GRAND CONSEIL | 00h28 Dans un débat bloqué, et pour prouver sa dureté face aux drogues douces, la droite suit Jacques-André Haury. Problèmes juridiques et pratiques en vue.
«Ceux qui s’opposent à ma motion sont partisans de la légalisation des drogues douces!» Hier au Grand Conseil, l’écolibéral Jacques-André Haury a fait de son texte l’étendard de la fermeté.
Prônant de confier aux directeurs d’écoles la compétence de confirmer, par des tests, qu’un élève a consommé du cannabis, il a été approuvé par la masse compacte des députés de droite. Verts, socialistes et centristes ont dénoncé en vain ce «procès d’intention». Patronne du Département de la formation, de la jeunesse et de la culture (DFJC), Anne-Catherine Lyon a rappelé que l’école «était déjà un des lieux les plus normés et les plus cadrés de la société». Sans plus de résultats. A l’appel nominal, par 72 voix contre 64 et avec 4 abstentions, mission a été donnée au Conseil d’Etat de rédiger un projet préparant ces tests antidrogues.
«On va vers un océan de problèmes juridiques», pronostiquait Anne-Catherine Lyon. Son premier acte sera de réclamer un avis de droit approfondi. Dans le débat déjà, Jean-Michel Dolivo (A Gauche toute!), avocat de son métier, s’était inquiété: «Que fera l’école si un élève refuse cette intrusion dans sa vie privée?»
Les échanges ont été trop émotionnels pour apporter des réponses à ce type de question. Pour le radical Frédéric Borloz: «Ne rien faire serait la pire des solutions.» «Cette motion n’est pas de la répression, mais de la prévention», s’est élancé l’UDC François Brélaz. Quant au groupe libéral, c’est unanime qu’il s’est rangé derrière les tests. «L’école ne peut être une île sans répression», a estimé son président, Jean-Marie Surer.
«Elle ne l’est pas; la loi scolaire prévoit expressément que les élèves ne consomment ni stupéfiants ni alcools, et ne fument pas», a rappelé Jean-Michel Dolivo. La même loi prévoit aussi que si la conduite d’un élève laisse à désirer, les parents sont prévenus. «Laissez chacun à sa place, a tenté l’écologiste Jean-Marc Chollet. Que l’école enseigne, que les parents éduquent, que la police dénonce.» Municipal de la Police de Vevey, le centriste Jérôme Christen a encore souligné l’opposition de tous les professionnels de la prévention: «Il n’existe aucun argument convainquant pour un test.»
Professionnels opposés
Contacté au terme du débat, Jean-Félix Savary, secrétaire du Groupe romand d’étude des addictions, le redisait: «Je suis très circonspect face à ce type de mesure. On va diminuer la marge de manoeuvre de l’école dans le dialogue qu’elle peut nouer avec un jeune.» Pour Jacques-André Haury, l’important est ailleurs: «Cela renforce l’idée que le cannabis est une substance interdite.»
LAURENT BUSSLINGER | 23 Avril 2008 | 00h28
Source: 24 Heures