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stressent, paraît-il. Qui ? Les élèves, à l'approche du bac ou des
concours. Ou alors face à l'épineuse question de leur orientation. Une
montée d'adrénaline en forme de "marronnier"
, comme on dit chez les
journalistes. Chaque année la même chose. Le stress, aujourd'hui, se
"gère". Comme on apprend à gérer son compte, sa carrière
professionnelle, sa vie affective ou ses émotions. Nul besoin de
médicaments, ou de somnifères. Encore que. Ces traditionnelles potions
peuvent toujours accompagner les remèdes nouveaux. Parmi ces derniers : le
recours au coaching ("mentorat" en français pour les puristes, quoique
"accompagnement" siérait probablement mieux).
On parle couramment de celui qui fait florès dans le sport, on connaît
celui qui bourgeonne en entreprises, voici donc venu le temps du coaching
scolaire. Pour l'orientation ou la préparation des examens. Plus fort que
le soutien à la maison.
La personnalisation d'un accompagnement par un professionnel (formation
non encore réglementée) connaîtrait un engouement. Dans un rapport au Haut
Conseil de l'évaluation de l'école, Dominique Glasman, professeur de
sociologie à l'université de Savoie, relevait déjà en 2004 certes la
proximité de ce mode de soutien avec les cours particuliers (pour ce qui
est d'apprendre à travailler, se motiver, connaître ses atouts et ses
manques, bénéficier d'un "espace intermédiaire" entre famille et
école), mais aussi sa spécificité : "Ce qui est visé par le coaching,
disait le sociologue, semble reposer avant tout sur une position
"méta", de distance à soi-même, de sortie provisoire de soi afin de se
construire. Il s'agit au fond de se faire l'artisan de soi, le producteur
conscient de sa propre vie, le maître de sa destinée. Le coach aide le
jeune à accoucher de lui-même."
L'arrivée du coaching mériterait plus attention que dénonciation :
"Il serait regrettable qu'une réserve de bon aloi empêche de voir, à
travers le coaching, les signes supplémentaires du changement de statut
des individus dans notre société et de ses retombées sur les
relations au sein de la famille, écrivait Dominique Glasman ;
d'autant plus que, si cela se vérifie, il est difficile d'imaginer que
cela n'aura pas de conséquences sur le système scolaire et les modes de
transmission du savoir."
Dans le Figaro du 5 juin, un coach professionnel parle ainsi de
son métier : "Le coach que je suis est un intermédiaire entre les
jeunes et l'extérieur, avec un langage d'ado, mais une apparence et un
discours d'adulte. J'écoute et je conseille, sans juger ni imposer. Un peu
comme un grand frère neutre qui guide vers la maturation."
Un grand frère. Cela fait penser aux trouvailles de trois chercheurs en
éducation de l'université de Montréal qui ont planché sur les devoirs
scolaires et que la revue Sciences humaines (juin 2007) a relatées
(Roch Chouinard, Jean Archambault et Andréane Rheault, "Les devoirs,
corvée inutile ou élément essentiel de la réussite scolaire ?" Revue
des sciences de l'éducation, 2006). On sait qu'il y a ceux qui sont
contre : qui trouvent qu'il vaut mieux faire du sport ou du théâtre que de
s'évertuer à gratter à la maison. Et ceux qui sont pour : qui pensent
qu'il vaut mieux faire entrer dans la tête ce qui à l'école n'a peut-être
été qu'effleuré.
Les trois chercheurs québécois ont constaté que ce n'étaient pas les
devoirs en eux-mêmes qui favorisaient les progrès des élèves, mais le
contexte de leur réalisation. Comme les élèves font surtout leur travail
pour faire plaisir à leurs parents et à leurs enseignants, les devoirs
peuvent nourrir une certaine motivation et être l'occasion de favoriser
les liens familiaux. Car ce qui est en jeu, avec les devoirs, plus que
leur contenu, c'est la relation entre l'adulte et l'enfant. D'où
l'importance du grand frère, quand viennent parfois à manquer -
directement ou symboliquement - les parents.