme, pour un individu, par rapport à un pouvoir central, à une hiérarchie, une autorité ".
Lautonomie est un enjeu important à ladolescence, elle fait appel au besoin de ladolescent de se séparer de ses parents. D. Marcelli explique ce besoin : " A travers le besoin de se séparer, ladolescent est à la recherche/conquête de ses " limites " aussi bien au plan de son corps propre (limite dans ses besoins physiologiques : alimentation, besoin de se vêtir... limites dans son style dhabillement, dans ses performances physiques), de ses compétences intellectuelles, que dans le domaine du lien social (un des modèles les plus typiques de cette recherche de limites par rapport aux interdits parentaux étant lheure de sortie ou de rentrée dune soirée) ".
Le processus dautonomie se vit parallèlement au processus dindividuation (individu dont la personnalité se différencie), car si lindividuation se passe mal lautonomie en sera affectée. Les parents jouent un rôle important dans le processus de séparation-individuation de ladolescent pour qui la séparation peut être angoissante. Le processus de séparation-individuation définit par P. Blos, met en conflit la difficulté des parents à renoncer en partie à leur fonction dautorité et la difficulté de ladolescent à sen détacher. Les parents comme ladolescent doivent accepter les changements.
Conclusion
Ce chapitre permet un survol des modifications et des enjeux à ladolescence, ce moment charnière dans la vie dun être humain. Ladolescence est une période dans laquelle le jeune se transforme sur le plan affectif et comportemental pour devenir un adulte avec une identité et un rôle sexuels. La puberté est lensemble de maturation physique et psychique; caractérisée par le déclenchement hormonal, la maturation des systèmes génitaux, le développement des caractères sexuels, la croissance et la taille.
Ladolescent se développe non seulement sur le plan physiologique, mais aussi sur le plan psychologique pour tendre vers lorganisation définitive de sa personnalité. Le développement psychologique croît par le biais du développement physique, cognitif, affectif et social. Une articulation existe entre chaque facteur du développement.
Nous lavons vu, les modifications à ladolescence peuvent aussi engendrer des épreuves. Cest pourquoi, le rôle des parents est très important pour le soutenir dans cette évolution.
Pour conclure, chaque adolescent vit ces changements dune manière personnelle. Les épreuves ne sont pas nécessairement sources de complication, encore moins de pathologie chez lindividu, mais font partie de lhistoire de la personne. Ces propos sur ladolescence permettent de passer au chapitre suivant qui traite spécifiquement les conduites suicidaires chez les adolescents.
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Les conduites suicidaires chez ladolescent
Introduction
Ce chapitre tente de comprendre dune part les éléments qui ont amené ladolescent au passage à lacte, et dautre part les significations de lacte. Quelquen soit laboutissement, cest-à-dire lissue fatale ou non : est-ce que ladolescent désire réellement en finir avec la vie ou est-ce quil souhaite tout simplement en finir avec cette vie-là ?
Ce chapitre développe quelques statistiques, les facteurs pouvant entraîner des conduites suicidaires et des idées suicidaires au passage à lacte. Je me réfère, à plusieurs reprises, à trois auteurs : P. Jeammet, F. Ladame et X. Pommereau. Pour des raisons pratiques, je ne cite pas les trois noms à chaque fois, mais je précise quil sagit de propos tirés de leurs ouvrages.
Il me paraît intéressant de relever quelques statistiques (tableau 23) quant aux nombres de suicides et tentatives de suicide chez les adolescents ; elles nous permettent de prendre conscience de lampleur de ce problème. Il est toujours difficile destimer le nombre de décès suite à un suicide, car lintention autodestructrice nest pas toujours explicite. Le suicide peut être camouflé par un accident, par une discrétion de la famille, etc. Il faut être prudent lorsquon examine des statistiques.
Selon loffice fédéral des statistiques, le suicide est la deuxième cause de mortalité chez les adolescents de 15 à 24 ans, après les accidents. Je tiens aussi à préciser que si le suicide obtient la deuxième place, cest parce que les décès dus à une maladie sont moins fréquents à cet âge. En 1994, la Suisse compte 188 décès, dont 43 par suicide chez les 15-19 ans (37 garçons et 6 filles). Le taux de mortalité sélève à 18,2/100'000 garçons et 3,1/100'000 filles.
Je trouve aussi intéressant dévoquer le taux de suicide chez les préadolescents et les jeunes adultes car, comme nous lavons déjà cité dans ce travail, ladolescence ne débute pas à 15 ans et ne sarrête pas à 19 ans pour tous les individus. De ce fait, chez les préadolescents de 10 à 14 ans, les taux sont moins élevés ; ils représentent tout de même 1,5/100000 garçons et 0,5/100'000 filles. La Suisse compte 86 décès à cet âge, dont 4 par suicide (3 garçons et 1 fille).
Par contre, le nombre de décès par suicide chez les 20 à 24 ans sélève à 111 (95 garçons et 16 filles) sur 468 décès. Les taux de mortalité pour cet âge sélèvent à 40,8/100'000 garçons et 6,9/100'000 filles.
Tableau 23 : Taux des décès par suicide en Suisse en 1994
Age |
Sexe |
Nbre de décès |
Taux de mortalité pour 100'000 habitants |
10-14 ans |
Masculin |
3 |
1,5 |
10-14 ans |
Féminin |
1 |
0,5 |
15-19 ans |
Masculin |
37 |
18,2 |
15-19 ans |
Féminin |
6 |
3,1 |
20-24 ans |
Masculin |
95 |
40,8 |
20-24 ans |
Féminin |
16 |
6,9 |
Concernant les tentatives de suicide, il est encore plus difficile de chiffrer le nombre, lacte nest souvent pas connu, particulièrement lorsque la tentative de suicide ne demande pas de soins somatiques. Selon J. Laget, le taux des tentatives de suicide est sous-estimé : " il est de lordre de 500 pour 100'000 en Suisse, deux fois plus élevé pour les filles que pour les garçons ". Quant aux récidives, F. Ladame compte 18% de récidives en début dadolescence et 40% en fin. Cette évolution montre la forte augmentation des récidives avec lâge. En outre, les conséquences médicales des deuxième ou troisième passages à lacte suicidaire sont, généralement, plus graves que le premier. En ce qui concerne les idées suicidaires, 20% des garçons et 40% des filles répondant à une enquête ont pensé au suicide et le quart dentre eux y pensent souvent.
En guise de conclusion, nous pouvons constater quil y a plus de suicides commis par les garçons que les filles. Par contre, il y a plus de tentatives de suicide commises par les adolescentes que les adolescents. Pour X. Pommereau, sil y a plus de tentatives de suicide commis par les filles, cest parce quelles expriment plus leur souffrance psychologique par un effacement, un retrait, en utilisant aussi un moyen plus doux pour sen aller qui nentraîne pas forcément la mort. Par contre, les garçons ont plus souvent recours à lagressivité et la violence, que ce soit par le biais dactes anti-sociaux ou par lutilisation dun moyen de se supprimer plus violent conduisant directement à la mort.
2. Les facteurs pouvant
entraîner des conduites
suicidaires.
Les tentatives de suicide ne font pas partie du développement normal de ladolescent. Il existe une différence entre les remises en question dordre existentiel et la détresse mentale rencontrée chez les adolescents à conduites suicidaires.
Les éléments déclencheurs de la tentative de suicide tels
quexamen échoué, rupture amoureuse, chômage, cachent souvent une souffrance dont
les origines sont plus profondes. Le désespoir de ladolescent suicidaire, qui le
mène au passage à lacte suicidaire, est, selon
X. Pommereau, conjugaison des facteurs personnels, familiaux et environnementaux qui
sentremêlent et se renforcent réciproquement. Ce qui mamène à les
développer ci-dessous.
Les auteurs de référence, H. Caglar, M. Klein, disent que la tentative de suicide est un acte pathologique. Pour X. Pommereau, ladolescent a des souffrances psychiques qui nécessitent dêtre reconnues et apaisées. Des troubles de la personnalité tels quune émotivité excessive, des sentiments de tristesse, de la colère, de la rage, de lirritabilité, une impulsivité et une tendance au passage à lacte, sont souvent associés à ce comportement pathologique. Par ailleurs, lacte suicidaire peut aussi montrer le début dune affection psychiatrique évolutive telle quune maladie psychotique des troubles de lhumeur. Cependant, le passage à lacte est plus souvent lié à un échec du processus développemental quà une maladie psychiatrique.
En ce qui concerne les différentes psychopathologies, 40 à 60 % dadolescents suicidants souffrent dun épisode dépressif majeur. Un adolescent sur dix souffre de troubles psychotiques et sept adolescents sur dix présentent des troubles anxieux.
Limportance des épisodes dépressifs, le lien entre échec du processus développemental et passage à lacte, mamène à traiter spécialement la dépression et la perspective analytique, laquelle explique le processus développemental. En outre, je trouve intéressant de nommer ce modèle théorique car un bon nombre de psychiatres y fait référence.
La dépression
En reprenant ce qui a été dit précédemment, les symptômes dépressifs nannoncent pas forcément une maladie psychiatrique. " Il ny a donc pas dadolescence normale sans dépression ou, plus correctement, sans moments dépressifs, liés aux sentiments de pertes, sans pour autant quil sagisse de " maladie dépressive " ".
Cette idée peut entraîner une banalisation des symptômes, or il faut être attentif aux affects dépressifs persistants et savoir les reconnaître pour les traiter à temps. Je vais parler maintenant des significations et traits cliniques de la dépression.
Le terme " dépression " est utilisé dans de nombreux cas, le sens donné nest pas toujours le même. F. Ladame présente la dépression en tant quaffect de tristesse, symptôme et maladie.
La dépression nest pas facile à diagnostiquer chez ladolescent. Contrairement à ladulte, ladolescent nexprime pas forcément directement sa déprime. Le dire serait avouer une faiblesse contre laquelle il lutte. P. Jeammet dit que pour ladolescent, il faudra chercher la réaction dépressive derrière langoisse, alors que pour ladulte, cest souvent la dépression qui masque langoisse.
La dépression se manifeste de plusieurs manières, elle varie dun adolescent à lautre. Toutefois des traits cliniques habituels peuvent être repérés, ils sont cités par P. Jeammet :
Linhibition est aussi souvent une forme dexpression de la dépression. Calmement et sans alerter son entourage, son champ dintérêt se restreint. Finalement ce retrait peut engendrer un refus des liens affectifs par ladolescent. Ce retrait doit être sérieusement pris en compte car ladolescent doit, de toute façon, vivre le processus de séparation-individuation. Cependant, comment peut-il le vivre, si ses relations avec sa famille et son groupe de pairs sont perturbées ?
Les auteurs de référence, M. Klein, mettent en relation la dépression avec les conflits de ladolescent. Une problématique dépressive existe souvent derrière la plupart des troubles du comportement de ladolescent. Lexpression des conflits intrapsychiques à cet âge, peut sexprimer au travers dépisodes dépressifs.
Perspective analytique
Jai choisi damener la perspective analytique à partir du point de vue kleinien. Les propos suivants sont relatés par M.-H. Samy. Il développe premièrement la théorie kleinienne, à savoir les positions schizo-paranoïde et dépressive. Ensuite, il théorise les aspects suivants du développement adolescent, à partir de la théorie kleinienne et les développements post-kleiniens : lévolution du niveau de symbolisation, latténuation du clivage et la tolérance de lambivalence, le rôle de lidentification projective, laltération de la perception temporelle et son rôle dans le travail de deuil. Je vais essayer de synthétiser les aspects susmentionnés.
La position schizo-paranoïde (abrégée S-P) et la position dépressive (abrégée D) sont deux étapes importantes de la croissance psychique. La position S-P est provoquée par linstinct de mort et ressentie comme une angoisse de persécution. " Le nourrisson devra cliver lobjet (et par conséquent le Moi) en bon et mauvais objets, afin de préserver le premier et permettre ainsi létablissement dun bon objet externe et interne. Ces mécanismes infantiles sont à la base des défenses de clivage et didéalisation que nous retrouverons plus tard ". Le nourrisson na pas conscience du monde extérieur à sa naissance. Le sein de la mère fait partie de lui. Par la suite, le Moi se développe. Le bébé devient ambivalent par rapport au premier objet (la mère). Il commence à projeter ses pulsions destructives sur le mauvais objet, celui par lequel il se sent persécuté. Il apprend que les désirs (pulsions) ne peuvent pas toujours être satisfaits immédiatement. Il doit donc prendre en considération la réalité et différer la satisfaction de ses désirs.
Lintrojection du bon objet permet latténuation de langoisse persécutive et la mise en place de la position D. Laccès à la position D entrave la possibilité détablir une relation avec lobjet total. Le passage de la position S-P à la position D, signale laccès à lambivalence et la capacité de prendre lautre en compte.
Quand lenfant prend conscience que lamour et la haine sont dirigés vers la même personne, il réalise que la haine a pu blesser, alors il tentera de réparer. Langoisse dépressive sexplique par la peur de perdre lobjet unifié. Selon M.-H. Samy, le développement à ladolescence correspond aussi à un passage de la position SP à la position D ; les aspects de ce développement sont développés ci-dessous.
A ladolescence, lindividualisation demande la transformation des liens avec lobjet premier (la mère). Ceci nécessite le passage de la position SP à D, qui requiert la formation du symbole et de la représentation verbale pour remplacer cette perte. Cependant, ce processus dindividualisation peut être perturbé par des carences affectives et des séparations multiples. Pour M. Klein, ladolescent peut se retrouver immobilisé dans une relation conflictuelle avec lobjet premier, ce qui peut gêner la formation du symbole. Il en résulte une difficulté à nommer et décrire ce quil ressent.
Si latténuation du clivage et la tolérance de lambivalence, cités précédemment, sont absents chez ladolescent, il peut souffrir dune dichotomie : " ... il sagit dun système du tout ou rien. La situation relationnelle devient insoutenable car le moindre rejet équivaut à une perte totale ". Ladolescent suicidaire doute de la prééminence de lamour sur la haine. Il est très sensible au rejet.
Ces éléments me font penser à une situation de stage. Il sagit dun adolescent qui, lorsquil se trouvait en situation conflictuelle avec un éducateur ou un des résidents, il nous parlait de son désir de mourir en se jetant sous un camion. Le moindre sentiment de rejet était équivalant, pour lui, à une perte totale. Cet adolescent a été séparé de sa mère en bas âge. Je pense que cet éloignement de lobjet maternel a entraîné des difficultés à tolérer lambivalence.
Lidentification projective cherche, par le biais de la possession et du contrôle de lobjet, à établir une identité du Moi. Ceci se ressent chez ladolescent à travers son besoin dappartenir à un groupe de pairs qui lui dicte un style vestimentaire, musical, un mode de pensée, etc.
Avec latténuation de langoisse persécutive, le besoin de contrôler lobjet va diminuer. Progressivement lidentification projective va laisser la place à lidentification introjective et à la position D. Lidentification introjective cest : " la manière dont un sujet fait entrer fantasmatiquement des objets du dehors au dedans de sa sphère dintérêt ".
Dans cette perspective, le comportement suicidaire est le dernier moyen de contrôle exercé sur lentourage. Ce comportement montre léchec du développement de ladolescent et le maintien de lidentification projective.
Ladolescent perturbé peut vivre dans la réalité immédiate et laisser peu de place aux souvenirs et aux projets davenir. Etant donné quil peut être difficile pour lui de percevoir le temps en termes de durée et de continuité, il a de la peine à donner un sens à sa vie et un but qui apaiseraient sa souffrance psychique. Tous changements menacent son besoin dimmuabilité, de permanence, qui sont importants pour la formation de son identité et de son autonomie.
Lorsque lon parle de conduites suicidaires, il est important de prendre en compte également le réseau relationnel de ladolescent, car les interactions existantes influencent le développement de ladolescent.
F. Ladame, X. Pommereau, M.-H. Samy constatent que bon nombre dadolescents à conduites suicidaires vivent des conflits intra-familiaux. Les conflits peuvent être dus à léclatement de la famille, à des troubles psychiatriques dun des parents, à une violence psychique ou physique, etc. Lenfant a besoin de stabilité et une rupture déquilibre, au sein de la famille, entraîne le plus souvent des difficultés.
Les ruptures occasionnent forcément des modifications dans la vie de ladolescent, tels que changement de domicile, de quartier, décole, damis, dappartement, etc. Des conséquences peuvent se faire sentir dans leurs relations avec autrui, dans leur sexualité, à lécole où les problèmes émotifs et relationnels prennent parfois le pas sur leur motivation à apprendre et leurs performances.
Les difficultés liées aux rapports intra-familiaux peuvent aussi être vécues à lintérieur dune cellule familiale, mais où le climat familial est pathogène. Même si les parents vivent toujours ensemble, ils peuvent aussi ne plus sentendre, avoir recourt à la violence verbale et/ou physique, vivre un " divorce émotionnel ", etc.
Je tiens à préciser que tout éclatement de la famille nucléaire nest pas synonyme de conduites suicidaires chez les enfants. Mais selon M.-H. Samy par exemple, ce qui semble spécifique ce sont les séparations multiples et les carences affectives des deux parents.
2.3 Les facteurs environnementaux
Plusieurs événements sociaux peuvent influencer le passage à lacte suicidaire, je vais reprendre quelques facteurs cités par X. Pommereau : labsence demploi, lisolement social, le contexte socio-économique et leffondrement de certaines valeurs.
Labsence demploi
Le développement industriel a engendré dénormes progrès ayant des conséquences sur lespérance de vie des individus, le confort matériel, lévolution des techniques électroniques et de communication. Cependant, cette mécanisation a aussi provoqué une diminution des emplois. Comme le dit X. Pommereau, un écart se crée entre les personnes dont lavenir semble prometteur et celles pour qui lavenir est incertain. Le travail en Suisse est très valorisé ; il offre statut social, sécurité, sens à la vie, réseau social, reconnaissance du travail accompli, etc. En écoutant les dires des chômeurs, je constate que labsence demploi peut engendrer divers phénomènes tels quune dépendance financière, une dévalorisation de la personne, des sentiments dinjustice, le dégoût de la vie, labsence de projet à long terme, etc.
Lisolement social
A quoi bon vivre si lindividu est seul, sans contact, sans vis-à-vis. Le groupe social donne une raison de vivre, offre des liens entre les individus, par conséquent des forces, du réconfort, de la compréhension. Si nous allons plus loin dans la réflexion, les liens sociaux et damour rattachent les personnes à la vie, ils sont importants pour lépanouissement de lindividu. Nous existons en partie dans le regard des autres, au travers du prix que lon a aux yeux des autres. Or, ladolescent suicidaire, qui souffre dune dépression, peut avoir comme trait clinique une rupture des liens qui le rattachent aux êtres vivants. Ce fait est dautant plus problématique pour lui, car à cet âge ladolescent entre dans le processus de séparation-individuation. Ce qui veut dire que lentourage est non seulement important pour son épanouissement, mais il joue aussi un rôle dans la recherche dautonomie qui caractérise ladolescence.
Le contexte socio-économique
Les zones urbaines les plus touchées par la crise économique nindiquent pas un taux de suicide plus élevé quailleurs. En plus, il y a des jeunes suicidaires dans les familles de tous niveaux et de toutes catégories professionnelles. Par contre, selon C.-L. Moser et S. Blum-Moulin, des problèmes graves peuvent découler du décalage socio-économique et culturel entre le milieu familial et le milieu social de ladolescent. Lécole, le groupe des pairs et le travail peuvent confronter ladolescent à dautres valeurs sociales que celles rencontrées dans sa famille.
Leffondrement de certaines valeurs
La société occidentale actuelle noffre plus de rituels reconnus et cohérents. Cette perte du rite est, selon X. Pommereau, liée à leffondrement des idéologies et des croyances. Cet aspect ne donne pas aux adolescents une confiance en un avenir prometteur. Lindividualisme laisse les adolescents maîtres de leur destinée, cependant cet individualisme les laisse aussi seuls et fragiles face aux difficultés de la vie.
Il me semble que la société occidentale délaisse de plus en plus ses fondements judéo-chrétiens qui lui assuraient une stabilité. Lorsquil y a une remise en question de valeurs fondamentales, les individus perdant leurs points de repères peuvent se trouver fragilisés. En prônant la liberté, lindividu sest retrouvé seul, sans norme, ne sachant plus sur quelle base construire sa vie. La réussite professionnelle et la richesse ont séparé les hommes. E. Durkheim dit que le penchant au suicide est aggravé dans les milieux instruits. Cette aggravation ne résulte pas, pour lui, dun développement intellectuel, mais est due à laffaiblissement des croyances traditionnelles et à létat dindividualisme moral qui en résulte.
Labsence de repères favorise une déviance comportementale et lattrait des conduites à risque. X. Pommereau nous explique cet attrait de la manière suivante : " Moins la réalité externe lui offre des représentations symboliques stables et solides de limites contenantes et supportables, moins le sujet se sent en sécurité dans lespace quil a à explorer et plus il doit les " bricoler " lui-même ".
3. Des idées suicidaires au passage à lacte
Selon C.-L. Moser et S. Blum-Moulin, penser à la mort est structurant pour ladolescent, car cette période est le deuil de lenfance et dimages parentales. Cest aussi à ce moment-là que la capacité dintellectualiser la mort se met en place. Elle devient une préoccupation essentielle pour ladolescent. Il prend conscience que son corps nest pas immortel. " Ladolescent éprouve un réel plaisir à manier lidée de sa propre mort, car il se donne ainsi le sentiment de se définir, de se connaître, de maîtriser ses pulsions de mort et de sonder sa liberté ".
Comment une idée suicidaire évolue-t-elle en acte-suicide ? Je propose daborder ce thème en développant les finalités recherchées dans les conduites suicidaires, le passage à lacte suicidaire et les moyens utilisés.
3.1 Les finalités recherchées dans les conduites suicidaires
Comprendre le but des conduites suicidaires semble important, cependant il est difficile de donner des significations à lacte. F. Ladame, A. Haim, H. Chabrol pensent en effet que la signification des conduites suicidaires est à rechercher plus profondément, principalement au niveau de linconscient. Je vais parler maintenant de quelques significations psychologiques générales du suicide, du passage à lacte suicidaire et des moyens utilisés.
Quelques significations du suicide
Voici quelques significations psychologiques générales du suicide, présentées par P.-B. Schneider :
En analysant cette liste, nous constatons quil est possible de donner plusieurs sens à chaque passage à lacte, et que la tentative de suicide na donc pas comme unique but de rechercher la mort. " Dire que cest toujours la mort qui est en question ne signifie pas pour autant que lobjet du suicidant est de mourir, mais se reconstruire, renaître après une mort qui ne serait pas définitive ". Lacte sinscrit dans une histoire personnelle mais aussi familiale ; lentourage se doit de porter attention aux messages transmis au travers des menaces et des tentatives de suicide afin déviter un nouveau passage à lacte qui, selon les psychiatres, risque dêtre plus violent que le précédent.
Le passage à lacte suicidaire
Des heures ou des semaines avant le passage à lacte, ladolescent envoie des signes alarmants verbaux et non verbaux ; par exemple : " jaimerais renaître ailleurs... je veux faire un long voyage... la vie na plus de sens... cest trop dur... " ou alors des signes non verbaux tels que remettre en ordre ses affaires, léguer des objets, se replier sur soi-même, sisoler, se sentir rejeté par les groupes de pairs, etc.
Daprès les spécialistes, tous les adolescents ayant fait une tentative de suicide ou un suicide avaient parlé avec un médecin ou des personnes de leur entourage pour signaler, à leurs manières, leur mal-être physique et/ou psychique. Selon E. Robins et al., 69% des suicidés avaient communiqué leur intention suicidaire. Selon X. Pommereau, les idées suicidaires naissent et disparaissent en fonction des frustrations affectives et des réparations provisoires, mais elles peuvent aussi sincruster. Il dit que les idées noires sont plus intenses et nombreuses en fin de journée, cest pourquoi les passages à lacte ont souvent lieu en soirée.
Avant le passage à lacte, une montée rapide de langoisse devient de plus en plus envahissante chez ladolescent. Lacte permet de fuir cette insupportable anxiété et tension, et tente dévacuer cette souffrance hors du psychisme où elle devrait être éprouvée. Au travers de lacte, le sujet manifeste son désir de changement. Il est prêt à mettre en péril son corps pour soulager ses peines.
Le passage à lacte chez ladolescent suicidaire prend donc
la place de lidée de suicide.
F. Ladame considère que " le moment de la tentative est toujours un moment
profondément psychotique " où sopère une perte temporaire de
" lépreuve de la réalité ". Il y a une non-maîtrise de
ses mouvements et une décharge rapide de ses pulsions. Selon H.-M. Samy, il y a, au
moment de lacte suicidaire, un déni de la peur de la mort. Langoisse de la
mort est devenue moins intense, comme cest le cas pendant lenfance.
La période qui suit immédiatement le passage à lacte est en
général vécue comme un soulagement (par ces adolescents), car le geste a dissipé la
souffrance, langoisse. Cependant
F. Ladame précise que ce moment dapaisement nest que passager. Finalement la
tentative de suicide na pas résolu les problèmes, la détresse psychique est
toujours présente. Cest à ce moment-là, que les personnes entourant le suicidant
doivent être vigilantes et prendre au sérieux la tentative de suicide. La mise en place
rapide dune prise en charge adéquate évitera, dune part le déni de
ladolescent et de son entourage, et dautre part une récidive.
Selon C. Tishler, les adolescents ayant survécu à leur geste autodestructeur se sont révélés plus anxieux, sensibles dans les relations avec autrui, plus déprimés, limage de soi se trouve plus dévalorisée. En minspirant de cette dernière idée, je peux ajouter que si aucun changement et prise de conscience ne seffectuent chez ladolescent après la tentative de suicide, lincompréhension de lacte peut favoriser de nouvelles conduites suicidaires.
Les moyens utilisés
Une différence des moyens utilisés existe entre les hommes et les femmes. Généralement, les hommes utilisent des moyens plus actifs et plus violents que les femmes pour mettre fin à leurs jours. X. Pommereau formule une hypothèse en disant que les hommes ont besoin dexprimer leur virilité et le fait de rater le geste signifierait une lâcheté ; les moyens utilisés sont donc expéditifs, comme la strangulation, la pendaison ou les armes à feu. Quant aux filles, leur respect de lintégrité corporelle expliquerait les moyens utilisés plus passifs comme les médicaments et le gaz.
Cependant, en ce qui concerne les tentatives de suicide, le moyen le plus utilisé en Suisse et en France, est la prise de médicaments. Selon F. Ladame, trois adolescents suicidants sur quatre utilisent ce moyen. Actuellement, les plus utilisés sont les tranquillisants. Ce phénomène est lié au fait que le corps médical prescrit plus facilement des tranquillisants à la place des barbituriques très vendus il y a quelques années.
Les médicaments utilisés se trouvent en général dans la pharmacie familiale. Ils sont consommés par les parents ou ladolescent lui-même après une prescription médicale.
F. Ladame et X. Pommereau constatent que lorsque ladolescent passe des idées suicidaires à lacte, généralement il utilise ce quil a sous la main. En outre, la tentative de suicide se déroule souvent au domicile de ladolescent.
Cette dernière constatation minterpelle quant à la forte utilisation de médicaments comme moyen de passage à lacte suicidaire. Puisque lacte est souvent impulsif, pourquoi les adolescents nutilisent-ils pas dautres moyens présents sous la main ? Est-ce que le moyen utilisé fait partie des phénomènes de mode ? Ou est-ce propre à la tentative de suicide dont la finalité nest pas forcément la mort ?
Conclusion
Une conduite suicidaire aussi minime soit-elle, ne peut être considérée comme une réponse normale aux conflits de ladolescent. En effet, les tentatives de suicide sont à prendre au sérieux ; quil soit réussi ou raté, lacte démontre une souffrance psychologique. Le nombre des tentatives de suicide est difficile à estimer ; lintention auto-destructrice nest pas toujours explicite et connue par le corps médical, par autrui et par le sujet lui-même.
Les facteurs pouvant entraîner les conduites suicidaires sont dordre personnel, familial et environnemental ; ils sentremêlent et se renforcent réciproquement. Une problématique dépressive et anxieuse existe souvent derrière des comportements suicidaires. Toutefois, cela ne signifie en aucun cas que tous les adolescents dépressifs auront des comportements suicidaires. Par contre, dautres formes de manifestations dune problématique dépressive peuvent avoir lieu telles que les plaintes somatiques, les conduites à risque, les différentes déviances, etc. Quant aux conflits intra-familiaux, ils sont vécus fréquemment par ces adolescents.
En définitive, la tentative de suicide na pas résolu les problèmes, la détresse psychique est toujours présente. Cest pourquoi, les personnes entourant le suicidant doivent mettre en place une prise en charge adéquate afin dapaiser les souffrances de ladolescent. Ne disons-nous pas que les jeunes sont lavenir de demain ? Alors soignons les jeunes et nous soignerons lavenir...
A la suite de ces propos théoriques, nous passons à la dernière partie de ce travail de recherche qui est pratique. Elle débute par le résumé dun ouvrage concernant lintervention psychodynamique adaptée à des personnes suicidaires.
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Intervention
psychodynamique adaptée à
des personnes suicidaires
Introduction
Ce chapitre tente de résumer les propos tirés de louvrage de J. Mercier, enseignant et psychiatre, dont le référentiel théorique est la psychanalyse. Lauteur apporte aux intervenants sociaux et psychosociaux un modèle préventif, dintervention et de post-intervention adapté à la personne présentant des comportements violents et suicidaires.
Lapproche présentée nous fait prendre conscience que les comportements suicidaires sont avant tout des symptômes. Il est dit : " Pour contrer ces symptômes, il faut en connaître lorigine, les causes, le niveau de détresse quils expriment et la satisfaction recherchée par la personne qui utilise ces comportements ". Sil sagit dun processus dynamique, cest parce que les besoins et désirs dune personne évoluent et sont propres à chaque être humain. Ils varient aussi en fonction des situations vécues. En outre, le modèle dintervention proposé utilise le référentiel théorique analytique, pour identifier les caractéristiques dune personne et son niveau de détresse.
Nous avons vu quune des possibilités de prise en charge des adolescents suicidants est le placement dans un foyer ; cest pourquoi, je trouve important, pour les éducateurs, de connaître ce modèle dintervention.
Dans ce chapitre, je présente la composition dun cycle de réactions, les besoins des personnes, les niveaux de détresse, le programme dintervention et quelques réflexions personnelles sur ce modèle.
1. La composition dun cycle de réactions
Le cycle représente une répétition de comportements. Selon lauteur : " Le cycle est la composition dun ensemble de réactions qui font suite à la présence dun type de frustration ".
Tableau 24 : La composition dun cycle
Le cycle est constitué de trois étapes :
1. La période de tension qui provoque le stress et par la suite de lanxiété.
2. La période " acting out " qui permet de diminuer la tension au travers de comportements
violents ou de conduites suicidaires.
3. La période de culpabilité et de réparation, lorsque la personne désire rompre le cycle.
Dans le cas contraire, des sentiments de haine, de mépris ou de non-responsabilité
sinstallent.
La répétition de comportements violents ou idéations suicidaires peut devenir automatique. Il faut donc briser le cycle des comportements utilisés pour soulager la tension et lanxiété. La seule façon de le faire est de changer lenchaînement en analysant chaque élément, cest-à-dire : découvrir les sources de stress, les ressources pour passer à lacting out et les réactions du sujet à la suite du passage à lacte de violence ou de comportement suicidaire. Pour ce faire, ladolescent a besoin dune personne extérieure qui laide dans ces démarches et à accepter de sinvestir.
Pour pouvoir étudier le modèle dintervention psychodynamique, nous devons tout dabord analyser les niveaux de détresse de la personne adoptant les comportements violents et suicidaires. La détresse est provoquée par la non-satisfaction des besoins dun individu, qui sont : dêtre aidé et soutenu, dêtre responsable et de simpliquer dans son milieu. La détresse peut être de niveau plus ou moins élevé et laugmentation du niveau accentue aussi les risques des comportements destructeurs et/ou autodestructeurs. Lauteur présente neuf niveaux de détresse.
3. Le programme dintervention
Quatre objectifs forment le programme dintervention psychodynamique : développer des mécanismes daide et de soutien de qualité, favoriser la responsabilisation et lautonomie, offrir des services spécialisés et utiliser les forces du milieu.
3.1 Développer des mécanismes daide et de soutien
Pour se faire, lauteur propose de diminuer lanxiété, dapprendre à communiquer, de développer un référentiel sécuritaire, de considérer la personne comme unique et orienter le choix de ses amis.
3.2 Favoriser la responsabilisation, lautonomie
Lauteur propose dapprendre à la personne qui elle est, de favoriser linvestissement personnel, de favoriser la responsabilisation et lautonomie.
3.3 Offrir des services spécialisés
Si la personne continue de ne pas se responsabiliser, cest que la prise en charge nécessite une aide plus adaptée à son niveau de détresse ; cest-à-dire un groupe en relation daide et une thérapie de groupe.
3.4 Utiliser les forces du milieu
Ce dernier point présente les possibilités dutiliser les forces du milieu, cest-à-dire des médiateurs et des leaders.
4. Réflexions personnelles sur ce modèle
A la suite de cette présentation du modèle dintervention, je désire apporter quelques réflexions personnelles. Jai choisi de relever quelques points : structure du livre, modèle dintervention, comportements à répétition, indifférence, la responsabilisation et lautonomie, former les intervenants et le suivi des familles. Ils sont cités dans lordre chronologique du résumé.
Je trouve la présentation du modèle simple et accessible, pour un bon nombre de personnes. Japprécie sa structure ; débuter avec quelques hypothèses explicatives permet de situer le contexte dans lequel et pour lequel lacte est commis. Continuer avec les besoins des personnes fait prendre conscience que chaque individu en a ; léducateur doit être attentif à ces derniers et à la peur que peut engendrer leur non-satisfaction. Le point suivant concerne les niveaux de détresse en lien avec les besoins de la personne. En effet, le niveau de détresse peut être plus ou moins élevé selon les personnes. A mon avis, ce dernier point met en évidence les difficultés que peuvent vivre certaines personnes à comportements violents et suicidaires.
Pour ma part, ce modèle est très intéressant. Il offre des éléments concrets sur la compréhension des comportements violents et suicidaires, et donne des conseils sur lintervention. Un élément ma tout de même surprise dans cette lecture ; le modèle dintervention est le même pour les personnes à comportements violents et suicidaires. A nouveau, jai pris conscience que la violence administrée aux autres ou contre soi résulte de problèmes identiques.
La présentation de la composition dun cycle de réactions est très intéressant. Il permet de comprendre que lacte violent surgit, non pour le bon plaisir de la personne, mais pour diminuer lanxiété. Lénervement et le rejet que provoquent parfois les personnes violentes et agressives, satténuent lorsque nous comprenons les étapes de ce cycle de réactions. Il ne faut pas rejeter la personne, mais le moyen utilisé.
Lauteur dit que lindifférence signifie aussi lincapacité dassumer les conséquences de ses actes. A mon avis, une personne à comportements suicidaires, nest pas indifférente à ce qui lui arrive. Pour ma part, le terme " indifférence " est fort, il est peut-être plus adéquat pour les crimes que pour les conduites suicidaires. Au contraire, la personne ne témoigne pas de lindifférence mais envoie des messages, désire changer quelque chose, en finir avec cette insupportable souffrance, etc.
Une des étapes du programme dintervention est de favoriser la responsabilisation et lautonomie. Lauteur met laccent sur linvestissement personnel, devenir responsable, assumer ses erreurs, se fixer des buts dans la vie, etc. Je suis daccord avec ces propos, toutefois, je trouve que la personne est livrée à elle-même et doit sen sortir toute seule. Lauteur parle des mécanismes daide et de soutien, mais si la personne déprime et/ou souffre dune psychopathologie, elle ne peut prendre part à cette responsabilisation et autonomie toute seule. Je pense quil faut nuancer ces propos et préciser que rendre responsable prend du temps et demande un accompagnement encore plus intense pour ces personnes-là.
Pouvons-nous demander à des enfants et adolescents de devenir responsable et autonome ? Ceci me semble difficile et spécialement pour les enfants, car ils ont encore besoin des adultes. Ils comprennent beaucoup, mais ce dont ils ont le plus besoin avant les théories, cest lamour, laffection et la confiance. Nous devons toutefois, en tant quéducateur, les écouter, leur apprendre à se comporter correctement, à communiquer, à vivre, etc. Jai limpression que ce programme dintervention est plus approprié à des adolescents et des adultes. Il demande aussi un certain seuil de réflexion. Toutefois, avec quelques adaptations, il pourrait être utilisé pour le suivi denfants.
Un élément me semble aussi important à relever : cest celui dinformer et suivre les intervenants, pour quils puissent à leur tour conseiller et adresser les patients auprès de différents services. Lauteur ne parle pas non plus du suivi des intervenants, alors quil est primordial. Les comportements violents et suicidaires sont difficiles à gérer. Des supervisions et lieux découte seraient adéquats, pour permettre aux intervenants de se décharger. Ces deux points sont développés dans le chapitre suivant.
Un travail effectué avec les familles nest pas cité dans cet ouvrage, alors quil est important dans la prise en charge des patients. Si la personne a des comportements violents et suicidaires, ceux-ci peuvent être liés à des conflits intra-familiaux. Les enfants et adolescents ne peuvent pas faire face aux conflits, tout seul. Dans ce cas-là, lappui des intervenants est important. En plus, ce dernier peut faire prendre conscience à la famille des difficultés de chacun et travailler ensemble. Je dois aussi préciser quun seul ouvrage ne peut sans doute pas tout dire, et cest pourquoi ce sujet nest peut-être pas abordé.
Conclusion
Ce programme dintervention me semble pertinent. Il offre des pistes de réflexions et conseils pratiques aux intervenants sociaux prenant en charge des personnes à comportements violents et suicidaires.
La composition dun cycle de réactions comporte trois étapes ; la période de tension, la période de lacting out qui permet de diminuer cette tension, et la période de post-événement qui peut être de lordre de la réparation ou de la haine, du mépris, etc.
Les niveaux de détresse sont provoqués par la non-satisfaction des besoins de la personne qui sont : dêtre aidée et soutenue, dêtre responsable et de simpliquer dans son milieu. Le programme dintervention psychodynamique sappuie sur ces besoins et propose quatre objectifs ; développer des mécanismes daide et de soutien de qualité, de favoriser la responsabilisation et lautonomie, et utiliser les forces du milieu.
Le référentiel théorique de ce programme dintervention mamène à constater que je nai pas trouvé, à mon grand étonnement, douvrages sur la prise en charge éducative des adolescents suicidants, écrits par des éducateurs. Le seul livre trouvé est louvrage dun psychiatre. Toutefois, ce livre nest pas écrit spécialement pour les éducateurs, il manque des éléments propres à la pratique de cette profession. Dans le chapitre suivant, jai tenté de mettre en avant quelques réflexions sur lapproche éducative des adolescents à comportements suicidaires. Je tiens à préciser que je nai pas repris les éléments de ce modèle et créé à partir de ceux-ci un concept de prise en charge. Jai désiré, à la suite de ma pratique professionnelle et de lélaboration de ce travail de recherche, mettre par écrit mes réflexions personnelles sur la prise en charge éducative des adolescents suicidaires. En définitive, le modèle dintervention présenté et mes réflexions personnelles sont complémentaires.
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Réflexions sur
lapproche éducative
des adolescents à conduites suicidaires
Introduction
La prise en charge des adolescents avant ou après une tentative de suicide se ressemble. Car lacte na rien changé en lui-même si ce nest le fait davoir pu exprimer son insupportable souffrance. En outre, si rien nest mis en place pour provoquer un changement dans la vie de celui-ci, il va réitérer son acte. Cest pourquoi, cette approche éducative concerne la prévention et la post-intervention auprès dadolescents à conduites suicidaires.
Afin déviter un passage à lacte suicidaire, que peut faire léducateur ? Personnellement, je nai pas suivi dadolescents suicidaires. Par contre, lélaboration de ce travail de recherche, mon expérience professionnelle, la rencontre des différents responsables des services psychiatriques et de foyers mont permise de me positionner et penser une approche éducative. Toutefois, chacun perçoit celle-ci avec sa sensibilité, son expérience et ses croyances ; cest pourquoi les propos relatés ne sont pas universels et méritent dêtre nuancés.
Dans ce chapitre, je présente la situation dun adolescent et développe les points suivants : la prise en charge, lobservation, reconnaître la souffrance, le projet éducatif, le bilan de la situation et le besoin daide de laidant.
Comme support aux réflexions sur lapproche éducative, prenons une situation vécue lors dun stage. Il sagit dun jeune garçon placé dans un foyer pour enfants et adolescents en difficultés.
Alexandre a 14 ans, il est né le 27 avril 1984. Ses parents, dorigine portugaise, ont eu cet enfant hors mariage. Son père ne la pas reconnu à sa naissance. Par la suite, sa mère a rencontré un autre homme, et de cette union un petit garçon est né en 1990. A maintes reprises, Alexandre a demandé de laide auprès de SOS enfants et de la main tendue. Et cest en 1991, quil est placé au foyer par le SPJ, pour le protéger de la violence familiale.
Pendant les premières années de placement, il est pris en charge le week-end par une famille daccueil. Par la suite, après le départ de son beau-père, il rentrait chez lui, pour les week-ends.
Lorsquil habitait chez sa mère, il passait la majeure partie de ses journées dans la rue, où il était considéré comme " chef de la bande ". Dailleurs, que cela soit dans sa vie affective, à la maison ou à lécole, il commandait.
Une des problématiques dAlexandre était la violence. En général, elle était dirigée vers les autres. Cependant, à deux reprises, il a parlé de suicide (violence retournée contre soi). Un soir, il a enjambé le rebord de la fenêtre de sa chambre, alors quil discutait avec un éducateur. Le connaissant, ce dernier a diagnostiqué lacte comme un chantage. De ce fait, il est sorti de la pièce pour éviter une augmentation de la tension, et un réel passage à lacte suicidaire. Alexandre sest apaisé et léducateur a pu, par la suite, discuter avec lui. Quelques mois plus tard, il nous a fait part, à nouveau de ses idées suicidaires. Il désirait se jeter sous un camion. Il disait : " Plus rien ne va dans ma vie, la meilleure chose quil puisse marriver, cest de mourir sous un camion ! ". Il vivait une période de doute et dangoisse, il devait prendre des décisions pour son avenir. Cest-à-dire, rentrer chez lui pour lannée suivante, ou rester au foyer, et par la suite trouver une autre solution. A mon sens, la vie en famille devait représenter linconnu, alors que le foyer était une sécurité, quil devait quitter un jour. Nous avons constaté que lorsquil se trouvait devant une impasse, à un tournant de sa vie ou dans une situation difficile, des idées suicidaires surgissaient.
En juin 1998, il est rentré chez lui, pour vivre avec sa mère et son demi-frère. Son référent continue à le suivre pendant cette année de réadaptation... Je peux donc déduire que le travail effectué par léquipe éducative a été positif. Je ne vais pas reprendre toute la situation et tenter délaborer une prise en charge ; les éléments importants du travail des éducateurs sont cités dans la présentation dAlexandre. Je vais uniquement utiliser la situation pour livrer mes réflexions personnelles sur lapproche éducative des adolescents à conduites suicidaires.
Dans les foyers, la prise en charge des adolescents suicidaires est similaire aux autres adolescents. Je ne vais donc pas citer tous les actes éducatifs liés à une prise en charge. Par contre, je désire mettre en évidence quelques aspects intéressants et pertinents, ils sont cités ci-dessous.
Ces différents points servent de trame pour faire part de mes réflexions. Avant de les développer, je désire présenter un tableau permettant une visualisation des différentes étapes des prises en charge.
Tableau 25 : Les étapes des prises en charge
Lorsque ladolescent présente des risques suicidaires ou a fait une tentative de suicide, léducateur doit mettre en place un accompagnement spécifique. Il doit dabord observer, reconnaître la souffrance et évaluer le réel désir de mort. Si ladolescent a fait une tentative de suicide, léducateur doit lemmener au service des urgences de la région ou faire venir une ambulance. A partir de ce moment-là, comme cité dans le descriptif des centres, il est hospitalisé ou pris en charge à nouveau par le foyer.
Si un réel désir de mort existe, léducateur demande conseil à un des services de la région qui va organiser un encadrement médical urgent. Par contre, si ladolescent ne présente pas de réel désir de mort, léducateur met en place un projet éducatif spécifique avec la proposition dune psychothérapie. Un thérapeute est choisi, toutefois, si ladolescent refuse ce suivi, léducateur doit laccompagner et être suivi par un conseiller.
Chaque prise en charge demande un bilan, afin de vérifier si le projet éducatif permet une évolution ou si celui-ci mérite dêtre réajusté.
Lobservation de ladolescent est importante, car il nexprime pas forcément son mal-être par la parole. Le corps et les comportements révèlent souvent létat intérieur. Certains adolescents évitent de communiquer leur souffrance par peur dêtre considéré comme malade. En outre, la vie communautaire laisse peu de moments individuels où ladolescent est libre pour en parler. A mon avis, la dynamique de groupe, à cet âge, freine lexpression orale des difficultés. Cest pourquoi, nous devons être davantage attentifs aux comportements et tenter de favoriser les moments individuels.
De lobservation découle linterprétation. Celle-ci demande prudence et objectivité et passe par un échange autant indispensable que nécessaire entre collaborateurs. Lobservation permet dapercevoir des signes alarmants, et de développer par la suite une relation de confiance pour les partager avec ladolescent. Ces deux points sont traités ci-dessous.
Des signes alarmants
Un des privilèges de léducateur est de vivre au quotidien avec ladolescent. De ce fait, nous pouvons remarquer des signes alarmants et agir rapidement. En me basant sur les théories expliquées au chapitre précédent et sur ma pratique professionnelle, je désire mettre en avant quelques signes alarmants :
Chaque élément ne conduit bien sûr pas au passage à lacte suicidaire, mais laccumulation de difficultés peut suffir à interroger léducateur sur la santé de ladolescent. Je tiens à mettre en évidence le dernier point, langoisse ascensionnelle. Selon F. Ladame, une montée de langoisse devient de plus en plus envahissante chez ladolescent avant le passage à lacte. Le repérage de cette angoisse nécessite une prise en charge urgente.
Développer une relation de confiance
Le foyer doit susciter la confiance, où chacun peut exister, sexprimer librement et être respecté. Or, la vie communautaire ne garantit pas toutes ses qualités. Il y a des confrontations, des négociations, des sanctions, des injustices, etc. Cest en premier à la personne de référence, en loccurrence léducateur, à veiller au maintien dun climat de confiance.
Ladolescent ne souvre pas à tous les éducateurs, mais il lui arrive de se sentir plus à laise avec une personne. Cette dernière doit être prête à pouvoir assumer la relation. En particulier, lorsquelle se développe, léducateur peut aussi engager le dialogue, se mettre à lécoute dans un esprit empathique, se montrer dune grande disponibilité et chercher à être un appui. Ladolescent en détresse est alors plus à même dexprimer sa souffrance.
Suite à lentretien avec une des responsables de lUnité de Crise pour Adolescents à Genève et en vivant moi-même récemment le deuil de ma grand-maman, jai pris conscience de limportance de la réalité de la souffrance de lautre et de la reconnaître. Mais pourquoi est-ce si important pour ladolescent à conduites suicidaires ? La réponse relève en trois points : partager la douleur, écouter et en parler, évaluer le réel désir de mort.
Partager la douleur
Une personne ne peut souffrir seule, elle a besoin de partager sa douleur. Lorsque ma grand-mère est décédée, je désirais que lon puisse reconnaître quil était dur pour moi de la perdre. ; or, ma souffrance na pas toujours été reconnue. Certaines personnes mont dit : " Tu sais, cest normal, elle a 87 ans " ou encore " quel bel âge pour sen aller, nous on ny arrivera pas ". Ces personnes pensaient diminuer ma douleur, alors que ces paroles magaçaient et me culpabilisaient en rapport à ma tristesse. Ce type dexpérience, vécue par beaucoup est encore plus douloureuse lorsque notre souffrance nest pas écoutée ou reconnue. En en parlant, nous nous attendions à une écoute, un encouragement, un soulagement, etc. Pour ladolescent, le phénomène est identique. La souffrance peut paraître minime pour autrui, mais elle est importante pour la personne qui la vit.
Reconnaître, permet entre autres, douvrir le dialogue. Selon la responsable citée précédemment, plutôt on réagit, plutôt on désamorce la bombe, cest-à-dire la détresse qui pourrait lentraîner au passage à lacte suicidaire. Nous pouvons dire aussi que la reconnaissance permet de " crever labcès " et éviter une infection générale qui le conduirait à la mort ; en dautres termes, ladolescent se sentant compris exprime sa détresse, se sent allégé et disposé à une réflexion constructive.
Ecouter et parler
Pour laisser la personne sexprimer, nous devons prendre le temps découter. Ecouter avec le coeur crée la communication affective indispensable à la poursuite du dialogue.
" Ma plus grande souffrance, cest de navoir jamais été écoutée "
Cette phrase est pour moi révélatrice de limportance de lécoute. Ladolescent peut remettre en cause la considération des autres à son égard, lorsquil ne se sent pas écouté. Parfois, il tente de nous parler, et nous ne sommes pas réceptifs, ou bien nous répondons rapidement sans réellement prêter attention.
Ecouter signifie aussi, être prêt à accueillir le problème et oser laffronter. Or parfois, une parole peut être difficile à entendre et véhicule beaucoup démotions. Le danger existe de mettre divers mécanismes de défense en place pour éviter de souffrir, davoir peur de ce quil pourrait se passer ou de ne pas savoir réagir. Par exemple, nous pouvons refuser de comprendre ladolescent et ses angoisses, banaliser la souffrance en disant que tous les adolescents vivent ça, ou encore minimiser et faire semblant de ne pas comprendre et continuer notre activité.
Pour reconnaître la souffrance, il ne suffit pas découter mais aussi de parler. En évitant le dialogue, nous pensons lui faire oublier sa détresse, alors quil ne loublie pas. Au contraire, ce malaise laccable davantage. " Les non-dits sont pire que tout, on sous-estime le poids du silence ".
Léducateur acquiert les compétences nécessaires pour entretenir un dialogue. Par exemple, il peut dire : " nous reconnaissons que ce que tu vis est difficile. Nous te croyons lorsque tu dis être triste et inquiet ". Parfois, nous nous sentons mal à laise dans certaines situations. Ce sentiment peut devenir plus confortable, si nous lui disons : " Nous sommes inquiets par rapport à ton état, et ce que tu nous dis nous touche ". Partager la douleur, écouter et parler sont les premiers éléments pour reconnaître la souffrance de lautre ; cependant, la personne de confiance doit encore saisir les intentions profondes de ladolescent en crise.
Je tiens à relever un dernier point avant de passer à lévaluation de ce désir de mort. Lorsquune tentative de suicide a lieu au foyer, cette situation ébranle la famille, les adolescents et les éducateurs. Pour éviter les inquiétudes, les sentiments de culpabilité de certains adolescents et dautres passages à lacte suicidaire, il est préférable de convoquer le groupe entier et den parler. Si léquipe éducative ne se sent pas prête pour assumer ce dialogue, un conseiller extérieur peut se déplacer. A mon avis, cette rencontre doit dune part permettre aux adolescents de ne pas se sentir responsable de ce qui sest passé, et dautre part leur expliquer quil existe des moyens autres que le passage à lacte suicidaire pour résoudre les problèmes.
Evaluer le réel désir de mort
La reconnaissance de la souffrance permet à léducateur dévaluer le réel désir de mort et de mettre en place soit un projet éducatif, soit un encadrement médical ou dappeler le service des urgences. Il est évident que si ladolescent exprime verbalement son désir de mort, la situation est considérée comme grave. Par contre, je nai pas de " recette " pour évaluer correctement le désir de mort chez les adolescents qui ne le disent pas tout de suite, mais léducateur peut se référer aux théories, de divers auteurs, présentées dans le chapitre précédent. Elles donnent des pistes de compréhension et enrichit lévaluation. Celle-ci va se porter sur la détresse de ladolescent. Provient-elle des changements qui sopèrent à cet âge ou est-ce de lordre de la pathologie ? Sagit-il de moments dépressifs ou dune dépression ? Y a-t-il des facteurs personnels, familiaux et environnementaux qui peuvent entraîner un passage à lacte suicidaire ? Lorsque lévaluation est difficile, les services régionaux présentés, sont disponibles.
Pendant ces moments-là, léducateur parle concrètement avec ladolescent de ses inquiétudes et lui permet de les nommer. En outre, évoquer la mort permet de réfléchir à sa signification, et aux moyens pensés pour y parvenir. Léducateur lui fait comprendre que la mort ne va pas lui permettre de voir les changements dans sa vie.
La prise en charge générale est en soi thérapeutique, puisque le but de léquipe est daider ladolescent à dépasser ses problèmes pour entrer dans une vie sociale normalisée, rythmée ; elle permet de favoriser une évolution harmonieuse de son existence. Cette aide se fait au travers des actes de la vie quotidienne, par exemple : le réveil, les repas, les leçons, les loisirs, lordre de la maison, y compris les visites chez le dentiste, le médecin et autres soins nécessaires.
Mis à part ces divers actes, un projet spécifique pour chaque patient est mis en place ; il comporte des objectifs éducatifs et laccompagnement en psychothérapie. Voici la description de ces objectifs les plus importants pour un adolescent à conduites suicidaires. Ils sont consignés sur un tableau afin de suivre la situation (cf. tableau 26, p. 109). Pour ma part, lélaboration dun tel projet met en évidence limportance du mandat de léducateur.
Reprenons la situation dAlexandre. Un des objectifs éducatifs pour Alexandre était de travailler son comportement violent. Apprendre aussi à se responsabiliser et ne pas rejeter toujours la faute sur les autres avec des sentiments dinjustice à son égard. Comme la mère nétait pas preneuse dans la prise en charge de son fils, léquipe éducative a orienté son travail sur la personnalité dAlexandre et ses ressources.
De ce fait, il a eu loccasion dêtre suivi par une psychologue qui a travaillé avec lui le dialogue intérieur, en mettant en jeu les différentes facettes de sa personne. Cette aide lui a aussi permis de sexprimer par un autre biais que la violence.
A partir de cet exemple, trois objectifs éducatifs sont maintenant présentés : laide à changer de comportement, à sexprimer et à sautonomiser.
Changer de comportement
Alexandre doit comprendre que pour résoudre les problèmes, il existe dautres comportements que la violence. Pour y parvenir, léquipe va sinvestir à fond dans le vécu quotidien dAlexandre pour tout dabord comprendre ses relations. Pour ce faire des rencontres hebdomadaires, un cadre et des entretiens de famille sont mis sur pied, sans compter lapport du psychothérapeute. De là peut alors surgir de nouveaux comportements !
Lobjectif de ces rencontres est de discuter ouvertement de la semaine écoulée, des situations de stress, de ses comportements, inquiétudes, projets de vie, etc. Avec laide de léducateur, dautres stratégies pour résoudre les problèmes et contenir ses comportements violents et suicidaires sont abordées. Au cours de lentretien, il est important que ladolescent ait la liberté dexprimer ses ressentis. Lorsque cest possible, léducateur le rend participant des moyens à trouver pour résoudre ses problèmes. Par exemple : faire du sport, voir des amis, les ressources spirituelles, etc. Ladolescent peut réfléchir et les nommer lors de la prochaine rencontre. Il devient acteur dans la prise en charge.
Léducateur ne manque pas non plus de lui faire part des observations le concernant, pendant la semaine écoulée. Il sagit dune part des points positifs et de lencourager ; et dautre part des comportements violents et suicidaires que léducateur refuse sans pour autant rejeter ladolescent. Léducateur est une référence et un soutien qui doit lui donner envie de changer. Notre regard et nos attitudes sont très importants, ils doivent aider à reprendre confiance et améliorer lestime de soi.
Dernier point de lentretien ; lorsque ladolescent a fait une tentative de suicide, et sachant combien il est traumatisant pour tout le monde, il est important den reparler avec lui. Il ne doit pas se retrouver seul confronté à lui-même. Ses idéations suicidaires peuvent resurgir et le menacer. Il est donc préférable pour lui, de les dire pour se soulager.
Quand léquipe éducative pose un cadre ferme et clair, ladolescent trouve des points de repères et se sent en sécurité. Cest lessentiel. Une continuité dans le suivi, tout en maintenant des exigences adaptées aux difficultés rencontrées, va laider à sadapter dans sa vie future. Le danger provient dexigences trop contraignantes vécues alors comme des frustrations. Dans ce cas, il va éprouvé de sérieuses difficultés à sintégrer dans le réseau social.
La famille est la source de lidentité de la personne et les difficultés à ce niveau ont très souvent des répercussions sur le comportement. Cest pourquoi lentretien avec la famille peut apporter des éléments décisifs.
Une prise de conscience des parents et une réorganisation du système familial permettent des changements de comportement chez ladolescent. Par contre, si la famille nest pas participante dans la prise en charge, léducateur doit aider ladolescent à acquérir la capacité de vivre normalement, malgré le dysfonctionnement familial.
Les adolescents en foyer, souffrent souvent de divers problèmes familiaux. Une tentative de suicide peut ébranler la famille, certes, mais léducateur doit donc profiter de ce moment pour mettre à plat les difficultés, les tensions entre les membres et situer la place de chacun au sein de celle-ci. En outre, il existe souvent des problèmes de communication et nous devons veiller à laisser chaque membre sexprimer sur leur ressentis par rapport à lacte suicidaire. Les non-dits sont souvent plus douloureux que les silences. Pour diriger ces entretiens, léducateur peut demander, en accord avec la famille, laide dun collègue ou dune autre personne.
Sexprimer
Parmi les moyens dexpression, le langage occupe une place importante et il est vrai que parler est préférable au passage à lacte violent ou suicidaire. Alexandre doit intégrer cet état de fait. Parler, cest souvrir, cest dire ce quon pense ; cela conduit à la confrontation didées, à la critique, et peut-être au jugement. La personne en détresse na souvent pas la force denvisager cette situation. Elle a peur de la confrontation. Cest un travail de longue haleine. Et pourtant, la confrontation oblige des choix pour se positionner et de ce fait, entraîne une meilleure connaissance de soi. Cet exercice lui sera très utile pour établir de bonnes relations sociales.
Mis à part les moments privilégiés lors dactes quotidiens, léducateur a des moyens à disposition pour faciliter lexpression, il sagit des activités ; je les classe en deux catégories. La première englobe les ateliers dexpression tels que la musique, le dessin, la danse, la peinture, etc. Ils vont lui permettre déprouver des émotions et de les exprimer de manière non verbale. La deuxième catégorie se compose des activités médiatrices telles quateliers de poterie, cuisine, photos, sports, etc. Elles permettent des échanges entre les participants. Notons surtout, que les regards ne se fixent pas sur ladolescent mais sur lobjet en commun. Ainsi lactivité médiatrice détend latmosphère et rend la personne plus libre de sexprimer.
Sautonomiser
Comme cité dans la théorie, ladolescent est en quête dautonomie sur le plan individuel et social ; il devient progressivement indépendant. Ladolescent commence à assumer ses relations affectives, son argent, ses études, sinvestit dans son projet de vie, etc.
Le rôle de léducateur est de laccompagner dans ce processus dautonomie et de prise de responsabilité. Léducateur doit " lâcher prise " ; il laisse le jeune prendre des décisions sans tout contrôler. Sans se désintéresser de lui, il reste au contraire très présent pour lorienter et le conseiller (choix professionnel, gestion de biens, etc.).
La principale difficulté pour un adolescent à conduites suicidaires se trouve justement dans cette prise de responsabilités. Ce problème est connu de léducateur qui me en place des tâches pour le faire progresser. Il peut lui confier des petites tâches à organiser au sein du foyer. Par exemple : lorganisation des repas, des commissions, des nettoyages, des loisirs, etc. Le jeune va ainsi reprendre confiance en lui. Au sujet de ses relations affectives, lapprentissage de relations vraies et durables reste long. Et pourtant lorsquil aura vérifié cela dans léquipe, il se sentira accepté, aimé, tout près de lautonomie.
Hors du foyer, ladolescent doit aussi être capable de gérer sa vie. Mais il reste tout de même fragile psychologiquement et peut avoir besoin daide. Il est donc indispensable de linformer valablement des services à disposition en cas de crise.
5.2 Laccompagnement en psychothérapie
La tentative de suicide dénote une souffrance dont lexplication est à rechercher plus profondément. Elle est indispensable dans la prise en charge des adolescents à conduites suicidaires. Cependant, plusieurs éléments peuvent les freiner à suivre une psychothérapie. Premièrement, ladolescent pense quelle est réservée aux malades mentaux. Léducateur doit donc dédramatiser les consultations psychiatriques et lui faire prendre conscience quil peut en retirer quelque chose. En dautres termes, il doit le préparer à comprendre lintérêt dune psychothérapie, et cela peut prendre du temps. Deuxièmement, il na peut-être tout simplement pas envie ou peur de se retrouver seul, face à un psychothérapeute. Dans ce cas-là, léducateur peut laccompagner aux séances. Le psychothérapeute peut faire resurgir des éléments du passé et fragiliser ladolescent. Léducateur doit être attentif et le soutenir lors des retours.
La collaboration entre éducateur et psychothérapeute doit être travaillée davantage, car nos professions sont complémentaires. Sil est intéressant de faire parler des souvenirs, il est non moins important de savoir comment vivre avec ce passé. Laccompagnement quotidien des adolescents, nous permet davoir un impact sur leur vie. De ce fait, le psychothérapeute pourrait nous proposer des pistes de travail. En outre, sans dévoiler les dires de ladolescent en thérapie, nous pourrions échanger sur son comportement ou ses émotions pendant la semaine. Car ladolescent peut ne pas être le même en psychothérapie et au foyer, cest-à-dire exprimer de la tristesse en psychothérapie et sembler joyeux au foyer, ou inversement. A mon avis, une meilleure collaboration ne peut quenrichir la prise en charge.
Par contre, si ladolescent refuse un suivi thérapeutique, il incombe à léducateur de laccompagner dans sa détresse. Ce dernier peut être conseillé par un des services décrits précédemment. Si léducateur ne prend pas en charge cette détresse, ladolescent peut le vivre comme un abandon, car à nouveau, personne ne peut entendre sa détresse. Par contre, si léducateur est suivi, ladolescent peut investir davantage la relation et se sentir soutenu.
6. Bilan de la prise en charge
Lorsque nous mettons en place un projet éducatif, il est important dévaluer les objectifs. Ce moyen permet de vérifier lévolution de ladolescent par rapport à ses difficultés et sil peut les dépasser. Pour ce faire, léducateur crée une grille dévaluation comme il lui convient, en reprenant chaque objectif. Etablissons celle dAlexandre avec les trois points suivants : changer de comportement, sexprimer et sautonomiser. Cette grille rassemble en quatre colonnes toutes les informations notées par écrit dès lélaboration des objectifs. Elle force à tirer une synthèse pour finalement le bilan de la prise en charge (cf. tableau 26, p. 109).
La première colonne comporte la date de lentretien. La deuxième colonne spécifie lobjectif et permet la prise de note des situations et des observations. Quant à la troisième colonne, elle comporte les résolutions entreprises par ladolescent dans la situation. Elle permet aussi de noter lévaluation de son comportement. Et la quatrième colonne donne à léducateur la possibilité décrire les résultats de lentretien et les nouveaux objectifs si nécessaire.
Tableau 26 : Grille dévaluation des objectifs
Objectif 1 : changer de comportement |
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Date | Situation de stress/ comportement |
Résolutions entreprises/ évaluations |
Résultats dentretien/ nouveaux objectifs |
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Objectif 2 : sexprimer |
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Date | Expression en individuelle | Résolutions entreprises/ évaluations |
Résultats dentretien/ nouveaux objectifs |
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Date | Expression en groupe | Résolutions entreprises/ évaluations |
Résultats dentretien/ nouveaux objectifs |
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Date | Expression en psycho- thérapie |
Résolutions entreprises/ évaluations |
Résultats dentretien/ nouveaux objectifs |
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Objectif 3 : sautonomiser |
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Date | Relations affectives | Résolutions entreprises/ évaluations |
Résultats dentretien/ nouveaux objectifs |
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Date | Argent | Résolutions entreprises/ évaluations |
Résultats dentretien/ nouveaux objectifs |
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Date | Etudes et formation | Résolutions entreprises/ évaluations |
Résultats dentretien/ nouveaux objectifs |
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Date | Projet de vie | Résolutions entreprises/ évaluations |
Résultats dentretien/ nouveaux objectifs |
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7. Le besoin daide de laidant
Prendre en charge des adolescents à conduites suicidaires peut devenir éprouvant pour léducateur. A ce sujet, je désire développer deux points : reconnaître ses limites et les lieux de partage.
Reconnaître ses limites
Notre siècle technologique et des sciences humaines a fait naître, à mon sens, une nouvelle maladie, cest le perfectionnisme. Léducateur doit réussir, être respecté, mais a-t-il le droit aux faiblesses ? Léducateur peut se trouver dans le désarroi, lorsquil narrive plus à prendre en charge un adolescent. Ceci est dautant plus éprouvant lorsquil sagit dadolescents à conduites suicidaires. La mort nous remet en question et peut représenter aussi, léchec du suivi apporté. Pour éviter de se retrouver dans limpasse, il se peut que léducateur tente de rester neutre dans les relations. Dans un dictionnaire, neutre signifie : " Qui nest marqué par aucun accent, aucun sentiment ". Cette définition confirme limpossibilité de la neutralité dans notre travail. Nous devons donc apprendre à reconnaître nos limites et accepter la collaboration et laide dautrui. Je crois quil est important aussi pour ladolescent de ne pas être entouré de héros mais de personnes humaines avec leurs forces et leurs faiblesses. Pour ma part, les lieux de partage, cités ci-dessous, peuvent être un excellent moyen offert à laidant.
Les lieux de partage
Pour permettre une décharge émotionnelle et un éclairage sur les situations difficiles, les éducateurs peuvent organiser des supervisions de groupe ou individuelles. Dailleurs, la majorité des foyers organisent ces rencontres. En général, elles concernent davantage les difficultés des adolescents que celles des éducateurs. A la suite de cette constatation, serait-il judicieux dorganiser des groupes de partage pour éducateurs travaillant avec des adolescents suicidaires ? Reconnaître ses limites avec authenticité et transparence au milieu dautres collaborateurs est indispensable pour poursuivre sa mission. Ainsi une mise en commun des situations, émotions, désarrois et attitudes encourage et enrichit chacun. La rencontre de personnes vivant les mêmes difficultés déculpabilisent et réconfortent également.
Un groupe de partage de ce genre donne de la force dans la prise en charge et pourrait diminuer les mécanismes de défense que nous utilisons trop souvent même inconsciemment.
Conclusion
Pour prendre en charge des adolescents à conduites suicidaires, jai relevé cinq points importants. Il sagit de lobservation, de reconnaître la souffrance, du projet éducatif, du bilan de la prise en charge et du besoin daide de laidant.
Lobservation sert à relever une problématique, en loccurrence, elle a permis aux éducateurs de repérer les comportements violents et suicidaires. Reconnaître la souffrance permet douvrir le dialogue et dévaluer le réel désir de mort. Le projet éducatif concrétise la prise en charge par le biais dobjectifs spécifiques. Quant au bilan de la prise en charge, celui-ci évalue la situation de ladolescent et permet un réajustement des objectifs sils ne sont pas atteints. Pour finir, je souligne limportance dapporter une aide aux éducateurs, car, nous le savons, le suivi dadolescents à conduites suicidaires léprouve surtout psychiquement.
A partir de mon expérience professionnelle, certes encore petite, je peux dire que les éducateurs ne sont pas des psychothérapeutes. Par contre, les actes quotidiens sont en soi thérapeutiques. Ils tentent avec leur qualité dêtre humain et les outils professionnels, doffrir à ladolescent une issue à sa détresse. Une collaboration plus intense entres psychothérapeutes et éducateurs devraient exister. Ainsi la prise en charge des adolescents serait plus complète et harmonieuse.
Arrivé au terme de ce travail de recherche, je désire en apporter une conclusion générale. Elle fait lobjet des pages suivantes.
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Remettre en question la vie, penser à la mort, sont des réflexions faisant partie du processus de maturation de lindividu dans son adolescence ; mais sil en arrive à lidéation suicidaire, cela démontre une souffrance qui doit dêtre découverte et reconnue. Quest-ce que le canton de Vaud met en place comme infrastructure pour le suivi de ces jeunes ? Comment en sont-ils arrivés là ? Quel est le rôle de léducateur dans laccompagnement ? Ce travail de recherche a tenté de répondre à ces trois questions.
Dans la première partie, les descriptifs des centres et unités daccompagnement psychiatrique présentent les buts et moyens de prise en charge des adolescents suicidants. Je constate quil nexiste pas de centre daccueil pour ces situations durgence. Actuellement, la seule unité dhospitalisation est lUHPA. Toutefois, la capacité daccueil journalière est de sept adolescents. Cette unité ne peut pas répondre à toutes les demandes urgentes. Nous devons offrir dautres lieux de transition. Les conduites suicidaires sont importantes dans notre société, en particulier les adolescents et nous devons nous en occuper. Nous ne pouvons pas banaliser cet acte suicidaire, car si aucun changement ne sopère dans leur vie, ils risquent de le réitérer. Leur entourage (la famille, les amis ou les professionnels du secteur social) peut aussi offrir un soutien et les accompagner. Ce travail de recherche montre que la prise en charge idéale passe par un accompagnement de ladolescent dans sa vie de tous les jours et un suivi thérapeutique.
Dans la deuxième partie, les différents apports théoriques nous renseignent sur les éléments pouvant entraîner des comportements suicidaires, considérés dailleurs souvent comme pathologiques. De ce fait, la prise en charge dadolescents nécessite une psychothérapie pour mettre en lumière les éléments déclencheurs.
La troisième partie est pratique. Les pistes de travail évoquées montrent limportance de notre suivi, en tant quéducateur. En vivant au quotidien avec eux, nous avons lavantage de pouvoir repérer les signes alarmants et prévenir aussi les passages à lacte. Les apports théoriques et la connaissance des services offrent une prise en charge professionnelle. Ils permettent à léducateur de mettre en place un projet daccompagnement de ladolescent.
A la suite de lélaboration de ce travail de diplôme, je constate un décalage entre le projet initial et le travail effectué. Les objectifs de départ étaient de décrire les centres médicalisés prenant en charge des adolescents suicidants, danalyser une littérature spécifique à lapproche éducative du comportement suicidaire, de confronter les modèles médical et socio-éducatif et damener des réflexions personnelles sur laction socio-éducative.
Le décalage se situe au niveau de lanalyse dune littérature spécifique sur lapproche éducative. Nayant pas trouvé douvrages spécifiques, je nai pas pu comparer les modèles médical et socio-éducatif. En fait, les recherches bibliographiques furent longues et sans résultat. Je cherchais, peut-être, des recettes toutes prêtes sur laccompagnement dadolescents suicidaires, mais cette problématique est beaucoup plus complexe. Il existe plus décrits sur la compréhension de lacte suicidaire que sur la prise en charge de ces personnes. Cette découverte est étonnante dans un tel domaine.
Passons au bilan personnel. Par le biais de ce travail, jai découvert la structure psychiatrique vaudoise, la complexité des adolescents à conduites suicidaires, leur prise en charge et lapparition de mes limites.
Jai choisi ce sujet de mémoire sans connaître les services susceptibles de prendre en charge des adolescents suicidants. La recherche de ces services et par la suite leur présentation, ont été une découverte très enrichissante. Toutefois, jai rencontré quelques difficultés à traiter les informations, car le questionnaire créé nétait pas assez complet et précis. Jai dû à plusieurs reprises recontacter les services pour récolter davantage de renseignements ; leur disponibilité et leur collaboration ont été une grande aide. Finalement, le questionnaire a principalement servi de base aux entretiens.
Prendre en charge des adolescents à conduites suicidaires est une chose complexe ! Il est difficile de percevoir les buts recherchés au travers du passage à lacte ; il peut sagir dun réel désir de mort, dune fuite, dun message, dun chantage, etc. Nous devons trouver donc des moyens pour les comprendre premièrement ; et deuxièmement nous devons leur donner un espoir de vivre, les aider à dépasser cette impasse et trouver dautres possibilités que la mort pour résoudre leurs problèmes. Un de ces moyens réside dans le soutien dune personne extérieure. Nous avons donc un rôle à jouer : celui de les accompagner dans la proximité, les écouter et dialoguer. Largument prônant la liberté individuelle en laissant une personne commettre un suicide, nest pas du tout convaincant. Et ceci dautant plus lorsquil sagit dadolescents ne pouvant pas mesurer tous les enjeux de leur acte.
En ce qui concerne les prises en charge, jai découvert que le travail effectué par les services psychiatriques et les foyers est complémentaire. Les psychiatres soignent les pathologies, et les éducateurs accompagnent et offrent des points de repères avec sécurité. Ces deux professions sont appelées à développer leur collaboration pour harmoniser leurs travaux et mettre en commun leurs objectifs.
Ce travail de recherche a permis aussi des réflexions sur lapproche éducative. Il serait intéressant de donner suite à cette ébauche et rassembler les expériences des professionnels pour créer un concept de prise en charge spécifique pour adolescents à conduites suicidaires.
Traiter un sujet comme les tentatives de suicide des adolescents nest pas facile. Ce thème évoque la vie, la mort, la détresse, etc. Ce travail de diplôme a fait apparaître mes limites, celle de la compréhension de lacte suicidaire dune part et de la gestion de la souffrance dautrui dautre part. La lecture des divers ouvrages a provoqué quelques moments dangoisse. Le désir de mort de ces adolescents ma ébranlée. Jai réellement pris conscience, avec laide dun superviseur, de ce quils pouvaient vivre. Tenter de comprendre le pourquoi des comportements suicidaires a suscité quelques interrogations sur le sens que je donne à ma vie, à ma mort et sur mes propres moyens de dépasser ce genre de questions.
Cette expérience a été difficile, cependant mes ressentis mont permis de faire le lien avec les ressentis possibles dans la pratique professionnelle. Dautre part, en tant que professionnels, nous devons apprendre à gérer la souffrance dautrui. Elle nous affecte, nous démunit et nous rend impuissant. Je crois quil est important dêtre aidé, suivi et encouragé pour faire face à ces vagues de sentiments qui peuvent empêcher une prise en charge adéquate.
Pour conclure, je désire faire part dune question ouverte qui ma suivie tout au long de ce travail : serait-il judicieux de créer un lieu convivial et anonyme où les adolescents suicidaires pourraient venir discuter ? Je crois que la disponibilité et lécoute des responsables et des personnes expérimentées favoriseraient le partage avec ceux qui nont pas de confident. En outre, les rencontres pourraient encourager les plus démunis à prendre exemple sur ceux qui ont pu dépasser les difficultés. Par ailleurs, les partages pourraient, à mon avis, désamorcer les crises et diminuer les résistances au travail thérapeutique qui leur serait conseillé.
Le suicide fait peur et très souvent nous évitons den parler. Par la proximité avec les adolescents, ils se sentent moins seuls... Alors, allons à leur rencontre... Et par le dialogue, ils se soulagent... Alors, parlons-en ! ! !